Le Huitième Péché
lorsqu’elle finit par retrouver sa voiture dans une rue adjacente. Elle tenait à la main un bouquet de lys blancs et le bout de papier où figurait l’adresse de la signora Fellini, que Malberg avait jeté par terre sans même y prêter attention.
L’ancienne concierge était sans doute la seule personne en mesure de lui fournir des informations sur les liens mystérieux existant entre la mort de Marlène et ces messieurs du Vatican. Elle ne savait pas exactement si son frère Paolo connaissait tous les détails de l’affaire. Ce qui était sûr, c’est qu’il en savait plus qu’elle et qu’il en savait plus que Malberg.
Caterina était persuadée qu’il ne pourrait pas y avoir d’avenir commun entre elle et Lukas tant que l’affaire Marlène Ammer ne serait pas élucidée. Si cela ne se faisait pas, Marlène resterait toujours entre eux.
Dans sa profession, Caterina avait appris à faire parler les gens. Elle avait donc mis au point sa stratégie avant de se lancer dans cette entreprise.
La signora Fellini ne la connaissait pas, mais, de son côté, elle connaissait la signora , ce qui présentait un avantage non négligeable.
Caterina avait l’intention de confronter cette femme, qui se sentait à l’abri dans sa nouvelle vie, avec toutes ces choses qu’elle avait apprises sur elle. Il allait de soi qu’elle tairait ses sources ainsi que son lien de parenté avec Paolo. Elle espérait déstabiliser la signora . Les personnes qui se retrouvent dans une telle situation sont plus enclines à livrer des informations que celles qui s’imaginent être en sûreté.
Caterina prit donc la direction du nord, longea le Tibre, vers le Lungotevere Marzio, une des adresses les plus chics de la capitale. Tout le monde savait que certains de ces immeubles cossus appartenaient au Vatican. La signora Fellini s’était installée là depuis son départ précipité de la loge de concierge qu’elle occupait dans la Via Gora.
Elle n’a pas perdu au change, pensa Caterina tout en observant l’imposant immeuble qui se trouvait de l’autre côté de la rue. La vue sur le fleuve et sur l’autre rive, où se dressait le château Saint-Ange, devait être époustouflante.
On accédait par trois marches au grand porche d’entrée, surveillé par une caméra située sur la gauche, derrière une vitre teintée.
À l’aplomb, en dessous de la caméra, il y avait cinq boutons de sonnette portant seulement des chiffres romains de I à V. Les résidants ne tenaient manifestement pas à ce que leurs noms y figurent.
Caterina aurait pu sonner, puisqu’elle savait pertinemment que c’était bien l’adresse de madame Fellini : Lungotevere Marzio 3-II. Au mieux, elle aurait alors entendu l’interphone crachoter un Pronto ! bourru ; et dès qu’elle aurait expliqué la raison de sa visite, la conversation aurait aussitôt tourné court. Caterina préféra donc attendre qu’un des habitants de l’immeuble entre ou sorte.
Elle n’eut pas à patienter très longtemps : un taxi s’arrêta et déposa un monsieur distingué d’un certain âge devant la porte.
— Vous voulez entrer ? demanda-t-il poliment en voyant que la jeune femme attendait.
— Je viens voir la signora Fellini, répondit Caterina sans détour.
— Il n’y a pas de signora Fellini dans l’immeuble. Vous devez vous tromper de numéro, vous êtes ici au 3 !
— Oui, le 3, je sais. Je ne me suis pas trompée. La signora vient d’emménager.
— Comment s’appelle-t-elle, disiez-vous ?
— Fellini. Au deuxième étage.
L’homme observa plus attentivement Caterina. Il semblait méfiant. Mais lorsque la jeune femme lui décocha un sourire éclatant, il mit la clé dans la serrure.
— Vous avez déjà sonné ?
— Non, je voudrais lui faire une surprise, dit Caterina en agitant le bouquet de fleurs qu’elle tenait à la main.
— Alors, suivez-moi, dit l’homme en ouvrant la porte. Je vous accompagne, j’habite au quatrième.
L’ascenseur au milieu de la cage d’escalier en marbre était à l’image du reste de cet immeuble aux prestations haut de gamme. Les portes en acajou et en verre taillé s’ouvrirent presque sans bruit.
— Après vous, dit l’homme en laissant entrer Caterina la première.
Puis il appuya sur les boutons marqués II et IV et, après un coup d’œil au bouquet de fleurs, demanda :
— Avez-vous quelque chose à fêter ?
— Non, rien de particulier, répondit Caterina en secouant
Weitere Kostenlose Bücher