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Le lit d'Aliénor

Le lit d'Aliénor

Titel: Le lit d'Aliénor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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pour me punir. Mais je m’en moquais.
    Pour l’heure, j’attendais une autre visite : la traîtresse, la monstrueuse, l’impie, Béatrice. Non, je ne dévoilerais pas son sinistre geste, non, nul ne saurait jamais. Mais elle allait apprendre à guetter demain et, chaque jour, elle aurait peur de celui qui suivrait. Oui, cet enfant aurait sa vengeance.
    – Vous m’avez fait demander, mon amie, susurra sa voix mielleuse.
    Elle supposait probablement que je n’avais aucun soupçon quant à sa culpabilité. Je me tournai vers Panperd’hu et Aliénor.
    – J’aimerais demeurer seule un instant avec dame Béatrice.
    Aliénor m’interrogea du regard, mais, comme elle ne formula pas sa question, je me contentai de lui sourire.
    – Comme bon te semblera, finit-elle par dire d’une voix égale. Allons, venez, messire Panperd’hu. Nous dégourdir les jambes nous fera le plus grand bien, surtout aux miennes qui ressemblent davantage à des outres trop pleines qu’à des tiges de roseau.
    Enroulant son bras autour de celui du troubadour, elle salua Béatrice et sortit.
    – Approchez-vous, Béatrice.
    Elle s’avança. Derrière une superbe assurance, je devinais son inquiétude. Elle s’installa sur le siège laissé vacant par la reine et crut bon de se lamenter :
    – Quelle cruelle perte que la mort de ce petit être ! Si je l’avais su, jamais je n’aurais permis que vous vous épuisiez à la tâche sur ce trousseau.
    Un sursaut de haine me serra les poings. Je ne cherchais nullement à cacher ma colère. Elle blêmit, tandis qu’implacable je laissais la rage s’arracher de mes entrailles meurtries :
    – Trêve de mondanités, Béatrice. Je sais que vous êtes responsable de tout ce qui est arrivé. Je connais trop le poison moi-même pour n’avoir pas reconnu la ciguë que vous avez employée. Vous me haïssez au point de m’avoir voulu détruire, mais on ne tue pas une sorcière.
    Elle se leva d’un bond :
    – Mensonge ! Je comprends que vous soyez affectée…
    – Silence ! Asseyez-vous !
    Elle hésita un instant, puis se laissa choir sur la chaise. Je laissai retomber le silence, sans la quitter des yeux. Elle finit par puiser dans une intelligence vive une parade plus appropriée que celle de la victime. Sa haine éclata et elle persifla entre ses dents de porcelaine :
    – Nul ne vous croira. On ne survit pas au poison, et j’ignore même comment il ne vous a pas tuée. Mais cela seul servira contre vos accusations.
    – Qui parle d’accusation, Béatrice ? ricanai-je. Me pensez-vous assez stupide pour vous intenter un procès ? On me prendrait pour une folle, perturbée par la perte de son enfant. Ce n’est pas cela que je veux.
    – Et que diable voulez-vous ? Il n’est pas en mon pouvoir de vous rendre l’enfant.
    – Vous ne savez pas qui je suis, Béatrice. Vous n’avez pas seulement idée des pouvoirs que je possède. Mais depuis trop longtemps vous pesez sur ma vie comme une crotte bourbeuse et putride. Vous pouviez être le bien, quand vous n’êtes irrémédiablement que le mal. J’ai cru que votre amour pour Louis pouvait servir mes desseins et je l’ai encouragé, mais cela aussi vous l’avez perverti. Pour tout cela il est temps de payer. Et le prix de vos crimes est la mort.
    Elle partit d’un petit rire dans lequel je perçus plus de crainte que de cynisme.
    – Quel poison me réservez-vous ?
    – Il n’est point besoin de poison aux magiciennes. Entendez bien ce que je dis, Béatrice de Campan : « Par le pouvoir des trois cercles et la magie d’Avalon, j’appelle sur toi les démons des ténèbres et la malédiction de la terre que tu as souillée. Avant que soit passé à ton doigt l’anneau de pureté, tu périras dans la souffrance, par la cause de tout ce mal que tu as engendré. »
    Elle tremblait à présent.
    – Sorcellerie, hoqueta-t-elle. Vous brûlerez en enfer ou sur un bûcher !
    Alors, je partis d’un rire qui fit trembler la pièce :
    – Le poison ne peut rien contre moi, crois-tu donc que les flammes me détruiraient ? D’ailleurs, pas plus que moi on ne te croirait. Va-t’en à présent. Ma malédiction est sur toi et quoi que tu fasses ou dises n’y changera rien. Avant que tu sois épousée, tu mourras. Ce trousseau que j’ai teint et tissé sera ton linceul !
    – Vous êtes folle ! Complètement folle !
    Puis, tournant les talons, elle se donna une contenance en assurant un pas ferme et lent

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