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Le Glaive Et Les Amours

Le Glaive Et Les Amours

Titel: Le Glaive Et Les Amours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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leur vulgarité et leurs
insolentes avances.
    J’arrivai avec quelque retard à Sigean où le roi tenait un
Conseil de guerre en présence de Charpentier (envoyé par le cardinal), le
maréchal de La Meilleraye, et Monsieur de Maillé-Brézé, amiral de la flotte.
    Ce Conseil fut de grande conséquence, étant fondé sur les
renseignements des plus précieux, recueillis et rassemblés par le cardinal. Il
fut décidé ce jour-là que la flotte espagnole étant nombreuse et redoutable, il
fallait faire venir en Méditerranée, par le détroit de Gibraltar, les vaisseaux
français de l’Atlantique afin qu’ils s’ajoutassent à ceux de la Méditerranée et
pussent constituer une force numérique aussi importante que celle de
l’Espagnol. Cette excellente décision n’émut nullement Philippe IV, ni le
comte-duc Olivarès, lequel proclama urbi et orbi que les Français
pouvaient bien faire ce qu’ils voulaient, jamais ils n’arracheraient à
l’Espagne l’empire des mers.
    À mon sentiment, nos grands guerriers devraient se méfier de
ces forfanteries fracassantes. Le lecteur se ramentoit que les Anglais, jadis,
avaient juré que les Français ne leur reprendraient Calais que lorsque le plomb
flotterait sur l’eau. Plus récemment, les Espagnols clamèrent que les Français
ne reprendraient Arras que lorsque les souris mangeraient les chats… Pauvres
chats, ils furent mangés. Et notre flotte devant Perpignan mit en échec la
flotte espagnole.

 
CHAPITRE X
    Le roi et le maréchal de La Meilleraye avaient décidé que
Collioure serait de prime assiégée et prise avant qu’on entreprit le siège de
Perpignan, et comme Collioure était située au sud de Perpignan, il nous fallut
contourner la ville à bonne distance avant d’atteindre notre but.
    Ceux qui avaient cru ne faire de Collioure qu’une bouchée
furent bien déçus. Car, si la ville elle-même était peu protégée et fut facile
à occuper, il n’en fut pas de même du château. Construit avec de solides blocs
de pierre sur un terrain rocheux, il paraissait quasiment impossible de
pétarder à la base un point quelconque de ce mur crénelé. En outre, il était
bien garni en artillerie et nous tenait le jour à distance par un feu nourri.
On m’a dit – mais je ne saurais acertainer si c’est vrai – qu’il avait été
construit par les Catalans pour faire échec aux pirates mauresques qui
écumaient les ports méditerranéens pour en tirer une grande picorée d’or, de
bijoux, de vivres et de femmes.
    Chose étrange, la personne qui dans ce prédicament nous tira
d’affaire fut un de mes charrons qui affirma que c’était là beaucoup de souci
pour rien car, à en croire sa jugeote, quelle que fut la dureté de la pierre,
il était toujours possible d’y percer un trou à force de patience et de
muscles.
    Je répétai ce propos au maréchal de La Meilleraye. Il
observa que ce n’était pas le tout de pétarder un mur, encore faudrait-il
savoir ce qu’il y avait derrière, et s’il valait la peine qu’on l’éclatât.
    Là-dessus, il envoya de nuit deux de ses émissaires qu’on
appelait dans leurs régiments les fantômes, car ils avaient l’art de passer
partout sans faire le moindre bruit. Ceux-ci, bien vêtus de noir de la tête aux
pieds, passèrent toute une nuit à explorer le mur extérieur du château, qu’ils
trouvèrent de reste fort mal gardé, les assiégés se contentant de clore les
huis, mais sans envoyer la nuit des patrouilles au-dehors des murs pour en
surveiller les abords.
    Nos deux fantômes prirent tout leur temps, et l’oreille
collée au mur ils avançaient pas à pas, quand tout soudain l’un d’eux s’arrêta
et en un souffle dit à son compagnon : « Écoute un peu, couillu, de
l’autre côté du mur il me paraît que j’entends comme un clapotis. »
    Le « couillu » prêta l’oreille et dit :
« C’est ma fé vrai et je jurerais que cette putain de puits alimente le
château. »
    « Ne jure pas, couillu, si tu veux pas qu’au Jugement
dernier, dit son compère, on suspende ce que je sais à un arbre le reste de ta
putain de vie. » « Il n’y a pas d’arbre au paradis, dit le couillu,
pour ne pas tenter les Ève qui sont là. Mais c’est pas tout de jurer,
poursuivit-il, faut encore marquer l’endroit du mur où l’on a ouï qu’il y avait
de l’eau derrière. » Ils se fouillèrent les poches et y trouvèrent une
pipe et cinq sols, mais cinq sols, quand même,

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