Le grand voyage
dans la bonne direction, et pourraient leur rendre visite... mais
Jondalar se rendit compte qu’il ne savait pas où les chercher exactement. Ceux
d’Haduma avaient trouvé Thonolan et Jondalar à leur campement, mais il ne
connaissait pas l’emplacement exact de leurs cavernes. Il savait seulement qu’elles
se trouvaient à l’ouest de la Sœur, et de la Grande Rivière Mère. Il se
souvenait vaguement avoir chassé avec eux dans la région comprise entre les
deux rivières, ce qui ne constituait qu’un maigre indice. Il avait peu de
chance de savoir un jour si Noria avait mis ce bébé au monde.
Ayla songea d’abord qu’il était nécessaire d’attendre la fin du
Voyage avant de commencer un enfant, puis elle médita sur le peuple de
Jondalar. Avant toute chose, l’accepteraient-ils ? Certes, sa rencontre
avec les Sharamudoï l’avait rendue confiante. Elle trouverait un foyer quelque
part, mais pas forcément chez les Zelandonii. Elle n’oubliait pas la violente
répulsion de Jondalar découvrant qu’elle avait été élevée par le Clan, et se
souvint de son comportement étrange chez les Mamutoï, l’hiver précédent.
L’une des causes en avait été Ranec. Dans le Clan, la jalousie
était inconnue, et elle n’avait compris que peu avant leur départ de quel mal
souffrait Jondalar. Même s’il avait éprouvé un tel sentiment à cause d’une
femme, un homme du Clan ne l’aurait jamais montré. Mais le comportement étrange
de Jondalar était aussi dicté par son inquiétude concernant l’accueil que son
propre peuple réserverait à Ayla. Elle avait fini par comprendre que, même s’il
l’aimait, il n’en avait pas moins eu honte de son enfance parmi le Clan, et
surtout, surtout de l’enfant qu’elle y avait laissé. Il ne semblait plus
éprouver cette honte, il la protégeait et n’avait manifesté aucune gêne quand
on avait évoqué son passé devant les Sharamudoï. Mais ce qui préoccupait Ayla,
c’était la cause d’une telle répulsion.
Enfin, elle l’aimait et voulait vivre avec lui. Il était trop
tard pour changer d’avis, elle espérait seulement ne pas avoir fait d’erreur en
le suivant. Elle invoqua encore une fois un signe favorable de son totem, le
Lion des Cavernes. Mais aucun signe ne vint.
A l’approche de l’étendue d’eau bouillonnante, au confluent de
la Rivière Sœur et de la Grande Rivière Mère, la marne – mélange
naturel d’argile et de calcium – molle et friable des terrasses
supérieures céda la place aux cailloux et au lœss des terres basses.
Pendant la saison chaude, la fonte des glaciers de montagnes
nourrissait les rus et les rivières. A la fin de l’été, les pluies diluviennes,
et les chutes de neige en altitude, dues aux changements de températures,
transformaient les cours d’eau rapides en torrents impétueux. Sur le versant
occidental des montagnes, nul lac ne retenait les eaux dans un réservoir
naturel pour les redistribuer ensuite avec plus de modération, et les flots se
déversaient librement sur les pentes abruptes. En cascades puissantes, l’eau
creusait les grès, les calcaires et les schistes argileux des montagnes,
arrachant du sable et des pierres qu’elle charriait vers le fleuve, et qui se
déposaient en route sur les lits et les plaines d’inondation.
La plaine centrale, ancienne cuvette d’une mer intérieure,
formait un bassin encastré entre deux chaînes de montagnes à l’est et à l’ouest,
et de hauts plateaux au nord et au sud. La Sœur en crue, d’un volume devenu
presque égal à celui de la Mère à mesure qu’elle s’en approchait, recevait l’écoulement
des eaux d’une partie de la plaine et du versant occidental de la chaîne de
montagnes qui s’incurvait en dessinant un grand arc vers le nord-est. La
Rivière Sœur courait le long de la basse dépression du bassin pour apporter son
offrande à la Grande Mère des Rivières, mais ses eaux déferlantes étaient
repoussées par celles de la Mère, déjà au maximum de sa crue. Dans un violent
ressac, elle dissipait son présent dans un vortex de contre-courants et d’inondations
destructrices.
Vers midi, Ayla et Jondalar approchèrent des immenses étendues
marécageuses inondées, semées de broussailles à demi immergées et plantées d’arbres
occasionnels. Ayla trouva de grandes similitudes avec le delta oriental, à une
exception près : les courants et contre-courants des deux grandes rivières
produisaient des
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