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Le jour des reines

Le jour des reines

Titel: Le jour des reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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pas dans mes façons de faire.
    — La noblesse du chevalier aux lions !
    Shirton souriait sans malice. Puis, relevant son dos pour en dissiper la fatigue :
    — Nous n’avons pas à nous plaindre. Personne ne nous a rien demandé jusqu’ici ; pas même ces quatre seigneurs et leurs hommes qui chevauchaient vers l’île de Wight pour embarquer… Tu les as salués respectueusement, mais tes façons de vilain ne les ont pas empêchés de voir en toi un noble homme.
    — Je ne sais pas feindre.
    Ogier s’attendait à une repartie aigrelette. Shirton réintégra son rêve :
    — Vois-tu, j’ai d’autant plus d’amitié pour Lisbeth que je la sais mal heureuse. Il vaut mieux partir de l’amitié pour parvenir à l’amour que de partir de l’amour pour arriver à…
    — … la détestation, acheva Ogier, placide.
    — Ton cœur, l’ami, me paraît aussi malade que l’ont été tes chairs. Mets de biais ton chaperon sur ton oreille abîmée. Si les Winslow ont dans l’idée de te reprendre, ils ont dû dresser ton portrait, éparpiller cinq ou six chevaucheurs… Mais à quoi penses-tu ? Je te vois sourciller.
    — C’est à toi que je pense. À ta quiétude dans cette forêt où l’on ne serait guère ébaubi de rencontrer Merlin, Morgane ou Mélusine. Tu vas exposer ta vie, ta liberté pour une femme et pour moi. Pour la femme, je le conçois : tu l’aimes et la veux épouser… Mais moi qui déjà te dois tant ?… Une fois libre, Élisabeth consentira-t-elle à nous suivre à Bunbury ?
    Shirton lâcha les rênes et d’une main parut repousser ces questions.
    — Laisse faire les événements, Ogier. Si la Providence t’a poussé en Angleterre, c’est sans doute avec juste raison. Si elle m’a fait te rencontrer, c’est sûrement à bon escient… Regarde : les arbres sont moins serrés, la lumière plus drue : l’orée n’est pas bien loin… et le danger s’approche.
    Shirton baissa son front pensif et rit un peu lourdement afin d’exorciser son inquiétude.
    — Quels sont tes desseins, Jack ? J’aperçois un clocher, un donjon. Est-ce Brackley ? Il est temps de nous accorder sur la façon d’enlever ta dame !
    — C’est tout simple. L’hôtellerie ne jouxte aucune maison. On peut la contourner aisément. Juste à l’opposé de l’entrée, après qu’on a traversé la grand-salle et la cuisine, il y a une porte qui ouvre sur une cour. C’est là que, chaque dimanche, les hommes se mesurent à l’arc. J’y suis venu maintes fois, j’ai remporté les prix. Voilà d’ailleurs pourquoi mon escarcelle est pleine. Si je n’y suis pas reparu depuis six mois, c’est que j’ai flairé des courroux et des haines : les vaincus et Ferris quand je m’entretenais avec ma mie.
    Ogier discerna, dans cette précision, une âpreté de mauvais augure. Se pouvait-il vraiment qu’Élisabeth comptât sur l’aide d’un amoureux si distant ?
    — Cette cour, reprit Shirton, est ceinte d’un muret ouvert en un seul endroit. On y accède aux champs pentus au bas desquels des boqueteaux font comme une avant-garde à une petite forêt. J’en connais les détours et les lieux secrets.
    — Tant mieux !… Continue.
    — Je n’avais jusqu’ici ni chevaux ni compère. Si nous avions fui à pied, Lisbeth et moi, on nous aurait rejoints avant que nous nous soyons mis à couvert… Alors, voilà : j’irai m’attabler seul – oui, je te sacrifie – ; quand Élisabeth me servira, je lui dirai d’aller dans la cuisine et d’en pousser l’huis. Le sommier sera là, débarrassé de ses fardeaux et sous ta garantie. Lisbeth sautera dessus. Toi, tu la suivras sur le moreau, et le tour sera joué. Je vous rattraperai, sois-en sûr.
    Ogier se permit de conclure sans user de précautions dilatoires :
    — Trop simple.
    —  What ?
    —  Trop simple. Ton Ferris doit avoir des chevaux et des aides. Ils sauteront en selle et nous pourchasseront… Cette auberge est-elle fréquentée ?
    — Évidemment. Surtout par les gens d’armes de Simon de Brackley. Il les rejoint parfois pour licher avec eux.
    — S’ils sont présents, ils se lanceront à notre ressuite.
    Shirton se décoiffa et, de son galeron, frotta son visage en sueur.
    — Tu me mets dans l’embarras !
    — Mieux vaut que ce soit maintenant. Autre chose : il est malsain qu’on te connaisse. On se défiera de toi.
    Shirton arrêta son cheval. Ogier sentit Tom quitter son épaule.
    — Élisabeth

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