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Le lit d'Aliénor

Le lit d'Aliénor

Titel: Le lit d'Aliénor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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Turcs, qui ? demanda-t-il au connétable dont le front soucieux marquait une ride de colère.
    – Comnène. Ce fourbe ne recule devant rien pour posséder ce qu’il désire. Il se sera servi de ces chiens pour l’obtenir et nous rouler.
    Jaufré se laissa tomber sur un banc. Il se sentait responsable. Denys posa une main fraternelle sur son épaule.
    – Ne te reproche rien, mon ami, lui dit-il, devinant ses pensées, je m’attendais à quelque traîtrise, mais faisais confiance à sa prescience. Il semble qu’elle se soit laissé berner. C’est dire si l’homme est dangereux.
    – Si seulement j’avais porté quelque arme à cet instant.
    – Tu es son cœur et moi son bras. Si quelqu’un doit se reprocher quelque chose, que ce soit moi, de n’avoir pas été là, quand j’avais fait promesse de veiller sur elle. Mais il ne s’agit plus de se lamenter. Tu vas parcourir Constantinople avec tes amis troubadours. Certains d’entre eux parlent et comprennent la langue locale. Qu’ils prêtent l’oreille. Si Comnène l’a fait enlever, nul doute qu’il cherchera à la rejoindre ; lors, je serai là avec quelques hommes sûrs pour trouver l’endroit où il la détient prisonnière.
    – Et s’il lui venait l’envie de la découdre ? demanda Jaufré d’une voix troublée par l’angoisse.
    – Pour l’heure, je crains davantage pour sa vertu que pour sa vie, murmura Denys. Et Loanna n’est pas femme à se laisser assassiner sans rien tenter !
    Jaufré leva vers Denys un regard curieux. Il découvrait soudain combien j’avais eu raison de me reposer sur lui tant de fois. Il semblait tellement sûr de lui, tellement protecteur, que cela le réconforta.
    – N’aie crainte pour ta belle, elle est mieux armée que toi et moi, et quand bien même, je te fais serment que nous la retrouverons, dussé-je y laisser la vie. Allons, nous avons à faire et chaque minute compte. Sonne le rassemblement de ceux que tu sais fidèles, mais que la reine reste en dehors de nos engagements. Elle est trop vive, et risquerait fort de déclencher un incident en déboulant avec des accusations plein la bouche. Il vaut mieux que le basileus ne se doute de rien.
     
    Je m’éveillai avec la sensation d’un regard sur mes reins qu’une légère fraîcheur me rappela nus. Je me retournai brusquement et vis le basileus, assis à mes côtés avec désinvolture. Une sourde colère m’envahit, avivée par le repos réparateur. D’un geste vif, je remontai sur mon corps les fourrures qui m’entouraient et le cueillis d’un œil noir. Il éclata de rire et, saisissant une coupe sur une table, y versa un vin de cannelle.
    – Voilà une heure que je regarde frémir cette croupe aussi somptueuse que celle d’un de mes meilleurs pur-sang. Vous êtes encore plus belle avec cette seule robe que parée de tous vos joyaux, damoiselle.
    Le ton était moqueur et vexant. Manuel avait toujours eu plus de considération pour ses chevaux que pour les femmes. Il me tendit la coupe en révélant dans un voluptueux mouvement du menton tout l’éclat de ses dents de perle. J’avais soif. J’acceptai son présent.
    – Vous ne paraissez pas surprise, délicieuse fleur de mes plus beaux jardins.
    – En quoi le serais-je ? Il y a déjà longtemps que je sais votre fourberie. Que comptez-vous faire de moi ?
    – Vous aimer, jusqu’à vous perdre. Ensuite, je vous rendrai à vos gens, qui seront alors convaincus de ma bonne foi et s’en iront sur des chemins difficiles, comme ce cher Conrad.
    Je le toisai d’un regard de défi :
    – Vous ne me posséderez pas davantage aujourd’hui qu’hier. Ou vous mourrez !
    – Que nenni, belle dame. Vous avez bien trop besoin de moi pour accomplir vos noirs desseins. Et je vous dompterai quand bon me semblera comme la plus insoumise des juments, soyez-en sûre.
    Un frisson me parcourut l’échine tandis qu’il avançait une main pour déplacer une mèche de cheveux qui couvrait mes seins. Je le repoussai résolument, les dents serrées. Il éclata d’un rire mauvais et se leva en dépliant ses longues jambes.
    – Ce soir, tu seras mienne et tu crieras comme une jeune chienne !
    Sur ces mots, il s’en fut soulever la lourde tenture et disparut derrière. J’ignorais combien de temps je m’étais assoupie, mais la pensée de quelque répit jusqu’à ce qu’il revienne me rassura. J’avais ainsi loisir de préparer à ce maudit quelque tour de ma façon. Un pas léger

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