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Le lit d'Aliénor

Le lit d'Aliénor

Titel: Le lit d'Aliénor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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des nouvelles. Priez donc, messire, pour qu’elles aillent dans votre sens !
    Geoffroi courba la tête.
    « Avant longtemps, pensa-t-il, tu regretteras d’avoir ainsi humilié les miens. »
    – Allons à présent, que les fêtes commencent ! clama Louis à l’attention de l’assemblée.
    [
     
     
    À cette invitation, une salve de trompettes s’envola et, comme des oiseaux multicolores, la foule s’éparpilla par les portes grandes ouvertes. Noyée dans le mouvement, je ne pus approcher Geoffroi le Bel de sitôt. Je décidai donc de l’aller trouver après m’être acquittée de la charge qui était mienne en ce jour de fête, veiller à ce que les cuisines croulent sous les pâtés, les jambonneaux, les gibiers, les sauces, les entremets et tant d’autres mets qui allaient être servis à la table du roi.
    Quelques heures plus tard, je quittais l’enceinte du palais pour me rendre à Saint-Denis où déjà l’on se préparait aux tournois.
    Granoë me conduisit au milieu des tentes et pavillons jusqu’à celui dont l’oriflamme annonçait les couleurs de l’Anjou.
    Lorsque je m’y présentai, Geoffroi achevait de visser son armure avec l’aide d’un écuyer.
    – Loanna, chère enfant ! s’écria-t-il en me voyant.
    Je le saluai, puis me risquai aussitôt sur la raison de ma visite :
    – Qu’en est-il vraiment de cette maladie, mon oncle ?
    Il congédia d’un geste vif son écuyer qui venait de terminer l’ajustement d’un bras.
    – J’en finirai moi-même avec le heaume. Va ! Occupe-toi de ma monture. Et sangle-la bien. Prendre une déculottée devant le roi serait malsain pour mon amour-propre.
    Lorsque nous fûmes seuls, il s’alla servir un verre de vin de cannelle et m’en tendit un, puis de sa voix que les années avaient cassée, il soupira :
    – Ce n’est pas, hélas, un nouveau caprice. Henri est bel et bien malade.
    – Est-ce grave ?
    – Les médecins ne croient pas sa vie en danger, mais il est affaibli. Fort heureusement, sa constitution le met à l’abri de nombre de maladies, mais n’écarte pas tout. Quoi qu’il en soit, cela tombe mal. Pour une fois qu’il s’était résolu à venir et à profiter de ces fêtes pour rencontrer la reine !
    – Il ne faudra plus tarder, mon oncle. Elle est prête à prendre fait et cause pour lui. Et Louis est exaspéré par cette situation. Je songe même à demander l’aide de Bernard de Clairvaux pour faire patienter le roi si Henri ne plie pas, mais je doute qu’il intervienne.
    – Henri est bien plus obstiné que moi. S’il avait accepté de se rendre à l’invitation de Louis, ce n’était que dans le but de l’affronter ouvertement. Pas de plier.
    – Quelle tête de mule ! J’en appellerai donc à Bernard de Clairvaux. Pour l’heure, j’espère qu’Henri sera assez convaincant auprès de ce charlatan de Moroit pour lui faire comprendre que ce n’est pas un nouvel affront.
    – Dieu vous entende. Allons, il me faut aller moucher ce jeune freluquet de baron de Montmorency qui, à plusieurs reprises, a eu des mots malheureux. Le jeter à terre me soulagera.
    Ainsi fut fait. Et ce fut d’autant plus savoureux que Louis l’avait choisi pour favori.
     
    Le repas fut joyeux, malgré la menace qui pesait sur Geoffroi d’Anjou et son fils dans l’attente du retour de la délégation. Pour ma part, une autre angoisse m’étreignait le cœur. Comme l’année dernière, Geoffroi de Rançon avait vaillamment défendu mes couleurs et m’avait offert son trophée. Cette fois pourtant, je savais qu’il était chargé de symboles. À la longue tablée de laquelle fusaient rires, chants et anecdotes, il était placé dans l’oblique de mon regard. L’heure approchait où il chercherait ma compagnie. De nombreux convives roulèrent sous la table bien avant l’aube, ivres de ripaille et de vins d’Aquitaine. Lorsque la reine prit congé de son époux et de ses invités, j’en fis autant, espérant de toute mon âme échapper ainsi à cette entrevue que je redoutais. Je ne fus pas assez rapide, car je trouvai le comte au pied de l’escalier qui menait à mes appartements. Il nous salua courtoisement, échangea quelques mots avec la reine pour lui souhaiter le bonsoir, et me proposa son bras :
    – Faisons quelques pas, voulez-vous, Loanna ?
    Je le suivis, la gorge nouée, jusqu’aux jardins éclairés par une lune ronde. Je gardai le silence pendant tout ce temps et lui-même n’osa le

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