Le Maréchal Berthier
l'ensemble des deux états-majors, il se pencha plutôt sur celui de l'armée d'Italie, laissant en place le chef d'état-major de l'armée des Alpes, le général Piston avec qui il entretint d'excellents rapports.
La Convention et le Comité de salut public mal informés auraient désiré voir les deux armées du sud-est prendre l'offensive en direction de la Lombardie. Mais aussi bien Kellermann que Berthier considéraient que pour l'heure la chose était irréalisable. Ce dernier commença par organiser le service directeur de l'état-major général, y déterminant les secteurs des trois adjudants généraux sous ses ordres : Vignole fut chargé du mouvement des troupes, Franceschi de la correspondance générale et Wolf des reconnaissances. Il en aurait souhaité un quatrième et ne s'en voyant pas affecter nomma provisoirement un adjoint, Ballet et le mit à la tête de l'administration. Cette organisation, assez nouvelle mais qui allait faire école, était assez remarquable ; elle se révéla efficace.
En même temps il réclamait un état décadaire des moyens matériels dont disposaient les armées : vivres, munitions, fourrage, équipements, etc., réglait le travail d'un vaguemestre général chargé d'organiser la marche des colonnes et obligea les généraux de division, qui avaient tendance à faire cavalier seul, à communiquer entre eux et à se transmettre les renseignements en leur possession. Kellermann avait tout de suite compris qu'il était délicat pour Berthier, simple général de brigade, de donner des instructions impératives à des camarades plus élevés en grade ; aussi demanda-t-il pour lui une promotion. Le 13 juin 1795, il était nommé général de division, ce qui le mettait en position d'exercer pleinement ses prérogatives.
Le commandant en chef et son chef d'état-major savaient que leurs divisions étalées sur un front de près de cent cinquante lieues étaient faibles partout et ne se maintenaient que difficilement face à un ennemi qui, estimaient-ils, alignait trente-deux mille Autrichiens, cinquante mille Piémontais et quinze mille miliciens, soit quatre-vingt dix-sept mille hommes, et même si ces chiffres étaient fortement surévalués, l'adversaire n'en avait pas moins la supériorité numérique. Aussi au début de l'été prit-il l'offensive. Les Français réussirent à le contenir à peu près partout grâce au courage et à l'endurance des soldats qui devaient camper en pleine montagne et manquaient parfois de vivres. Kellermann est Berthier, constamment sous pression, devaient sans arrêt se rendre d'un point sensible à un autre. Berthier écrivit à son ami Clarke à la fin juin : « Depuis 6 jours, nous nous battons continuellement et je ne me suis pas couché. »
Dans le même temps, il demandait à Paris l'envoi de renforts. Pendant cette période, il acquit une connaissance très complète de la composition et de la situation de l'armée d'Italie ainsi que sur la manière dont elle devrait être utilisée. Enfin conscient des besoins du groupe d'armées du sud et pour être en mesure de prendre l'offensive, le ministère annonça à la fin de juillet l'envoi d'un renfort de 10 000 hommes venant de l'armée du Rhin et de 6 000 détachés de celle des Pyrénées qui n'en avait plus besoin puisque la paix venait d'être signée avec l'Espagne. Aussitôt après, sur ordre de Kellermann, Berthier fit effectuer une reconnaissance sur la ligne ennemie en Ligurie, là où il projetait de lancer une offensive. Mais, au début de septembre, le Comité de salut public, voyant que Kellermann continuait à demeurer sur la défensive, lui retira l'armée d'Italie et la confia à Scherer. Conscient du rôle qu'avait joué Berthier, il le maintint dans son poste de chef d'état-major de l'armée d'Italie. Seulement Kellermann, peu satisfait de ce changement et qui tenait toujours à avoir Berthier à ses côtés, s'arrangea pour le laisser aussi peu que possible à la disposition de Scherer et le rappela. Berthier devait trop à Kellermann pour ne pas s'incliner. Il ne put donc qu'assister en spectateur à l'offensive de Scherer qui vit surtout agir Masséna et se traduisit par la victoire de Loano que le général en chef de l'armée d'Italie ne sut pas exploiter. Dès ce moment, il demeura prudemment sur la défensive, demandant qu'on lui envoyât Berthier si on désirait qu'il bouge et qu'au demeurant, sa santé lui donnait du souci. Ce qui fit que le nouveau
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