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Le Lys Et La Pourpre

Le Lys Et La Pourpre

Titel: Le Lys Et La Pourpre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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le Comte, à votre âge, on ne mange pas son
rôt à la fumée.
    — Si ferai-je pourtant, m’amie. Le repos n’a jamais tué
personne.
     
    *
    * *
     
    Toinette partie, je me fis cette réflexion que la petitime
n’était pas étrangère, quoi qu’elle en eût dit, à la façon dont les chambrières
usaient ou n’usaient pas de leur devant, mais bien le rebours, qu’elle était
entrée avec elles dans une sorte de barguin où elle avait son intérêt. Sans
cela, m’eût-elle proposé « de la compagnie » ?
    Je n’en conçus pas plus d’estime pour cette chiche-face,
bien le rebours, et décidai de me tenir à carreau avec elle, car si elle était
capable de vendre le devant de ses chambrières, elle pouvait tout aussi bien
vendre les secrets de ses hôtes à qui s’y intéresserait assez pour y mettre le
prix. Ah ! m’apensai-je, l’autruche peinte sur l’enseigne de cette maison
a bien raison de cacher sa tête dans le sable, car si elle la retirait, elle
serait fort outrée du train que l’on mène céans.
    Je me jetai sur mon lit et glissai par degrés dans
l’ensommeillement quand on toqua à ma porte. Toquement qui, du coup, me fit
bondir sur pieds et saisir sur mon chevet mes deux pistolets. Après quoi, je me
dirigeai à pas feutrés vers mon huis et me plaçant non pas devant lui mais à
côté, le dos contre le mur, je dis d’une voix forte :
    — Qui est là ?
    — Monsieur le Comte, c’est Monsieur de Clérac qui
commande les mousquetaires de votre garde.
    — Monsieur de Clérac ! N’êtes-vous pas cet
excellentissime lieutenant qui m’escorta dans mon voyage à Nanteuil pour quérir
Monsieur de Schomberg ?
    — C’est moi-même.
    — Je suis charmé, Lieutenant, que vous me gardiez à
nouveau. Entrez, de grâce !
    Clérac pénétra alors dans la pièce mais comme l’huis, se
rabattant sur moi, me cacha, il ne me vit pas et je ne le vis pas davantage.
    — Monsieur de Clérac, dis-je, retournez-vous ! Je
suis là !
    Ce qu’il fit, et aussitôt que je vis son visage, je baissai
mes pistolets.
    — Monsieur le Comte, dit Clérac après un profond salut,
cet accueil est prudent, mais si vous me permettez une critique, il ne l’est
point tout à fait assez. Vous avez oublié de pousser le verrou de votre porte
et vous avez omis de clore les contrevents de votre fenêtre, lesquels ne sont
pas hors échelle. Monsieur le Comte, j’espère que ces remarques ne vous
offensent pas.
    — Point du tout ! Il est de votre devoir de les
faire et du mien de les retenir. Où logez-vous avec vos mousquetaires ?
    — À vos côtés. Monsieur de Schomberg a fort habilement
choisi nos chambres, une pour vous et deux pour nous. Comme vous savez, la
vôtre ouvre au fond du couloir et occupe toute la largeur de la maison. Nos
deux chambres la jouxtent perpendiculairement à dextre et à senestre tant est
qu’on ne peut atteindre votre porte sans passer devant les nôtres. Monsieur le
Comte, puis-je quérir de vous si vous allez recevoir des visites ?
    — En effet, j’ai invité le marquis de Chalais à dîner
avec moi sur le coup de onze heures.
    — Peux-je vous demander, Monsieur le Comte, si cet
entretien a un caractère amical ?
    — Il n’en aura que l’apparence. Il fait partie de ma
mission.
    — Il est donc de quelque conséquence.
    — Cela dépendra de son issue.
    — En ce cas, nous ferons bonne garde. Nous soupçonnons
céans une petite personne de mettre l’oreille aux serrures.
    — Si c’est celle que je crois, je n’en serais pas
étonné.
    — Pendant votre dîner, nous laisserons donc, quant à
nous, nos deux portes entrebâillées pour surveiller la vôtre. Monsieur le
Comte, avant de prendre congé de vous, j’aimerais clore vos contrevents.
    — Eh bien, je vais le faire avec vous, puisqu’il y a
deux fenêtres.
    — Monsieur le Comte, dit-il, tandis que nous nous
affairions chacun de son côté, avez-vous ouï parler d’Olphan de Gast ?
    — Je ne sais rien d’autre de lui que son nom.
    — C’était un favori d’Henri III. Encolérée qu’il
eût vilainement clabaudé sur ses amours, la reine Margot le fit assassiner. De
Gast se reposait dans une maison qu’il avait louée en Paris. L’huis était bien
clos mais l’assassin, trouvant une méchante chanlatte, l’appliqua contre le mur
et pénétra par la fenêtre. Il faisait très chaud et de Gast avait laissé la
fenêtre ouverte. Il fut, sans tant de façons, dagué sur

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