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Le livre du magicien

Le livre du magicien

Titel: Le livre du magicien Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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mots et des symboles, la texture du vélin – attestait que les deux exemplaires étaient parfaitement identiques. Craon, lui, avait été fort obligeant. En vérité ses réflexions avaient surpris non seulement le clerc, mais aussi ses collègues. Pourquoi, se demandait Corbett, se montrait-il si disposé à collaborer ?
    La discussion se poursuivit au moins une heure, parchemins et plumes à l’appui. Craon, comme un maître d’école, faisait le tour de la table, explicitant ce qu’avait entrepris Maître Thibault tout en reconnaissant ignorer comment il était parvenu à cette conclusion.
    La cloche du château sonna l’angélus de midi et ils s’interrompirent pour réciter la célèbre prière « L’ange du Seigneur a annoncé à Marie... » sous la direction de Sir Hugh qui nota, non sans amusement, que ceux qui se serraient autour de la table bafouillèrent en hâte les paroles pour retourner sans délai à leur débat.
    Le gouverneur annonça, peu après, qu’on leur servirait de quoi se restaurer dans la grand-salle, à l’étage au-dessous, et le magistrat ramena l’assemblée à l’objet de sa réunion. Lui et Craon en tombèrent d’accord : ils suspendraient la séance jusqu’à la fin de la journée pendant que Bolingbroke et Sanson compareraient les textes. Craon, fort volubile, entraîna le petit groupe dans le couloir vers la grand-salle. Corbett et Ranulf restèrent pour s’entretenir avec Sir Edmund. Le gouverneur ferma la porte derrière ses hôtes et, tirant le magistrat par la manche, le conduisit près de la cheminée en faisant signe à l’écuyer de se joindre à eux.
    — Il ne neige plus, dit-il à voix basse. Un colporteur est arrivé au château ; il venait de l’un des villages de la côte. Il a entendu des rumeurs : on aurait aperçu les pirates flamands bien plus près du rivage qu’à l’ordinaire.
    — Par ce temps ? s’étonna Corbett. La mer est grosse et peu de navires quitteront le port. Alors qu’attendent-ils ?
    — Il vaudrait mieux dire : qu’espèrent-ils ? rétorqua Ranulf.
    — Je suis inquiet, avoua Sir Edmund. Le château est bien fortifié et pourvu en hommes, mais, un jour ou l’autre, vous et les envoyés français devrez repartir. Imaginez, Sir Hugh, la disgrâce si vous ou Monsieur de Craon, sur terre ou en mer, tombiez dans une embuscade ou étiez capturés par les pirates flamands. J’entendrais hurler Édouard de Westminster jusqu’ici ; quant au courroux de Philippe de France, eh bien...
    Il frémit.
    — Mais il n’y a pas de réel danger, n’est-ce pas ? dit le magistrat. Les pirates sont en mer ; en quête de butin, d’un imprudent navire marchand ou d’un village sans protection où ils peuvent se réapprovisionner en viande fraîche puis se réfugier sur leurs bateaux.
    — Je sais, je sais, admit le gouverneur en hochant la tête. Vous êtes clerc, Sir Hugh, expert en affaires de chancellerie. Moi je suis soldat. Il est rare que des vauriens s’approchent autant en cette saison par si mauvais temps. Mais ils pourraient en tirer parti. Ils pourraient amarrer leurs vaisseaux aux équipages grouillant de forbans prêts à tout. S’ils venaient à terre, cela prendrait des jours, voire des semaines, avant qu’on puisse faire parvenir un message à Londres ou à l’un des cinq ports. J’ai pensé que je devais vous prévenir.
    Il fit un geste vers la porte.
    — Vous joindrez-vous à nous dans la grand-salle ?
    Corbett n’avait pas faim ; il présenta des excuses polies puis sortit, glissant et dérapant sur les pavés gelés, pour regagner sa chambre dans la tour du Sel. Il attendit devant le feu le retour de Ranulf et de Chanson et, pendant que le palefrenier montait la garde, il tenta d’ordonner les idées chaotiques qui lui encombraient l’esprit.
    — Je n’y comprends rien, Ranulf.
    Le clerc roux s’assit à une petite table et trempa sa plume dans l’encre réchauffée par le feu.
    — C’est comme de se retrouver dans la campagne quand la brume se lève, explicita le magistrat. Doit-on poursuivre son chemin ou attendre que le ciel s’éclaircisse ? Bon, faisons une liste des difficultés.
    Il se mit à marcher de long en large pendant que la plume de Ranulf, adoptant un chiffre qu’eux seuls pouvaient comprendre, grattait le vélin.
    Primo.
    — Pourquoi notre roi s’intéresse-t-il tant au manuscrit secret de frère Roger ? Qu’a-t-il découvert qui l’intrigue au plus haut

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