Le grand voyage
de Toutes les Créatures.
Jondalar ferma les yeux pour mieux se concentrer.
— O Doni, Grande Terre Mère, commença-t-il. Il y a eu des
moments dans ma vie où j’ai pensé... des choses qui T’ont peut-être déplu. Je
ne voulais pas Te déplaire, mais... on ne réfléchit pas toujours comme il
faudrait. Il fut un temps où je croyais que je ne pourrais jamais aimer une
femme, et je me suis demandé si c’était parce que Tu étais fâchée contre moi à
cause de... de ces choses...
Cet homme a dû connaître de bien pénibles expériences, se dit
Losaduna. Il est pourtant si bon, et il a l’air tellement sûr de lui, on a du
mal à croire que la honte puisse l’accabler à ce point.
— Alors, quand je suis parvenu au bout de Ta rivière, et
que j’ai perdu... mon frère, que j’aimais plus que tout au monde, Tu m’as
envoyé Ayla et j’ai enfin découvert l’amour. Je Te remercie pour Ayla. Si je n’avais
plus ni amis ni parents, je serais heureux tant qu’Ayla resterait auprès de
moi. Mais si Tu avais la bonté, Grande Mère, j’aimerais... je voudrais... je
souhaiterais une dernière chose. J’aimerais Te demander... un... un enfant. Un
enfant né d’Ayla, né dans mon foyer, et si c’est possible, né de mon esprit, ou
de mon essence, comme le croit Ayla. Si c’est impossible, si mon esprit n’est
pas assez... assez puissant, alors qu’Ayla ait tout de même son bébé, et qu’il
naisse dans mon foyer pour qu’il soit mien dans mon cœur.
Jondalar allait reposer la donii, mais il n’avait pas terminé,
il s’arrêta et serra très fort la statuette.
— Encore une chose. Si Ayla devenait enceinte d’un enfant
de mon esprit, j’aimerais être sûr que cet enfant est bien de mon esprit.
Tiens, voilà une demande intéressante, se dit Losaduna. Beaucoup
d’hommes aimeraient savoir, mais j’en connais peu qui s’en préoccupent à ce
point. Pourquoi y attache-t-il tant d’importance ? Et qu’a-t-il voulu dire
en parlant d’enfant de son essence... comme le croit Ayla ? J’aimerais
bien poser cette question à Ayla. Mais c’est un rituel privé et je ne peux pas
dévoiler à Ayla ce qui s’y est dit. J’essaierai de discuter avec elle plus
tard.
Ayla regarda les deux hommes sortir du Foyer de Cérémonie.
On devinait qu’ils avaient accompli ce qu’ils devaient accomplir, mais le plus
petit semblait soucieux et comme accablé, alors que l’autre paraissait
malheureux, mais affichait un air déterminé. Leur attitude étrange accrut sa
curiosité. Qu’avaient-ils donc été faire ?
— J’espère qu’elle changera d’avis, entendit-elle dire
Losaduna comme ils s’approchaient. Je ne vois que les Premiers Rites pour lui
permettre de surmonter son épreuve. Il faudra lui choisir un partenaire avec
beaucoup de soin. J’aimerais que tu restes, Jondalar. Elle semble s’intéresser
à toi. C’est rassurant de voir qu’un homme peut encore l’attirer.
— Je serais heureux de l’aider, mais nous ne pouvons pas
rester. Nous devons partir le plus vite possible. Demain ou le jour d’après.
— Oui, tu as raison. La saison peut changer rapidement.
Sois prudent si tu remarques que l’un de vous s’énerve.
— Ah, tu parles du Malaise ! fit Jondalar.
— Qu’est-ce que le Malaise ? demanda Ayla.
— C’est le fœhn qui l’apporte, le fondeur de neige, le vent
du printemps, expliqua Losaduna. Un vent sec et chaud qui souffle du sud-est,
avec assez de violence pour déraciner les arbres. Il fait fondre la neige à une
telle vitesse que d’énormes congères sont balayées en un jour, et s’il vous
surprend sur le glacier, vous risquez de ne pas pouvoir traverser. En fondant,
la glace peut creuser des crevasses sous vos pieds, gonfler des rivières qui
vous coupent la route, ouvrir soudainement des ravins. Le vent arrive si vite
que les mauvais esprits qui aiment le froid n’ont pas le temps de s’enfuir. Il
les balaie, les entraîne dans son souffle. C’est pour cela que les mauvais
esprits caracolent en tête du fondeur de neige et le précèdent de peu. Ils
apportent le Malaise. Si vous savez à quoi vous attendre, vous les contrôlerez
et ils vous préviendront de l’arrivée du fœhn. Mais les mauvais esprits sont
malins, et on ne peut pas toujours les manipuler à son avantage.
— Mais comment peut-on savoir que les mauvais esprits sont
là ? s’inquiéta Ayla.
— Comme je viens de le dire, surveillez vos humeurs.
Parfois ils
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