Le Huitième Péché
L’entrée se trouvait exactement au centre du demi-cercle. Deux autres portes s’ouvraient chacune à l’extrémité de l’abside sur une enfilade d’autres pièces.
Cela sentait la poussière et une odeur indescriptible de vieux livres. Malberg jeta un bref regard dans la première pièce, ce qui lui suffit pour constater que la plupart des volumes étaient bien plus anciens que la forteresse dans son état actuel. Ces murs abritaient de très précieux ouvrages.
— Voilà donc votre bureau, remarqua Anicet, qui pivota sur lui-même en élevant les bras.
La pièce était meublée en tout et pour tout d’une table longue et étroite, telle qu’on en trouve dans les réfectoires des couvents du Moyen Âge, et d’un fauteuil aux accoudoirs sculptés.
Des néons palliaient l’insuffisance de la lumière qui pénétrait par une petite fenêtre. Cet éclairage éblouissant ne s’accordait pas vraiment au style de la pièce, mais avait le mérite d’être efficace.
— Et où se trouve le livre de Mendel ? demanda Malberg qui s’impatientait.
Anicet fronça les sourcils et disparut par la porte de droite. Il revint en tenant serré dans ses mains, comme s’il portait un trésor, le livre d’aspect plutôt anodin.
Il le déposa avec précaution sur la table.
Malberg s’assit et l’ouvrit à la première page, sur laquelle figurait le titre. En tant que spécialiste des livres anciens, il abordait chaque livre qu’il examinait avec respect et enthousiasme. Mais ce livre était tout à fait particulier. Avant de venir, il avait pris le temps de consulter des ouvrages récents de cryptologie.
Gregorius Mendel
Peccatum octavum
Ces quelques mots en latin qui figuraient sur la page de garde étaient les seuls du livre qui soient compréhensibles. La page suivante, sans doute le prologue, était rédigée dans un sabir inintelligible.
— Permettez-moi de vous poser une question, dit Malberg en se tournant vers Anicet. Qu’attendez-vous du décryptage de ce mystérieux ouvrage ?
Anicet tripotait nerveusement les boutons de sa redingote. Malberg le remarqua, non sans une certaine satisfaction. Même s’il ne l’avait pas cherché, il avait de toute évidence réussi à déstabiliser cet homme si sûr de lui et si arrogant.
— Vous le comprendrez en temps utile, finit par répondre Anicet, avant d’ajouter, presque avec humilité : Je vous demande de faire preuve de compréhension. Si vous parvenez à décrypter le texte de Mendel, vous saurez de toute manière de quoi il retourne. Si vous deviez échouer, cela n’aurait de conséquences fâcheuses ni pour vous ni pour la confrérie. Quand comptez-vous commencer votre travail ?
— Dès demain matin.
— Alors, bonne chance !
Et il disparut avant même que Malberg ait pu lui demander comment regagner sa chambre. Il avait encore en mémoire les trois derniers couloirs et les deux escaliers. Puis il s’égara, incapable tout à coup de se souvenir s’il était passé par tel endroit ou par un autre. Lorsqu’il se retrouva une fois de plus à son point de départ, il décida de prendre la direction opposée et de tourner, à la prochaine intersection, non pas à droite, mais à gauche.
Un homme très grand qu’il croisa se contenta de le saluer d’un signe de tête, sans le regarder.
Il semblait plongé dans ses pensées. Malberg n’osa pas lui adresser la parole.
Lukas réussit finalement, sans trop savoir comment, à retrouver sa chambre avec la salamandre. Lorsqu’il ouvrit la porte, il sursauta : Gruna était confortablement installé dans le canapé.
— J’ai oublié de mentionner, dit-il avec la plus grande assurance, que vous devez commander vos repas dans votre chambre. Il est mal vu ici de parler à table. Composez tout simplement le 9, vous aurez le chef de la cuisine qui vous dira ce qu’il peut vous proposer.
— Merci, mais je n’ai pas faim, répondit Malberg.
Ce n’était qu’à moitié vrai, mais il tombait de fatigue et n’avait envie que d’une seule chose : qu’on le laisse tranquille.
— Par ailleurs… poursuivit Gruna en se dirigeant vers le lavabo pour faire couler de l’eau comme si c’était la chose la plus naturelle qui soit.
— Oui ?
— Le château de Layenfels est le siège de la confrérie des Fideles Fidei Flagrantes …
— Je sais !
— Mais je suppose que vous ne savez que peu de chose sur les objectifs poursuivis par la confrérie. Tout ce qu’on a pu lire
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