Le livre du cercle

d’or, bien sûr, reprit-il. Tout le monde a des désirs, Will. Il faut
juste savoir sur quelle corde appuyer pour entendre la musique désirée.
    — C’est
un truc que Rook t’a appris quand tu travaillais pour lui ?
    Garin
poussa un profond soupir.
    — Ce
que tu me demandes, c’est si tu peux me faire confiance, n’est-ce pas ?
    — Non,
répondit Will en plantant son regard dans le sien. Je ne te ferai plus jamais
confiance. Mais je m’assure que tout va se passer en douceur. Si le domestique
a raison et que le livre est sur le point d’être déplacé dans un endroit plus
sûr, c’est notre seule chance de le prendre.
    Garin
baissa les yeux et regarda ses mains.
    — Tu
ne crois pas que j’ai changé ?
    Will
se redressa contre le banc avec un air impatient. Garin se pencha vers lui.
    — Rappelle-toi
que c’est moi qui suis venu te proposer cette opportunité.
    — Everard
a son propre plan pour mettre la main sur le livre.
    — Oui
? Eh bien, d’après ce que tu m’as dit, sa première tentative n’a pas vraiment
bien fonctionné.
    Garin
avait raison. En revenant d’Antioche, Will avait appris qu’en son absence,
l’Anima Templi avait envoyé deux mercenaires dérober Le Livre du Graal dans la
citadelle des Hospitaliers. Mais ils n’étaient jamais revenus et, une semaine
plus tard, lors d’une réunion entre les principaux dirigeants d’Acre, Hugues de
Revel avait annoncé que des voleurs avaient essayé de dévaliser son coffre. Il
avait expliqué à l’assemblée que ces hommes avaient été appréhendés et
interrogés, mais qu’ils étaient morts lors d’une tentative d’évasion. Aux
abois, désirant plus que jamais prendre le livre mais sachant qu’il ne pouvait
se permettre d’envoyer d’autres hommes à l’intérieur de l’Hôpital juste après
cette débandade, Everard était bien forcé d’attendre.
    — Mon
plan a au moins une chance de pouvoir marcher, reprit Garin. Et de toute façon,
si je voulais récupérer le livre pour mon propre compte, est-ce que tu crois
que je t’en aurais parlé ? Je me serais débrouillé tout seul, non?
    — Et
Rook? Ne sera-t-il pas furieux en apprenant que tu m’as aidé à rapporter le
livre à Everard ?
    Garin
évita le regard accusateur de Will.
    — Je
t’ai déjà dit que j’étais obligé de lui obéir.
    — S’il
te menaçait, tu aurais pu en parler à quelqu’un de l’Ordre. Ils auraient mis un
terme à ces pressions.
    — Peut-être,
mais il aurait tué ma mère avant ! s’exclama Garin. Écoute, Will, je t’ai déjà
expliqué que j’en avais fini avec cette histoire. Je ne vois pas ce que je peux
te dire d’autre.
    — Tu
pourrais commencer par me raconter la vérité. Je crois que tu sais qui est
Rook, malgré ce que tu affirmes. Et pour commencer, comment a-t-il entendu
parler du livre ?
    — Je
ne sais pas !
    Garin
plongea la main dans la bourse qui pendait à sa ceinture.
    — Regarde,
dit-il en extirpant un petit disque en cuivre. Est-ce que ça te rappelle
quelque chose ?
    Will
s’en saisit avec mauvaise humeur. Puis il le regarda avec étonnement. C’était
le sceau de l’Ordre : il représentait deux chevaliers sur un seul cheval.
    — Tu
m’as donné cette médaille après le tournoi. Tu as gagné et j’ai perdu, mais tu
m’as donné la récompense.
    Garin
regardait Will avec nervosité, espérant que celui-ci ne remarquerait pas qu’il
s’agissait d’une médaille différente. Cela faisait des années qu’il avait jeté
celle que Will lui avait offerte.
    — Je
voulais te la rendre. Pour te prouver que j’ai changé.
    Will
resta silencieux un bon moment, puis il lui rendit la médaille.
    — Tu
m’as sauvé la vie à Antioche et je t’en suis reconnaissant. Mais nous ne serons
plus jamais amis, Garin, et je ne te pardonnerai jamais pour... pour ce qui est
arrivé à Paris.
    Le
visage de Will s’était contracté, son regard semblait perdu dans le vague.
    Garin
hocha la tête en serrant les lèvres, puis il rangea la médaille dans la bourse.
    — Je
comprends, répondit-il doucement.
    La
porte de la sacristie s’ouvrit à cet instant et le prêtre leur adressa un signe
de la main.
    À
l’intérieur de la pièce pleine de fumée d’encens, le prêtre leur montra une
grande malle.
    — Voilà,
dit-il en les faisant entrer. Le domestique est venu ce matin, il les a laissés
ici. Il a dit qu’il y avait tout ce qu’il vous fallait.
    — Merci,
dit Garin.
    Le
prêtre les salua.
    — Je
vais