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Le guérisseur et la mort

Le guérisseur et la mort

Titel: Le guérisseur et la mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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arrachée à la mort.
    — Je me demande s’il pourrait faire ça avec ma femme, dit un commerçant. C’est la créature la plus silencieuse et la plus pitoyable qui soit sur cette terre. Ça serait bien de la voir vivre un peu.
    — Alors arrête de lui crier dessus et de la battre chaque fois que tu es de mauvaise humeur, lui répondit son voisin. C’est plus efficace que les plantes de maître Lucà et puis ça revient moins cher.
    — Je ne lui crie pas dessus, protesta l’homme, et puis je ne la bats presque jamais.
    — Elle se sent bien dès que tu es loin d’elle, ajouta la femme du voisin. C’est seulement quand tu rentres au foyer qu’elle a trop peur pour ouvrir la bouche. La résurrection de Regina, je crois que ça tient plutôt au fait qu’elle a un charmant jeune homme à la maison, c’est mieux que toutes les potions qu’il pourra lui préparer. La pauvre fille se sentait si seule ! Romeu ferait bien de l’avoir à l’œil.
    Mais en ville, tout le monde était persuadé que le jeune herboriste pouvait faire des miracles, et il eut bientôt plus de patients qu’il ne pouvait en soigner.
     
    Lundi de Pâques, 6 avril
     
    Le Call était fermé depuis cinq jours. Même si la vie continuait à l’intérieur de son enceinte, Raquel trouvait que ces journées ressemblaient à un interminable sabbat, le calme et la sérénité en moins. Elle s’activait depuis des heures, avec son père dans une visite à deux patients, auprès de sa mère par une aide dont elle ne paraissait pas avoir besoin, se demandant si elle ne devrait pas mettre son châle et aller voir Daniel – ou plutôt sa tante Dolsa, qui s’assurerait de la présence du jeune homme. Sans un mot à quiconque, puisque personne n’avait l’air de s’intéresser à elle, Raquel se faufila jusqu’à la maison du gantier. Maîtresse Dolsa l’accueillit avec la chaleur et l’affection qui lui étaient coutumières, s’excusa, puis revint un instant plus tard avec Daniel. Elle les laissa alors profiter l’un de l’autre, selon sa propre expression, et sortit voir pourquoi les rafraîchissements n’étaient pas encore servis.
    — Daniel, dit-elle, je me sens si misérable sans vous.
    Il la prit dans ses bras et la serra contre lui.
    — Dans ce cas, ma mie, pourquoi ne nous marions-nous pas ?
    — Je vous l’ai dit, Daniel. Je ne sais plus quoi faire. Quand j’en parle à maman, elle me répond de cesser de l’ennuyer avec ça en ajoutant qu’on en reparlera quand le petit Beniamin sera un peu plus âgé. Quand je demande à papa s’il connaît la raison de ce retard, il se contente de sourire et de dire que nous serons unis bientôt, très bientôt. Quand on est grand, bientôt signifie de plus en plus tard, oui.
    — Ils ne peuvent nous faire attendre plus tard que la Pâque. Je parlerai à mon oncle pour qu’il tente d’infléchir vos parents. Chacun s’accorde à dire que rien ne nous sépare.
    Pendant les minutes qui suivirent, tous deux étaient trop occupés pour entendre des voix et des pas résonner dans la demeure d’Éphraïm. C’est seulement quand Raquel perçut le bruit familier du bâton de son père qu’elle repoussa Daniel.
    — Raquel ? dit Isaac. Est-ce bien toi ? Tu es là ?
    — Oh, papa, tu me suis maintenant ? s’écria-t-elle sur le ton de la plaisanterie, avec une pointe d’exaspération néanmoins.
    — Nullement. Je ne savais pas que tu étais allée chez maîtresse Dolsa. Je suis venu voir Daniel et l’on m’a dit qu’il était dans la cour.
    — Y a-t-il quelque chose que je puisse faire pour vous, maître Isaac ? dit Daniel dont la courtoisie lui faisait oublier, une fois encore, que de telles paroles pouvaient annoncer d’étranges événements.
    — Oui, Daniel. J’aimerais que vous me rendiez un grand service en allant à Majorque. Cela ne vous prendra pas beaucoup de temps, à moins que les vents ne soient contraires, évidemment.
    — À Majorque ? protesta Raquel. Papa, que dis-tu là ?
    — Combien de temps ? demanda Daniel, méfiant.
    — Trois ou quatre jours pour aller et autant pour revenir, si les vents sont relativement favorables et qu’il n’y a pas d’incident. Vous passeriez trois jours sur place. Il y a aussi le temps nécessaire pour rejoindre Barcelone…
    — Et si les vents sont contraires ?
    — Il faudra alors attendre une bonne semaine qu’ils mollissent. Si vous partiez demain – je puis vous assurer qu’un

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