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Le lever du soleil

Le lever du soleil

Titel: Le lever du soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Dufreigne
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Cardinal, contre le Roi, mais ils sont déjà seuls. Elle l'a toujours été
    depuis son arrivée en France. Du moins, voilà bien un danger qu'elle connaît et qu'elle saura combattre.
    Non, on ne combat pas la solitude, surtout celle d'un Roi, mais on peut y naviguer comme en un océan, utiliser ses courants aussi pour rentrer au port ou conquérir quelque Amérique inconnue. Et pour traverser cette mer-là, Anne possède le portulan et la boussole. Dieu tienne encore un peu le Roi en vie ! Sa mort serait la fin brutale de l'enfance de Petit Louis, le deuil de joies encore ni frôlées ni connues. Laissez-le grandir, laissez-moi le temps de lui enseigner le bonheur. Ensuite, nous nous préoccuperons de politique.
    Guitaut se leva avant le soleil. Il baisa le pied nu de Marie-Catherine, fleur aux cinq pétales sortis du drap. On émit un balbutiement ronronnant du côté de l'oreiller ; il sourit ; recommença.
    Une main se leva à peine, le cherchant sans doute, puis retomba.
    Il baisa le bout des doigts, attendit, rien, simplement le souffle doux. Il se releva pour se vêtir.

    - François.
    La voix à peine audible venait du lit.
    Le visage était invisible, enfoncé dans les oreillers. La main alanguie t‚ta le drap, l'écarta. Guitaut vit l'air froid saisir la peau et y dessiner une éruption de chair de poule.
    - Viens, François.
    Il alla.
    Ninon pieds nus ravageait l'office en quête de boisson chaude et de pain beurré. En chemise, un ch‚le sur les épaules, elle faisait cuir un úuf coque, buvait un bol de lait o˘ trempait un peu de pain brioché. Dorine parlait, Ninon n'écoutait guère, personne chez Marion n'écoutait Dorine, c'était une tradition et un embarras de moins puisque Dorine jamais ne se taisait. Pourtant un mot, un lambeau de phrase avait alerté l'oreille encore ensommeillée de la belle enfant.
    - que disiez-vous, Dorine ?
    - Je parlais du Roi. Personne ne m'écoute jamais.
    - Le Roi ?
    - N'est-ce pas ici la place Royale ? Il y est donc chez lui.
    - Mon Dieu !
    Ninon pieds nus en chemise gravit les degrés de l'étage, entra dans la chambre de Marion et dit :
    - Marquis ! Le Roi arrive.
    Cinq-Mars fut debout sans qu'elle p˚t voir le mouvement qui lui avait ainsi permis de se dresser dans un claquement de draps, comme les voiles d'un vaisseau surpris par la tempête. Marion p‚lit puis cria. Ninon ouvrit les rideaux de velours cramoisi.
    - Oui, le Roi va passer, il approche, dit-on, de la place Royale.
    - Mais Sa Divine Puanteur devait chasser en forêt de la Laye !
    Ninon remarqua que la voix de Cinq-Mars était un glapissement. Pour la première fois, Monsieur le Grand, si beau, si jeune, si fringant, lui déplut.
    - Un jour, ta haine te tuera, marquis.
    Elle couvrit sa nudité d'un drap enroulé d'un seul geste, résultat élégant de l'expérience acquise.
    - La haine, c'est la peur, bien souvent. Monsieur le Grand a peur ce matin, ma Ninon, dit Marion en abandonnant le drap pour passer une robe bordée de loutre au col et aux manches. qu'est-ce que cette histoire du Roi en visite si matinale sur la place Royale ?
    - A l'office, Dorine...
    - Dorine dit n'importe quoi, ma chérie.
    - Pas cette fois-ci. Picard a confirmé...
    - Picard. Diable ! Cinq-Mars, habille-toi.
    Cinq-Mars fixait la fenêtre debout, raide, en chemise.
    - C'est lui qu'il faut tuer... nous avons tort de commencer par l'autre.
    - Henri, que dis-tu ?
    - Rien, Marion. Rien.
    - Presque rien, chantonna Ninon, Cinq-Mars, Fontrailles et de Thou, plus Monsieur, veulent assassiner Richelieu. Tout le Marais en plaisante. Epemon a parié mille nouvelles pièces de louis d'or que le complot n'était que plaisanterie.
    - Contre qui ? demanda Cinq-Mars, nouant son jabot, contre qui, ces vingt mille francs ?
    - M. le Coadjuteur, François Paul de Gondi.
    - qui a dit cela, Ninon jolie ?
    - La princesse de Rohan. Elle a prêté l'argent à Gondi, qui dit que tout honnête homme doit mourir endetté.
    - Cinq-Mars, dis-moi la vérité.
    Marion s'approchait de son amant et le saisit aux épaules.
    - quelle vérité ? que Richelieu va crever et le Roi aussi avant trois ans ? A-t-on besoin de les tuer alors que le Ciel a déjà signé
    leur arrêt ? Gondi va être encore plus endetté. D'o˘ lui est venue cette idée ?
    - Le coadjuteur est myope comme un escadron de taupes, marquis, il n'est pas sourd. De Thou boit trop, il aura parlé.
    - Lui, François, mon quasi-frère, le meilleur ami du monde, Son Inquiétude céleste, ce brave

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