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Le lit d'Aliénor

Le lit d'Aliénor

Titel: Le lit d'Aliénor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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ces questions sans réponse, je me jetai à corps perdu dans l’achèvement de ma mission.
    Inlassablement je tissais ma toile d’araignée autour d’Aliénor. Souvent nous parlions d’Henri, et à plusieurs reprises ce fut elle qui amena le sujet. Que quelqu’un osât braver son époux la réconfortait. Au royaume de France elle n’était plus rien, et Louis n’avait de cesse de la rabrouer, ouvertement parfois. Autrefois, la jeune reine aurait bondi, hurlé, craché sa jeunesse, et Louis aurait plié. Elle n’avait désormais plus de prise sur lui.
    Elle était prête. Il suffirait qu’elle croise le regard d’Henri, et même sans doute qu’il la violente dans sa chair, pour qu’elle accepte de le suivre. Car Aliénor se mourait de ne pas vivre. Son bel amant amusait ses sens, mais ne comblait pas son besoin d’un pouvoir qui était sa raison d’être.
     
    Les fêtes de la Pentecôte s’annonçaient sous l’auspice d’une tiède moiteur. Le ciel était orageux depuis plusieurs jours. Une onde d’électricité statique flottait dans l’air et tendait les propos de chacun. De sorte que lorsque les vassaux du roi vinrent s’incliner dans la vaste salle voûtée, ornée des oriflammes des provinces de France, Louis ne parvint pas à se sentir aussi sûr de lui qu’à l’accoutumée. Cette cérémonie qui précédait l’ouverture des tournois obligeait chacun à renouveler au roi son serment d’allégeance. Or, l’on murmurait partout depuis la veille qu’aucun des pavillons aux couleurs de la Normandie n’avait encore piqué l’herbe de Saint-Denis. Aliénor, assise aux côtés du roi, tremblait et cherchait des yeux ce géant roux dont on lui avait tant parlé.
    Mais la matinée se passa et avec elle mon anxiété se fît plus grande. Nulle part trace d’Henri. Mes derniers messagers étaient porteurs pourtant de bonnes nouvelles. Louis commençait de tapoter de ses doigts agacés le bras du fauteuil.
    Ce fut aux alentours de midi qu’un héraut annonça le duc de Normandie. Un soupir de soulagement monta dans l’assistance, tandis que chacun guettait l’entrée de ce personnage qui semait tant de désarroi.
    Hélas, à mon grand étonnement, ce fut Geoffroi le Bel qui s’avança et s’inclina. Seul.
    Louis fronça les sourcils. Certes, c’était un progrès, mais… Il posa rudement la question qui lui brûlait les lèvres :
    – Eh bien, comte, où se trouve donc ce fameux duc de Normandie que nous attendons impatiemment ?
    Le ton était à peine contenu, et Geoffroi le Bel ne s’y trompa pas ; il se redressa et, de toute sa superbe, fit face au roi.
    – Hélas, Votre Majesté. Le duc Henri, mon fils, est alité depuis huit jours, victime d’une fièvre intense. Les meilleurs médecins sont auprès de lui et ont exigé qu’il soit mis en quarantaine, tant ce mal les intrigue. Le duc vous envoie par ma bouche ses plus sincères excuses pour ce contretemps fâcheux et vous assure de sa visite dès son prochain rétablissement.
    – Et quelle serait donc cette maladie ? ironisa Louis, qui ne croyait pas un mot de cette nouvelle excuse.
    – Hélas, messire, nous l’ignorons. Mais le jeune duc de Normandie est très affaibli, il vous faut m’en croire.
    – Et si je décidais de n’en rien faire ? s’emporta le roi.
    – Ce serait grand malheur pour tous, Votre Majesté. Aussi serait-il judicieux que votre indulgence s’arme de prudence et que vous dépêchiez un de vos médecins à Rouen, qui, outre ses conseils éclairés, vous confortera dans une attitude de patience.
    – Vous pouvez compter sur cette démarche, comte d’Anjou, mais si par Dieu, votre rejeton n’est pas mourant, je jure qu’il le sera par cette lame ! gronda Louis en posant une main agacée sur le pommeau de son épée.
    Sa voix était si dure qu’Aliénor se rencogna dans son siège. Louis héla Thierry Galeran qui se trouvait non loin et d’une voix ferme ordonna :
    – Qu’une escorte parte sur-le-champ et conduise mon meilleur apothicaire, Grimaud de Morois, au chevet du duc de Normandie, avec pour mission de visiter ce prétendu malade. Quant à vous, comte, vous êtes mon invité, mais vous ne pourrez quitter Paris sans m’en avertir.
    – Dois-je me considérer comme prisonnier ? s’offusqua Geoffroi.
    – Grand Dieu, non, répondit Louis, mi-figue mi-raisin, puis il ajouta avec une pointe de cynisme : Pas tant que cette expédition ne sera point revenue pour m’apporter

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