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Le guérisseur et la mort

Le guérisseur et la mort

Titel: Le guérisseur et la mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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tourna vers le garçon.
    — Ta mère était originaire de Majorque. De la ville ou de la campagne ?
    — De la ville, je crois. Mon père racontait qu’il l’avait trouvée près du port et qu’il l’avait ramenée chez lui comme un trophée après une bataille, mais sûrement qu’il plaisantait.
    — Votre Excellence, il me semble que cet enfant se fatigue, dit Isaac.
    — Je n’en doute pas, dit l’évêque. Mais j’ai encore une chose à te demander, Tomás. Deux hommes vont se parler dans le couloir. Veux-tu aller jusqu’à la porte, que quelqu’un t’ouvrira, et les écouter ? Tu me diras si tu reconnais à sa voix celui qui t’a frappé.
    — Il ne me verra pas ?
    — Non, il ignorera ta présence.
    Le scribe quitta sa place et alla entrouvrir la porte. Tomás descendit de sa chaise et traversa la pièce, pâle, fatigué. Il écouta.
    Un instant plus tard, il se retourna, l’air malheureux.
    — Il me semble que le deuxième homme parlait un peu comme celui du pont, mais je n’en suis pas très sûr.
    À nouveau ses yeux s’emplirent de larmes.
    — Ce sera tout, dit Berenguer. Maîtresse Regina va s’occuper de toi. Tu as fait du bon travail, Tomás, et je t’en remercie. Mais tu vas devoir rester encore quelque temps au palais, je le crains. Nous ne voudrions pas qu’il t’arrive quelque chose.
    Bernat ouvrit la porte, prononça quelques paroles et fit entrer Regina.
    Lorsqu’elle vit le visage blême de l’enfant, elle le prit dans ses bras comme un bébé.
    — Je vais le porter ! lança-t-elle d’un ton accusateur. Vous l’avez épuisé.
    — Permettez-moi de m’en charger, maîtresse, dit le scribe.
    Tous trois quittèrent la pièce.
    — Je ne suis pas certain que cet épuisement nous ait apporté grand-chose, dit Berenguer. Pensez-vous qu’il a reconnu la voix de Lucà comme étant celle de son agresseur ?
    — C’est difficile à dire, déclara Bernat avec prudence. Il n’avait pas l’air sûr de lui. Je l’aurais cru plus précis parce que cet enfant a l’ouïe fine comme celle d’un musicien. Je me demande s’il chante…
    — Pour vous, Bernat, cela n’a rien d’une identification ?
    — C’est très imprécis, mais on peut l’utiliser…
    — Au fait, comment avez-vous justifié sa présence au palais ?
    — Cela ne fut pas compliqué, Votre Excellence, hésita Bernat. Il a suffi de laisser entendre que c’était le neveu de Votre Excellence, qu’il était souffrant et qu’il séjournerait ici pour y être soigné par maître Isaac.
    — Un enfant des rues ? L’enfant, sans aucun doute, d’une fille à marins, abandonné par sa mère ? Mon neveu ?
    — Il ne parle pas comme ces gens-là, Votre Excellence. Comme je vous l’ai dit, il a un don pour saisir les voix. Encore quelques jours et on croira à son langage qu’il a été élevé au sein de la noblesse. De plus, on le traite pour l’heure comme un vicomte, et c’est ce qui a convaincu tout le monde. Je ne pense pas qu’une personne mal intentionnée viendra le chercher dans l’une des chambres d’amis de Votre Excellence.
    — Laquelle ?
    Bernat le lui dit.
    — Non, je ne le pense pas non plus. Des princesses royales y ont dormi. C’est votre idée, Bernat, n’est-ce pas ? Vous l’avez installé dans cette chambre et vous avez laissé la rumeur se répandre qu’il était mon neveu ?
    — Peut-être mes paroles ont-elles été mal interprétées, répliqua Bernat avec diplomatie. Et peut-être n’ai-je pas pris assez de soin pour que la rumeur…
    — Peu importe, il sera en sécurité. Par bonheur, il ne me ressemble pas vraiment, ajouta joyeusement Berenguer. Sinon, chacun viendrait déposer de petits cadeaux devant sa porte pour s’attirer les faveurs du diocèse.
    L’évêque revint près de la fenêtre et contempla le parvis.
    — À présent, voyons ce Lucà. Qu’on le fasse entrer.
     
    — Parlez-nous de Raimon, dit Berenguer qui n’avait pas quitté la fenêtre.
    — Raimon, Votre Excellence ? J’ai peur de ne pas comprendre. Je connais quelques personnes portant ce nom, mais j’ignore de laquelle Votre Excellence veut parler.
    — Raimon de Majorque, celui qui a un visage d’ange et des cheveux clairs et concocte des poisons mortels.
    — Raimon, Votre Excellence ? répéta-t-il le front plissé. Un fabricant de poisons ? J’ai entendu parler d’hommes originaires de ma ville à qui la rumeur publique attribue la capacité de

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