Le livre du cercle
tourna et repartit d’où il était arrivé. Will adressa un sourire étonné à
Robert.
— Il
a dû travailler trop longtemps au soleil, je pense. On parlera ensemble tout à
l’heure.
— Je
serai à l’armurerie, dit Robert.
— Attends-moi,
cria Will en suivant le palefrenier.
Simon
ne ralentit pas, continuant au même rythme en direction des écuries. En approchant
de celles-ci, Will s’arrêta un instant.
— Simon,
dit-il d’une voix qu’il voulait à la fois aimable et ferme.
Le
palefrenier se retourna.
— Je
n’ai pas le temps de jouer. Dis-moi de quoi il s’agit, j’ai des choses à faire.
— Viens
simplement un moment, insista Simon en disparaissant à l’intérieur.
Will
soupira d’un air irrité, puis il entra à son tour. Simon se tenait devant la
réserve, presque invisible dans la pénombre. Il ouvrit la porte puis recula.
Will fronça les sourcils, la bizarrerie de son ami le rendant mal à l’aise,
puis il s’approcha. Mais en voyant la femme se retourner, il s’arrêta sur le
seuil, pétrifié. De petits rayons de soleil obliques traversaient le mur du
fond, l’entourant d’un fragile halo de lumière dorée. La bouche de Will s’assécha,
bloquant les milliers de mots qui tourbillonnaient dans son cerveau et qui
demandaient tous à sortir en même temps. Quand la bousculade initiale des
exclamations fut dispersée, quand ses pensées chaotiques se retirèrent comme
une vague qui reflue, il ne lui resta plus qu’un seul mot. Et ce mot qui était
un nom, il le prononça d’une voix étrange, calme, qui ne lui ressemblait pas.
— Elwen.
Elle
sourit légèrement.
— Bonjour,
Will Campbell.
Will
s’avança d’un pas sans remarquer la porte que Simon fermait doucement derrière
eux.
Le
silence enfermait les deux anciens amants dans un cocon intime. La pièce
étroite, dont l’air chaud puait le cuir et le fumier, sembla s’élargir. Le
sentiment qu’il éprouvait était si intense que Will ressentit un vertige.
Il
constata qu’il ne respirait plus et qu’il n’avait pas quitté Elwen des yeux
depuis qu’il était entré dans la réserve. Il se déplaça et se força à détourner
le regard. Au bout de quelques secondes, il reprit ses esprits et reconnut
l’environnement habituel où il se trouvait.
— Comment
vas-tu? demanda Elwen en le regardant.
Will
secoua la tête.
— Bien.
Il
se dandina d’un pied sur l’autre et releva les yeux sur elle.
— Et
toi ?
— Je
vais bien.
Soudain,
Will fit plusieurs pas dans sa direction, les yeux plantés dans les siens.
— Elwen,
je n’ai jamais voulu partir de cette façon, affirma-t-il. Je n’ai jamais voulu
que les choses prennent cette tournure, que ça se passe comme ça.
— Pourquoi
es-tu parti, dans ce cas ? répondit-elle d’une voix grave, accusatrice. Pourquoi
étais-tu avec...
Elle
s’interrompit, détourna un instant les yeux mais les reporta aussitôt sur lui.
— Pourquoi
étais-tu avec cette fille ? demanda-t-elle en braquant sur lui un regard
farouche.
Will
poussa un profond soupir en se grattant le front.
— Tu
te rappelles le livre qu’Everard t’avait demandé de voler pour lui ?
— Celui
du troubadour ? Bien entendu.
— Et
tu te souviens que j’ai dû partir à la poursuite de quelqu’un qui nous l’avait
repris ?
— Oui,
murmura-t-elle, tu me l’as dit quand nous nous sommes vus au palais. Quand tu
m’as demandé de devenir ta femme.
Will
étudia le plafond, le temps de récapituler mentalement le cours des événements.
— Ce
soir-là, alors qu’Everard et moi nous préparions à partir, Garin de Lyons m’a
envoyé une lettre en prétendant qu’elle venait de toi. Cette lettre me disait
de me rendre à l’auberge pour t’y retrouver. J’ai été capturé par un homme qui
voulait lui aussi le livre. Garin et lui m’ont fait dire où il se trouvait et
Garin m’a drogué. Puis il est parti en m’abandonnant sur le lit.
— Garin
? s’étonna Elwen, le visage exprimant à la fois la confusion et la colère.
Simon
ne s’était pas épanché dans la lettre qu’il lui avait envoyée. Il lui avait
simplement dit qu’il lui avait menti, que Will avait été drogué.
— Pourquoi
aurait-il fait une chose pareille ? lui demanda-t-elle.
— L’homme
qui m’a capturé l’y a forcé, répondit Will. Mais ça n’a plus d’importance. Cet
homme est mort, et Garin en prison. Tout ce que je veux que tu saches, c’est
que je n’étais pas là de mon
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