Le livre du cercle
timidement d’elle.
— Comment
es-tu venue ici ?
— Sur
le bateau d’un marchand.
— Et
la reine t’a laissée venir ?
— C’est
elle qui m’y a poussée. Quand le corps du roi Louis est arrivé à Paris et que
nous l’avons enterré, le palais est devenu un lieu de deuil. Beaucoup de
domestiques sont partis parce qu’ils ne pouvaient supporter d’y rester sans
lui. Puis j’ai reçu ta lettre, et... je l’ai déchirée. Mais j’ai gardé les
morceaux, je ne sais pas pourquoi. Un jour, la reine les a trouvés et elle m’a
demandé de lui raconter toute l’histoire.
Simon
rougit à l’idée que la reine connaissait son secret.
— Elle
m’a dit que je devais venir, continua Elwen. D’après elle, je ne dois pas
gâcher ma seule chance de trouver l’amour parce c’est quelque chose de trop
rare dans cette vie. Je ne sais pas si ça convient à la situation : Will est
chevalier et je sais qu’il ne peut pas...
Elwen
blêmit et laissa passer quelques secondes, le temps de se reprendre.
— Je
voulais juste te dire que j’ai eu ton message, dit-elle finalement en
l’étudiant de ses yeux verts. Et que je comprends pourquoi tu as fait ce que tu
as fait.
Simon
détourna le regard.
—-
Tu veux voir Will ? demanda-t-il simplement.
— Il
est ici ? Je ne savais pas si...
Elle
s’interrompit de nouveau, puis elle prit une profonde inspiration.
— Je
pense. Oui, ajouta-t-elle aussitôt avec davantage de conviction. Oui, je veux
le voir.
Elle
regarda par-dessus son épaule vers la porte principale, où plusieurs sergents
montaient la garde.
— Mais
je ferais peut-être mieux de ne pas trop attirer l’attention sur moi, dit-elle
en souriant malicieusement. J’ai dit aux sentinelles que j’étais la nièce du
grand maître pour qu’ils me laissent entrer...
Simon
reconnut un instant la fille espiègle et audacieuse qui avait embarqué à bord
de l’Endurance des années plus tôt.
— Très
bien.
Il
fit un tour d’horizon des écuries, qui étaient désertes. La plupart des
sergents étaient dans la Grande Salle pour le repas du midi, mais ils auraient
terminé d’un moment à l’autre. Simon se dirigea vers la réserve où étaient
entreposées les selles.
— Cache-toi
ici si tu veux, dit-il en ouvrant la porte. Je vais aller chercher Will pour...
Sa
voix se brisa et il dut se racler la gorge à plusieurs reprises pour pouvoir
continuer.
— Je
vais te l’amener.
Elwen
l’observa tandis qu’il parlait. Il remuait, mal à l’aise, ses bras puissants et
musculeux pendant maladroitement le long de son corps, les poings serrés et les
yeux baissés, incapable de croiser son regard. Elle pouvait lire sur son visage
la lutte qui se jouait entre ce qu’il lui disait et ce qu’il éprouvait. Elle se
sentit comme une voleuse.
— Merci,
dit-elle doucement, en espérant que cela suffisait.
Will
était en chemin vers les quartiers des chevaliers quand il vit Simon marcher
lourdement à travers la cour. Le palefrenier l’aperçut également et s’arrêta
net, puis il leva légèrement la main à son intention. Quatre jeunes sergents
hilares s’interposèrent entre eux. Quand ils furent passés, Will découvrit
l’expression maussade de Simon. La cour se remplissait peu à peu d’hommes et de
jeunes gens, le repas de midi ayant pris fin. Will alla vers son ami.
— Qu’est-ce
qui cloche ?
— Rien,
répondit immédiatement Simon en souriant.
Will
arqua les sourcils, il était évident que son ami se forçait à paraître gai.
— A
te voir, j’aurais pourtant juré que quelqu’un venait de mourir.
— Non,
tout va bien. C’est... je viens juste de recevoir un choc, c’est tout.
— Un
choc ?
— Will.
Ils
se tournèrent tous deux et virent Robert qui s’approchait. Le soleil avait
décoloré ses cheveux blonds noués en queue-de-cheval, ils étaient maintenant
presque aussi blancs que son manteau.
Robert
fit un salut de la tête à Simon puis il passa ses bras sur les épaules de Will
en un geste amical.
— Es-tu
allé voir Everard ?
— Oui.
— Et?
— Il
a accepté d’en parler à Edouard.
— Bien,
dit Robert en souriant. Nous irons donc ensemble voir l’Arbalète.
— Will,
murmura Simon. Il faut qu’on y aille.
Will
lui jeta un regard distrait.
—Dis-moi
juste de quoi il s’agit.
Simon
allait dire quelque chose, mais il se ravisa.
— Je
pense qu’il vaut mieux que tu viennes voir par toi-même, dit-il d’un air
résolu.
Puis
il se
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