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Le guérisseur et la mort

Le guérisseur et la mort

Titel: Le guérisseur et la mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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convertis de longue date, puis il s’en alla après avoir bu du vin et partagé le petit souper donné en l’honneur du fils nouveau-né du médecin.
    « Tout ceci, je le jure, etc., Mordecai ben Aaron, juif du diocèse ».
    Une nouvelle fois, le clerc tendit le document aux juges. Celui assis à la gauche de l’évêque se pencha en avant.
    — Maître Mordecai est-il présent dans ce prétoire ?
    — Oui, Votre Seigneurie, dit Mordecai en se levant.
    — Ce jeune homme, l’accusé, a-t-il cherché à tirer de vous un quelconque avantage en arguant de votre prétendue parenté ?
    — Nullement, Votre Seigneurie. Je lui ai parlé à plusieurs reprises après cette soirée, mais uniquement parce que je l’avais fait venir chez moi.
    — Pourquoi donc ?
    — Il me fallait absolument découvrir s’il était le fils unique de Faneta parce que, dans ce cas-là, il était aussi le juste bénéficiaire d’une grosse somme d’argent et de propriétés que je détenais par fidéicommis. L’époque fixée par la disposante venait à terme et il était de mon devoir de m’exécuter.
    — L’accusé vous a-t-il présenté d’autres arguments destinés à vous convaincre qu’il était l’héritier de cette fortune ?
    — J’ai très vite découvert qu’il en ignorait jusqu’à l’existence, Votre Seigneurie. Quand je l’interrogeai sur son passé, Lucà m’expliqua que ses parents étaient morts et que des tierces personnes l’avaient convaincu de venir à Gérone. Il ajouta qu’il ne se croyait pas vraiment de ma parentèle et qu’il n’attendait rien de moi. Il désirait par-dessus tout rencontrer le médecin, dont la réputation lui était parvenue aux oreilles.
    — Voilà qui est étrange, murmura le troisième juge. Avez-vous cherché à vérifier ses déclarations ?
    — Effectivement. J’ai prié Daniel ben Mossé, qui se rendait pour affaires à Majorque, de voir ce qu’il pourrait découvrir.
    — Cela vous a-t-il éclairé ?
    — Je ne pourrais le dire, Votre Seigneurie, car, que je sache, Daniel n’est pas revenu.
    Le juge se tourna vers Berenguer. Les trois hommes discutèrent à voix basse un instant.
    — Y a-t-il d’autres témoignages relatifs à ce crime ? demanda le premier juge.
    Le clerc s’approcha de lui et lui chuchota quelques mots.
    — Bien entendu. Entendons-le.
    — Voici la déclaration sous serment d’Anna, gouvernante de maître Narcís Bellfont, dûment enregistrée en présence de témoins le treizième jour du mois d’avril, dit le clerc, et par laquelle elle explique que « la nuit du neuvième jour du mois d’avril, quelqu’un frappa à la porte après que je l’eus verrouillée. Quand je l’ouvris, un messager me dit qu’il apportait un nouveau médicament destiné à maître Narcís et envoyé par maître Lucà, l’herboriste. Quand je voulus lui donner une pièce, il me répondit qu’on l’avait déjà payé et s’en alla. Il était de bonne taille, comme un homme de stature moyenne, et il marchait assez vite, comme quelqu’un de jeune. Je ne pus voir son visage parce qu’il faisait sombre et qu’il portait une pèlerine à capuche. Je ne peux donc dire de qui il s’agissait.
    « Tout ceci, je le jure, etc., Anna, gouvernante à Gérone ».
    — Maîtresse Anna est-elle présente ? demanda Berenguer.
    — Oui, Votre Excellence, répondit-elle du fond du prétoire.
    — Pouvez-vous me dire dans quoi il portait ce paquet ?
    — Dans l’un de ces paniers, Votre Excellence. Ceux longs et étroits que l’on accroche sur le dos à l’aide d’une courroie. Il a dû l’abaisser pour prendre le médicament.
    — Merci. Et qu’avez-vous remarqué dans sa façon de parler ?
    — On aurait dit qu’il venait d’ailleurs – une autre région, en quelque sorte. Vers la côte, peut-être bien, ou quelque chose comme ça.
    — Parfait. À présent avons-nous une déposition de la part du serviteur de maître Mordecai, celui qui ouvrit la porte ?
    — Elle n’est pas très détaillée, déplora le clerc.
    — Nous l’entendrons tout de même, dit le premier juge en se tournant vers l’évêque, lequel hocha la tête.
    Le témoignage ne fut pas très différent de celui d’Anna, dans un premier temps. Le portier avait expliqué qu’il était tard, que la maison était fermée pour la nuit, que la nuit était d’un noir d’encre et qu’il pleuvait abondamment. « J’ai voulu le payer, mais il m’a dit que

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