Le livre du cercle
terrain, tête basse.
Humbert
de Pairaud se leva et la clameur cessa. Aux côtés du maître d’Angleterre, sur
le même banc, se trouvaient les maîtres d’Irlande et d’Écosse. Sur l’estrade
devant eux étaient posés les prix : une épée pour le vainqueur du groupe des
aînés ; et pour la classe d’âge de Will, une médaille en cuivre portant la
réplique du sceau de l’Ordre, soit un destrier monté par deux chevaliers. Will s’inclina
devant les trois maîtres.
— Je
déclare William Campbell, sergent du chevalier Owein ap Gwyn, maître du
terrain. Campbell combattra pour le duel final. Vous pouvez quitter le terrain,
sergent, ajouta-t-il en regardant Will.
Will
s’inclina derechef puis courut vers la tente dressée au bord du terrain.
Une
heure plus tôt, il avait fini cinquième de l’épreuve de force face à trente
autres sergents. Et quatrième à la quintaine, où il avait failli tomber de
cheval et avait raté trois fois la cible avec sa lance. Mais sentir la victoire
lui échapper au profit de Garin, qui avait remporté ces deux premières
épreuves, l’avait enragé. Il avait gagné la course à pied et battu ses trois
premiers adversaires en duel. Son bras était engourdi à cause du poids de l’épée
mais le triomphe lui chauffait les veines. Plus qu’un combat !
Quand
Will entra sous la tente, Garin jaugeait le poids d’une épée en faisant de
grands mouvements. Dans un coin, un sergent plus âgé défaisait les lanières de
son plastron. Dehors, un autre duel se préparait.
Garin
plaça l’épée sur la table où les armes étaient entreposées.
— Bien
joué, fit-il en apercevant Will.
— Merci,
répondit celui-ci sans remarquer la morosité de son ami. Je croyais que je
n’arriverais pas à le battre. Si tu gagnes ton combat, on se retrouvera pour le
dernier duel.
Garin
acquiesça sombrement.
— Qu’est-ce
qu’il y a ?
— Rien,
grogna Garin. Il n’y a pas de prix pour le deuxième.
— Ce
n’est pas grave, répondit Will avec désinvolture. Si nous arrivons jusque-là,
nous serons tous les deux les champions du jour, peu importe celui qui gagne.
Il
regarda le sergent fixer son plastron et s’en aller.
— Où
étais-tu, hier? demanda-t-il à voix basse.
— Nulle
part, fit rapidement Garin. Je veux dire, à l’armurerie.
— Je
t’ai cherché, je voulais te demander quelque chose. Quand ton oncle est-il allé
pour la dernière fois en Terre sainte ?
— Il
est revenu après avoir été blessé à la Forbie, les Sarrasins venaient de
reprendre Jérusalem.
— Est-il
resté en contact avec des gens là-bas, des étrangers peut-être, quelqu’un qui
pourrait lui avoir rendu visite ?
Garin
se retourna.
— Pourquoi
cette question ?
Il
fit un geste en direction du terrain.
— Je
me bats dans une minute. Qu’est-ce qu’il y a ?
Will
entendit le héraut crier le nom de Garin.
— Rien.
Juste une question que je me posais sur la Terre sainte. J’hésite à lui
demander. Tu ferais mieux d’y aller. Bonne chance, ajouta-t-il en posant la
main sur l’épaule de son ami.
Garin
sortit de la tente, resta un long moment immobile dans l’entrée à regarder le
terrain, puis il avança d’un pas résolu.
Sa
première charge fut féroce, ses coups puissants obligeaient son adversaire à
reculer, mais celui-ci parvint à se rétablir. Les seuls bruits qu’on entendait
étaient ceux des épées. Au bout d’un moment, Garin taillada le bras du garçon
et l’étoffe de sa tunique rougit. Un rugissement parvint du bord du terrain.
Will n’avait jamais vu son ami combattre aussi bien. Garin se déplaçait avec
agilité, ses coups étaient précis et efficaces.
Il
para plusieurs bottes courtes et pivota légèrement sur ses jambes pour se
retrouver sur la gauche du garçon, qui dut se contorsionner pour contrer deux
allonges rapides comme l’éclair. Les feintes de Garin étaient déroutantes mais
son adversaire ne s’y laissa pas prendre et vint à sa rencontre. Ils se
tamponnèrent, Garin perdit l’équilibre et tomba à genoux. Tout en parant les
coups du sergent, il se remit debout et plaça plusieurs attaques. Tandis que
l’autre garçon reculait, Garin jeta un coup d’œil au banc des juges où Jacques
était en pleine conversation avec le maître d’Irlande.
Ses
gestes n’étaient plus aussi fluides qu’au début du combat, son poignet se
raidissait, ses allonges étaient plus lentes et ses parades sentaient
l’affolement. Will le
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