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Le loup des plaines

Le loup des plaines

Titel: Le loup des plaines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Conn Iggulden
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des
yeux.
    — Regarde-moi quand je te parle, ordonna-t-il, furieux.
    Arslan fit face à l’homme assis sur le trône de bois et de
cuir, sans dire un mot.
    — Comment êtes-vous entrés en possession des sabres que
vous portez ? demanda Eeluk.
    — C’est mon métier d’en fabriquer, seigneur. J’étais
autrefois le forgeron des Naïmans.
    — Ils t’ont banni ?
    Eeluk regrettait de s’être saoulé. Il avait l’esprit embrumé
et devinait cependant un danger chez cet homme au ton placide. Il y avait en
lui une économie de mouvement, une dureté sous-jacente que le khan reconnut. L’homme
était peut-être forgeron mais il était également guerrier. Son fils avait la
sveltesse d’un jeune cheval mais l’homme dangereux ici, ce n’était pas lui, et Eeluk
pouvait l’exclure de ses préoccupations.
    — J’ai quitté le khan des Naïmans après qu’il a pris ma
femme pour sienne, répondit Arslan.
    Eeluk se redressa soudain sur son siège.
    — J’ai entendu parler de cette histoire, dit-il en
fouillant sa mémoire. Tu es celui qui a défié le khan des Naïmans ? Le
parjure ?
    Arslan soupira au souvenir d’une souffrance ancienne.
    — C’était il y a longtemps et j’étais jeune, mais oui, c’est
exact. Le khan était un homme cruel. Après avoir accepté mon défi, il est
retourné dans sa yourte. Ensuite, nous nous sommes battus et je l’ai tué, mais
quand j’ai voulu reprendre mon épouse, je l’ai retrouvée égorgée. C’est une
vieille histoire, je n’y avais pas songé depuis des années.
    Arslan avait les yeux assombris de chagrin et Eeluk ne le
crut pas.
    — J’en ai même entendu parler dans le Sud, où l’air est
humide et chaud. Si tu es cet homme, tu es fort habile à faire des lames. Est-ce
vrai ?
    — On exagère toujours, répondit Arslan avec un
haussement d’épaules. Je l’ai peut-être été. Aujourd’hui mon fils me surpasse. J’ai
gardé mes soufflets, je peux construire une forge. Je suis encore capable de
fabriquer des armes de guerre. J’ai rencontré Yesugei alors qu’il chassait au
faucon. Comprenant l’intérêt d’un homme tel que moi pour les siens, il a
proposé de nous réintégrer dans une tribu, brisant ainsi la tradition…
    Il s’interrompit un instant, absorbé dans ses souvenirs.
    — J’étais seul et désespéré quand il m’a trouvé, reprit-il.
Un autre m’avait pris ma femme, je n’avais plus le goût de vivre. Yesugei m’a
offert un refuge chez les Loups si je parvenais à récupérer mon fils. C’était
un grand homme.
    — Je suis plus grand encore, affirma Eeluk, irrité d’entendre
faire l’éloge de Yesugei dans sa tente. Si tu es aussi habile que tu le
prétends, les Loups t’accueilleront avec honneur.
    Pendant un long moment, Arslan ne répondit pas et ne
détourna pas les yeux. La tension monta dans la yourte et Eeluk dut se
contrôler pour ne pas porter la main à la poignée de son sabre. L’oiseau rouge
redressa la tête sous son capuchon, comme si lui aussi sentait la nervosité de
son maître.
    — Je me suis engagé envers Yesugei et ses héritiers, dit
enfin Arslan.
    — Ne suis-je pas le khan ? Les Loups m’appartiennent
et tu leur as proposé tes services. Je vous accepte, toi et ton fils ; je
vous offrirai tente, viande, sel et sécurité.
    Le silence se fit de nouveau et devint si pesant qu’Eeluk
eut envie de jurer. Puis Arslan inclina la tête.
    — Tu nous fais grand honneur.
    — Alors c’est réglé, dit Eeluk. Tu arrives au moment où
j’ai besoin de bonnes armes. Ton fils pourra faire partie de mes guerriers s’il
est aussi habile à manier le sabre qu’à le fabriquer, comme tu l’assures. Nous
partirons en guerre avec des lames provenant de ta forge. Crois-moi quand je
dis que le moment est venu pour les Loups de s’élever encore.
     
     
    Dans l’obscurité poussiéreuse d’une tente neuve, Jelme se
tourna vers son père et demanda à voix basse :
    — Alors, nous restons ?
    Arslan secoua la tête. Conscient que des oreilles l’écoutaient
peut-être, il répondit dans un murmure :
    — Non. Cet homme qui se targue d’être khan n’est qu’un
chien jappeur et a les mains couvertes de sang. Me vois-tu servir le pendant du
khan des Naïmans ? Yesugei était un homme d’honneur, un homme que j’aurais
suivi sans regret. Il était tombé sur moi alors que je déterrais des oignons
avec un petit couteau. Il aurait pu me voler tout ce que j’avais. Il ne

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