Le grand voyage
m’accorde Ses faveurs, mais je sais que Zolena
a bien fait de rejoindre les zelandoni. Cela m’a rendu service, à moi aussi. J’avais
mal agi, mais si elle n’était pas devenue zelandoni, je n’aurais jamais
entrepris ce Voyage avec Thonolan, et je n’aurais jamais rencontré Ayla. Alors,
peut-être me favorise-t-Elle un peu. Mais je ne veux pas profiter des bontés de
Doni. J’ai déjà demandé qu’Elle nous autorise à rentrer sains et saufs, je ne
peux pas Lui demander aussi de donner à Ayla un enfant de mon esprit, surtout
en ce moment. Mais en aura-t-elle jamais ?
6
Ayla et Jondalar s’éloignèrent de la rivière et s’enfoncèrent à
l’intérieur des terres en obliquant vers l’ouest. Ils rencontrèrent une autre
vallée où coulait vers l’est un large cours d’eau qui rejoignait en aval celui
qu’ils venaient de quitter. La vallée, vaste et verdoyante, se creusait en
pente douce jusqu’à la rivière qui courait rapidement au milieu de terres
alluviales jonchées de pierres de toutes tailles, allant du gros rocher au
gravier fin comme du sable. Hormis quelques touffes d’herbe et de rares plantes,
le lit rocailleux était nu, lavé de toute végétation par les crues
printanières.
Quelques arbres morts s’étaient accrochés aux rochers, et des
buissons d’aulnes et d’arbrisseaux aux feuilles grisâtres restaient suspendus
le long des rives. Une harde de cerfs géants aux andouillers palmés si
démesurés qu’ils auraient fait paraître petits ceux des élans, viandaient près
des bosquets de saules cotonneux qui poussaient sur les terres humides, au bord
de l’eau.
D’humeur joyeuse, Loup gambadait près des chevaux, jouant à
éviter leurs sabots, ceux de Rapide en particulier. Whinney n’y prêtait guère
attention, mais le jeune étalon montrait plus de nervosité. Ayla savait que le
cheval aurait répondu aux taquineries de Loup si Jondalar ne l’avait retenu.
Celui-ci devait se concentrer pour contrôler sa monture. Il commençait à être
agacé et il pensait sérieusement demander à Ayla de contenir son louveteau.
Au grand soulagement de Jondalar, Loup détala soudain comme une
flèche. Il avait senti l’odeur des cerfs, et partait en éclaireur. Les longues
pattes des cerfs géants étaient une vision irrésistible et il crut avoir trouvé
de nouveaux compagnons de jeu. Mais lorsque celui qu’il approchait baissa la
tête pour repousser sa charge, Loup s’arrêta net. C’était un mâle magnifique
dont chacun des andouillers mesurait plus de trois mètres ! Conscient de
la présence du carnassier, le bel animal continua cependant à brouter l’herbe
grasse comme s’il n’avait rien à redouter d’un loup isolé. Ayla contemplait la
scène en souriant.
— Regarde-le, Jondalar. Loup s’imaginait avoir trouvé un
autre cheval à narguer.
— Oui, il a vraiment l’air étonné, s’amusa Jondalar. Il ne
s’attendait pas à tomber sur des bois pareils.
D’un accord tacite, ils se dirigèrent lentement vers l’eau en s’efforçant
de ne pas effrayer l’énorme cerf. Ils furent impressionnés par la taille de ces
créatures géantes plus hautes qu’eux-mêmes à cheval. Avec une grâce
majestueuse, les cerfs s’éloignèrent à l’approche des cavaliers, par prudence
plus que par crainte, broutant quelques feuilles de saule dans leur retraite.
— Ils sont encore plus grands que je ne le croyais,
remarqua Ayla. Je n’en avais jamais vu de si près.
Bien qu’à peine plus massifs que les élans, les cerfs géants
avec leur magnifique ramure semblaient énormes. Chaque année, leurs bois
tombaient, remplacés par d’autres plus grands et plus ramifiés, jusqu’à
atteindre trois mètres et davantage en une seule saison chez certains vieux
mâles. Mais même dépourvus de leurs andouillers, les plus grands étaient
immenses comparés aux autres représentants de leur espèce. Leur poil rude,
leurs épaules massives et les muscles de leur cou, qui s’étaient développés
pour supporter les lourdes ramures, contribuaient à leur donner un aspect
impressionnant. Animaux des plaines, encombrés par leurs andouillers démesurés,
ils évitaient les sous-bois. On racontait que certains étaient morts de faim,
piégés par leurs glorieux cors emmêlés dans des branches.
Ayla et Jondalar s’arrêtèrent pour chercher un gué. L’eau était
profonde, le courant violent, et des rapides s’étaient formés autour de gros
rocs
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