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Le Glaive Et Les Amours

Le Glaive Et Les Amours

Titel: Le Glaive Et Les Amours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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loin
de la grille du parloir que vous savez, lui faisait quelque peine.
    Mais Louis, implacable en sa justice, l’était aussi pour
lui-même. Il accepta à la parfin l’expédition, et départit par neige et grêle
sur les routes glacées. Gaston, dès qu’il sut que le roi avançait vers lui avec
une armée, lui envoya en toute hâte une estafette pour le prier instamment de
ne pas aller plus loin qu’Orléans, vu que lui-même, quittant Blois, l’allait
rejoindre pour s’entendre avec lui.
    Après cette lettre, tout ne fut plus qu’idylle. Les deux
frères, avec la même émotion, jouèrent une nouvelle fois la scène de la
réconciliation avec de fortes brassées et de belles phrases de cour, élégantes
et ampoulées, gages d’une affection éternelle. Le roi ne donna assurément point
la place de sûreté tant de fois réclamée, mais les dettes de Gaston – rançon de
sa vie magnifique – furent payées. On lui rendit aussi les revenus qu’on avait
mis sous séquestre, et on lui promit l’énorme boursicot de cent mille livres
qu’il réclamait pour reconstruire le château de Blois. Le roi, enfin,
reconnaissait son mariage, mais il ne serait légalement parfait qu’au moment où
il lui plairait de le faire célébrer au Louvre. Il peut paraître étonnant que
Gaston ait accepté une clause qui remettait à une date indéterminée la réunion
avec son épouse. Il est vrai que l’attente ne serait pas si longue à Blois, en
compagnie de joyeux compagnons et de douces caillettes.
    Chose curieuse, c’est le roi qui, séparé à Orléans de
Mademoiselle de La Fayette, « trouvait les soirées bien longues », et
pâtissait de son absence. À cette occasion, je me fis cette remarque qu’avec
les deux frères fondus ensemble, on eût fait un parfait amant, l’un donnant le
corps et l’autre, le cœur.
    Pour le comte de Soissons, cloué par la peur à Sedan, le roi
et le cardinal trouvèrent une habile solution. Le roi fit une déclaration –
certifiée par le Parlement – qui promettait l’amnistie à Soissons et à ses
serviteurs pourvu qu’ils se remissent en leur devoir dans les quinze jours qui
suivraient. Cette proclamation donna lieu à un échange de lettres courtoises
entre Richelieu et Soissons, Richelieu lui écrivant dans des termes très
pesés : « Monsieur, je vous témoigne la joie que j’ai de ce que,
prenant le chemin de vous remettre entièrement dans les bonnes grâces du roi,
vous prenez aussi celui de vous garantir de votre perte. » Dans cette
phrase, on entend à la fin comme un petit coup de fouet ou si l’on veut un avertissement.
Soissons, pour son plus grand malheur, était un grand fol et il n’écouta point.
Il voulait bien rentrer dans le devoir, mais il désirait demeurer à Sedan
jusqu’en 1641. Le roi eût désiré qu’on le lui refusât, mais le cardinal le
convainquit de l’y laisser, non qu’il eût quelque fiance en la loyauté de
Soissons, estimant tout au rebours qu’il était l’homme de toutes les
brouilleries, mais qu’il valait mieux qu’il brouillât loin de Paris, et surtout
loin de Blois.
    Il ne se trompait pas, car au bout de peu de temps, le comte
de Soissons réussissait à grouper autour de lui les Grands qui voulaient en
finir avec le cardinal : les ducs de La Valette, de Guise et de Bouillon.
    Le complot fut une aubaine pour nos ennemis. Les Impériaux
donnèrent aux insurgés sept mille hommes, et les Espagnols promirent des
pécunes. Cependant, Gaston, maugré qu’on lui eût dépêché un sieur de Bruxelles
pour le prier de se joindre à la coalition, non seulement refusa, mais arrêta
Vaucelle. Et il fit bien. C’était, en réalité, un agent du cardinal, lequel
voulait, par ce subterfuge, savoir si Gaston demeurerait fidèle à ses serments.
    Le roi dépêcha à Sedan, commandés par le maréchal de
Châtillon, huit mille hommes et deux mille chevaux. C’était assez peu, mais
Charles IV de Lorraine avait promis d’envoyer des troupes, lesquelles ne
vinrent jamais : Charles IV ayant avalé sa promesse. Ce qui ne lui
porta pas chance, comme on verra. La rencontre entre l’armée de Soissons et
celle du roi eut lieu à La Marfée, et le comte de Soissons l’emporta. Mais ce
succès lui fut fatal, car apercevant un petit corps de gendarmerie royale qui
se retirait, Soissons, dans l’ivresse de la victoire, voulut l’anéantir. Dans
la mêlée, il reçut dans l’œil un coup de pistolet qui lui enleva, à la

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