Le jour des reines
lui trouvé ».
Il est permis de « tiquer »
En effet, « la comté » avait été déjà donnée au Montagu captif en France. Cette précision de Froissart le concerne donc. Mais qui était le gentil escuier preux et hardi qui commandait provisoirement la garnison du château en 1342 et se nommait, lui aussi, Guillaume de Montaigu ?
Jean-Alexandre C. Buchon, commentateur des Chroniques de Froissart (3 épais volumes publiés en 1852 au Panthéon littéraire), n’a pas manqué de sourciller en lisant ces lignes. Il écrit dans sa note en bas de page :
« Il paraît que Froissart se trompe sur cette parenté, puisque le neveu du comte de Salisbury portait comme lui le nom de Montaigu. Il était probablement le fils du frère et non de la sœur du comte. D’ailleurs, cette phrase est louche. Il faut la construire à peu près ainsi : “Si en étoit gardien et souverain, après son oncle, un gentil chevalier preux et hardi qui avoit nom messire Guillaume de Montagu, et étoit fils de la sœur du comte de Salisbury qui ainsi eut nom, car quand le roi le maria, il lui donna la comté de Salisbury, etc.” »
Admettons que le jeune écuyer preux et hardi ait été le neveu du comte et de la comtesse de Salisbury. Ce jouvenceau épris de la belle Catherine allait devenir, adulte, l’amant fort envié de Jeanne de Kent.
Si l’on s’en tient aux annotations de J.-A. C. Buchon et à celles – à peu près semblables – de MM. Jules Viard et Eugène Deprez, commentateurs de Jean le Bel au siècle dernier, l’on peut ainsi penser :
« Ce jeune écuyer, donc, était le fils du frère du captif du Châtelet. Son père avait pour nom William de Montagu. Il lui succéda lorsqu’il mourut aux joutes de Windsor, en janvier 1344, donc un an après l’autre, mort à Algésiras. Il était alors dans sa seizième année. Il avait donc 14 ans quand le château de Wark fut attaqué. »
C’est faire fausse route. Mais il est bon de maintenir le « suspense ».
Après avoir passé la nuit aux abords de Wark , les Écossais s’en allèrent, chargés, alentis par leur butin. Revenons à Froissart et à Jean le Bel dont les textes sont semblables.
« Quand le bachelier messire Guillaume de Montagu, vit du châtel qu’ils étoient tous passés et qu’ils n’arrêtoient pas au châtel, il issit hors du châtel tout armé, atout quarante compagnons d’armes, et suivit couvertement le dernier train, où avoient chevaux si chargés d’avoir qu’à grand mésaise pouvoient-ils aller avant ; si les aconsuit à l’entrée d’un bois ; et leur coururent sus, et en tuèrent et blessèrent, lui et ses compagnons plus de deux cents et prirent bien vingt-six chevaux chargés de joyaux et d’avoir et les amenèrent par-devers le châtel. »
Bel exploit, pour un jouvenceau, mais n’est-il pas grossi ?
Toujours est-il que les cris des survivants alertèrent l’arrière-garde écossaise. Guillaume de Douglas revint vers Wark et mit le siège au château. Pour complaire à la comtesse, le jeune Montagu sauta sur la fleur d’un coursier et galopa vers Berwich. Pour y trouver qui ? Édouard III dont il savait qu’il y guerroyait.
Si l’on accepte pour vraie la thèse du neveu gentil, preux et hardi, on peut se demander quels rapports existaient entre Catherine (puisque c’est ainsi que la nomment la plupart des chroniqueurs anglais de son temps) et ce damoiseau et, subséquemment, s’il était au château quand, plus tard, Édouard III viola la comtesse.
Mais reprenons le fil de l’histoire.
Le roi d’Angleterre quitta Berwich et accourut avec son armée. Lorsqu’il parvint à Wark, les Écossais n’y étaient plus. Il voulut absolument complimenter l’héroïne d’un siège bref mais meurtrier. Douze chevaliers se joignirent à lui, qu’il sut opportunément distancer. Catherine, fort coquette et imprudente, le reçut « si richement vêtue et atournée que chacun s’en émerveilloit ».
Le jeune Montagu devait être présent et voir de quels regards avides le roi couvait cette Catherine pour l’amour de laquelle, selon Froissart, il avait par deux fois risqué sa vie.
Édouard III fit à la dame une déclaration enflammée. Elle lui répondit en termes sirupeux qu’elle ne voulait point se compromettre ni préjudicier l’honneur de son mari (qui pourtant, au Vœu du Héron, n’avait pas eu souci du sien). Furieux de cette résistance imprévue, le roi repartit pour
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