Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le lit d'Aliénor

Le lit d'Aliénor

Titel: Le lit d'Aliénor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
Vom Netzwerk:
y était question du roi, et le ton employé semblait ouvert aux manigances. Je n’ai pu saisir le sens du propos, mais je me méfiais de l’homme et souhaitais que Denys s’en inquiétât.
    – Et tu n’as rien pu lui dire. Fâcheux contretemps. Pour l’heure cependant, je n’ai eu vent d’un quelconque complot. Qui était cet homme ?
    – Etienne de Blois.
    – Voyons, Loanna ! Il est roi d’Angleterre ! Qu’aurait-il à faire de la mort d’un roi qui en plus le soutient dans son conflit avec l’Anjou ? Non, je doute qu’un danger vienne de lui. Tu auras sans doute mal compris. Peut-être tes sentiments à son égard ont-ils faussé ton jugement. Je sais combien dame Mathilde ta marraine est désenchantée de n’avoir pas été légitimée par son peuple. Dieu sait ce que tu auras entendu dans ton enfance sur cet homme considéré comme un ennemi, mais, pour l’avoir rencontré et écouté en diverses occasions, j’ai pu juger de sa valeur et de son intégrité. Tu te seras fait des idées !
    – Sans aucun doute, soupirai-je. J’ai bien failli toutefois laisser mon sang dans ce coupe-gorge que sont les rues de Paris. Vois combien j’ai l’esprit fantasque, ma douce !
    – Je t’interdis désormais d’oser pareil exploit ! Louis mérite ton attachement à sa royale tête, mais je tiens plus encore à la tienne.
    Elle m’embrassa. Des boucles blondes frôlèrent mon front comme un vent d’été gorgé de soleil. J’eus envie brusquement de sa lumière, de son âme d’enfant qu’elle ne cesserait jamais d’être, et de ses cheveux épars sur mon ventre.
    – J’ai envie de toi, murmurai-je en l’attirant contre moi.
    – Crois-tu qu’il soit raisonnable, se plaignit-elle, pour la forme seulement, car, dans son regard piqueté de mauve, une étincelle s’était allumée que je ne connaissais que trop bien.
    Je dégageai une place à côté de moi dans le lit. Avec un petit gloussement, elle fit glisser sa jupe de siglaton à terre et s’allongea. Je délaçai tendrement les fils qui retenaient son corsage serré jusqu’à la taille et dénudai ses seins tendus. Puis, la couvrant de baisers, j’aventurai une main fébrile entre ses cuisses.
    – Cela fait si longtemps, hoqueta-t-elle en gémissant de plaisir.
    Elle s’abandonna à mes caresses tandis que je me faisais la même remarque, aiguisée non seulement par ces jours d’immobilité mais aussi par la perspective grisante de retrouver Jaufré. Car je n’avais plus de doute désormais. Comme Denys, il pardonnerait.
    Lorsque Aliénor rentra au palais ce même soir, elle eut plaisir à l’entendra, chanter à la veillée. Après que chacun se fut retiré, elle s’entretint longuement avec lui. Elle lui raconta combien ces années m’avaient coûté, allant même jusqu’à prétendre que je me reprochais ma conduite à son égard mais que, par un orgueil stupide, je m’étais bornée à attendre qu’il fasse le premier pas. J’imaginai que c’était ce qu’elle croyait sincèrement. Quoi de plus normal que Jaufré le crût aussi. Aliénor n’avait pas sa pareille pour culpabiliser son prochain et faire d’un bourreau une victime. J’aurais dû lui en vouloir, étrangement cela me soulagea. Cette version me laissait la possibilité de ne pas tout dévoiler avant d’avoir accompli ma mission en Terre sainte. Ce qui importait était que, d’avoir ouï ces paroles, Jaufré s’était rasséréné et qu’il se languissait de l’instant où je reviendrais en ses bras.
     
    Le dimanche suivant, avant la tombée du jour, je me présentai aux portes du palais de la Cité. Retrouver le contact de Granoë m’avait été plus qu’agréable et je savourai tout le long du trajet le plaisir de me sentir de nouveau vivante.
    Denys me reconduisit jusqu’aux écuries du palais. Là, nous nous séparâmes, lui pour gagner la salle d’armes, moi mes appartements. Ce fut d’un pas léger que je gravis les escaliers du donjon. Il n’était pas question que je me présente devant Jaufré et la cour avec si pauvre mine. Je fouillai mes malles et extirpai une robe de samit d’un bleu profond que j’aimais beaucoup. Pour conforter son histoire qui me voulait en Anjou, Aliénor avait jugé prudent d’éloigner Camille, ma chambrière, sitôt après mon agression et l’avait placée dans un couvent, non sans lui avoir assuré que je me portais bien et qu’on l’enverrait chercher dès que possible. Je dus en

Weitere Kostenlose Bücher