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Le Lys Et La Pourpre

Le Lys Et La Pourpre

Titel: Le Lys Et La Pourpre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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le
premier : celui du marquis de Chalais. Tertio, la preuve
enfin : le message même de Monsieur porté par un chevaucheur.
    Le projet d’assassinat étant constant et prouvé, Richelieu
examina ensuite les méthodes dont il conviendrait d’user pour lui faire pièce.
Avec courtoisie et habileté il rendit compte de celles que Schomberg, mon père
et moi, nous avions proposées. Il conclut sur la sienne. Si Sa Majesté était
consentante, il irait voir Monsieur à son lever et tâcherait de l’amener à
composition.
    — Eh quoi, mon cousin ! s’écria le roi, très
alarmé, vous allez voir un prince qui, ce soir même, eût voulu fouler aux pieds
votre cadavre !
    — Sire, dit le cardinal, Votre Majesté ne peut ni
arrêter Monsieur, ni le reclure, ni lui faire un procès. La raison d’État s’y
oppose. Il est votre frère cadet et si la reine ne vous donne pas de dauphin,
il est, de plus, votre héritier présomptif. Dès lors, que peut faire Votre
Majesté, sinon tâcher de retourner Monsieur et, par là, le détourner de ses
mauvais conseillers, comme vous avez si bien commencé à faire en arrêtant le
maréchal d’Ornano ?
    — Mais, mon cousin, n’êtes-vous pas un peu effrayé à
l’idée d’aller vous fourrer dans ce nid de guêpes ?
    — Si suis-je, Votre Majesté, dit le cardinal avec un
sourire. Mais j’opine que Monsieur le sera bien davantage, quand il verra
surgir devant lui, par anticipation, le fantôme de son futur assassiné…
    — Et comment pensez-vous retourner Monsieur ?
    — Mais par des paroles aimables et douces, et aussi, si
vous me le permettez, Sire, en lui détaillant l’apanage que vous comptez lui
donner, s’il épouse Mademoiselle de Montpensier.
    — Je vous le permets, mon cousin, et je vous permets
aussi cette visite à Monsieur, si vous pensez qu’elle peut être fructueuse.
Cependant, j’aimerais que vous emmeniez avec vous, pour plus de sûreté, le
maréchal de Schomberg, le comte d’Orbieu et le capitaine du Hallier. Le marquis
de Siorac voudra bien demeurer avec moi. Sachant qu’il y a pris part,
j’aimerais qu’il me décrive cette fameuse bataille d’Ivry que mon père remporta
sur les ligueux.
    Il ajouta avec un soupir :
    — Chaque siècle a ses ligueux, je m’en aperçois tous
les jours…
    Pour Louis, ces quelques phrases étaient presque un discours
et soit que parler si longtemps l’eût fatigué, soit qu’il eût grand faim, il se
remit incontinent à son déjeuner et répondit d’un signe de tête à nos
génuflexions, mais sans plus piper mot.
    — Il est encore trop tôt, dit le cardinal dès que nous
fûmes hors les appartements royaux. Monsieur ne se réveille qu’à huit heures.
Monsieur le Maréchal, poursuivit-il en s’adressant à Schomberg, voulez-vous, de
grâce, me pardonner de vous laisser seul un petit instant en compagnie de Du
Hallier. J’ai un mot en particulier à dire au comte d’Orbieu.
    Il me prit alors le bras, s’éloigna de quelques pas dans la
galerie et toujours me tenant par le bras comme si j’étais son prisonnier, il
me dit à voix basse :
    — Comte, Charpentier me dit que le marquis de Chalais
vous aime du bon du cœur.
    — Éminence, dis-je avec un sourire, c’est vrai ce jour
d’hui. Ce n’était pas vrai hier. Et comment savoir si cela sera vrai
demain ? Chalais est une tête légère qui tourne à tous vents.
    — Toutefois, Comte, il m’a rendu un grand service en me
dénonçant l’embûche de ce dîner à l’italienne.
    — À mon sentiment, Éminence, c’est le commandeur de
Valençay qui l’y a contraint.
    — C’est bien possible. Et que Chalais soit girouettant,
babillard et brouillon, j’en conviens. Mais en mon présent prédicament, ces
défauts mêmes ne sont pour moi que qualités. S’il m’a rendu un grand service en
trahissant ses amis, il pourra m’en rendre un second, si nous le poussons un
peu. Vous observerez, Comte, qu’en politique, la première tentative ratée
d’assassinat n’est qu’un tremplin pour tenter un second essai, voire un
troisième. L’histoire nous l’enseigne ainsi. La reine Margot a tâché sans
succès d’empoisonner Henri de Navarre. Le couteau de Châtel n’a réussi qu’à lui
fendre la lèvre. Le couteau de Ravaillac était la troisième tentative et
hélas ! elle a succédé.
    — Éminence, est-ce à moi que vous pensez pour
« pousser un peu » Monsieur de Chalais de votre côté ?
    — C’est à vous,

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