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Le lever du soleil

Le lever du soleil

Titel: Le lever du soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Dufreigne
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tarlatane bleu pastel. Il a fait doux, un peu de brise, les buissons de fleurs attiraient les abeilles. Vivonne et lui ont fait courir en manège les chevaux de la Reine, Brienne, intrépide à
    son habitude, a failli se casser un bras.
    Mais la Reine était en noir encore ; elle le fait souvent depuis le départ du Cardinal, et cette femme en noir émeut son fils le Roi. Il revoit autre chose, un fantôme certainement, dans les allées de Fontainebleau ou bien de Saint-Germain... ces ch‚teaux aimés dont on l'a privé pour l'enfermer dans Paris dont il ne peut s'éloigner.
    Une femme en noir, une princesse de conte de fée avec deux rangs de pierres sang au cou.
    Sa mère la Reine qu'il aime d'un immense amour tout à coup en cette nuit débutante qui est la veille d'un autre jour fabuleux, sa mère porte, elle, deux rangs de diamants et un rang de pierres de jais.
    " Ma mère ", dit l'enfant en ce dernier jour o˘ il est un enfant.
    En ces dernières heures d'enfance. " Ma mère je vous remercie pour tout. "
    IL fit une prière pour elle. Il fit une prière pour lui.
    Il avait éloigné La Porte. Il se voulait seul en cette nuit. Il se souvenait de ces contes lus par le bon valet de chambre, des contes de chevalerie. Le jeune écuyer y passait la nuit en prière avant que le matin l'adoube en une chapelle et qu'il se relève chevalier.
    Et puis il sentit une larme perler.
    Mme de Sénecey avait été p‚le la journée durant, et avant le coucher avait fait la révérence. Avait baisé le Roi au front dans son lit.
    - Sire, demain je ne serai plus votre gouvernante. La loi du royaume, la loi de Dieu le veulent ainsi. M. de Villeroy demeure votre gouverneur jusqu'à demain après la cérémonie. Moi je vous quitte ce soir. Vous n'avez plus besoin de moi.
    - Si, Madame.
    - Non, Sire. Je retourne auprès de la Reine votre mère. Elle a besoin de toutes et tous ses amis.
    - Restez, Madame, comme mon amie.
    - Sire, mon dévouement vous est acquis. Pour toujours. A vous et à Sa Majesté la Reine. Mais ma tendresse reste à l'enfant que vous f˚tes. Et que demain vous ne serez plus.
    - Change-t-on tant en une nuit ?
    - Votre ‚me non, et je l'espère, mais votre corps a déjà
    changé. Votre état dans le monde sera demain ce que nul autre ne sera jamais. Je vous souhaite, Sire, la meilleure de vos nuits, la plus belle de votre enfance, puisqu'il s'agit de la dernière.
    - Vous voyez, je suis encore enfant, Madame ma gouvernante.
    La marquise eut son merveilleux sourire triste qui fendit même le cúur de son féroce cousin La Rochefoucauld.
    - Oui, Sire, jusqu'à la minuit, selon le calendrier.
    - Alors, Madame ma gouvernante, restez près de moi jusqu'au douzième coup du carillon de Saint-Germain-l'Auxerrois.
    Comme il arrive dans les contes que vous m'avez lus, l'instant o˘
    la princesse retrouve ses haillons ou, à l'inverse, o˘ le crapaud redevient prince.
    - Ou l'enfant roi devient roi. Je resterai.
    - Merci, Madame. Merci pour vos soins, vos gronderies, vos rires, votre tendresse à laquelle j'ai répondu bien maladroitement.
    Je fus pataud, Brienne le disait, Vivonne s'en moquait. Mais je les aime quand même eux aussi. On m'a dit autrefois de ne jamais avoir d'attachement. Maman me l'a dit ; j'ai donc désobéi à ma mère que je vénère. Je lui ai désobéi pour vous. Ma tendresse est allée vers vous toujours et trop souvent en secret. Elle n'est pas celle que j'ai pour dame Perrette, ma nourrice. Elle fut pour vous toute d'admiration. Des princesses de contes et de la réalité, aucune ne vous a égalée dans mon esprit.
    L'enfant muet parlait longuement. Puis se tut. Il regardait la fenêtre. Mme de Sénecey changea de sujet.
    - Fin d'un beau jour, Sire. Le ciel est en accord avec votre vie. Il ne se fit jamais aussi doux qu'aujourd'hui. Vos mots non plus. Ils me touchent profondément au cúur.
    - Ce cúur, Madame, fait de vous, pour moi, la plus belle femme du royaume.
    - Oh, Sire, qu'en penserait Marie de Hautefort ?
    - Marie, Madame, était jolie. C'est tout !
    Il est bien devenu roi !
    Une cloche, puis deux.
    - Il est l'heure, Sire.
    - C'est Saint-Eustache ! La Porte dit toujours que son horloge avance de deux minutes. La Porte ne ment jamais ! du moins à
    moi. Attendons Saint-Germain ; votre main !
    Mme de Sénecey la tendit, effleura le front, la bouche de son souverain, ce que nulle autre ne s'était jamais permis. Louis retint cette main sur sa joue. Il murmura :
    - Encore une minute,

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