Le Maréchal Jourdan
jusqu’à la fin de la
Restauration et même dans ses dernières années, sous le règne de Louis-Philippe,
quoiqu’il ait connu à partir de 1819 d’autres activités.
*
En 1815, la troisième fille des Jourdan avait épousé un officier général
qui devait entamer peu après une carrière politique. En 1817, Jourdan eut la joie de marier
l’avant-dernière de ses filles, Sophie, à un colonel
d’état-major ; mais cette union allait peu durer, car elle mourut en
couches en 1820. La dernière, Nina, fut demandée en mariage par un Italien, le marquis
Saporiti. Il est fort probable que cette alliance ait été organisée par la fille aînée des
Jourdan, la princesse de Leporano, qui, avec son mari, résidait à Naples. Ce fut à la fin de
l’année, malgré la mauvaise saison qui rendait précaire l’état des
routes, l’occasion d’un voyage en Italie du couple Jourdan, tant pour
assister à la noce que pour revoir leur fille aînée ainsi que leurs petits-enfants. Ce
déplacement eut lieu sans aucun faste particulier, Jourdan comprenant que les différents
souverains italiens se souciaient peu de voir, même pour des raisons purement familiales,
débarquer un personnage qui avait joué chez eux un rôle de proconsul de la France républicaine
puis napoléonienne.
Ce dernier mariage se termina très mal. Le couple ne s’entendit pas et Nina
Jourdan se fit enlever par un membre de la famille royale piémontaise avec qui elle vécut en
concubinage. Elle mourut en 1833, la même année que son père, sans avoir revu son mari ni sa
famille, et les Jourdan firent leur possible pour dissimuler sa conduite.
Une heureuse nouvelle attendait le maréchal à son retour en France, au prtitemps 1819. Le
6 mars, en effet, Louis XVIII, mettant un potit final à la bouderie entre lui
et Jourdan, venait de l’élever à la pairie en même temps que Davout, Mortier,
Moncey, Soult et Suchet. Le vieux Lefebvre, lui aussi de cette promotion, devait disparaître
l’année suivante.
Ces nouvelles fonctions, ces nouveaux honneurs allaient amener un
changement de mode de vie chez les Jourdan. Pair de France, le maréchal avait
l’titention de siéger cette fois à la chambre haute. Les pairs pouvaient se répartir
en trois groupes, car il est difficile de parler de parti au sens moderne du terme :
les ultras royalistes, inconditionnels prêts à voter les yeux fermés n’importe quel
texte présenté par le gouvernement ; de tendance diamétralement
opposée, les libéraux souhaitaient le renversement de la royauté et le retour
à une république dont ils n’arrivaient pas à définir la forme. Ils étaient donc par
principe opposés à tous les projets de loi, mais ils ne formaient dans l’ensemble
qu’une toute petite minorité sans influence réelle. Entre les deux, les pairs du
centre appelés doctrinaires se donnaient bien à tort le titre de libéraux. Ils étaient décidés
à discuter, amender et parfois rejeter les règlements soumis à leur approbation, mais sans pour
autant remettre en cause le système politique en place et la dynastie des Bourbons. Dans la
mesure où il fallait faire un choix d’opinion, ce fut à ce troisième groupe
qu’allèrent les préférences de Jourdan chez qui l’amour de la liberté
continuait à jouer un certain rôle. Alors que, durant toute l’année 1819, il
s’était contenté de siéger et d’écouter, il prit la parole en
mars 1820. C’était lorsque le gouvernement, après l’assassinat
du duc de Berry, entendait faire promulguer deux lois. L’une limitait la liberté
individuelle dans la mesure où elle autorisait la police à arrêter et à détenir sans jugement
tout individu simplement suspect de complot contre la sûreté de l’État ;
et l’autre rétablissait le régime de l’autorisation préalable ainsi que
la censure pour la presse. Le moment semblait bien choisi dans l’ambiance
d’horreur et de terreur qui régnait à la suite de l’attentat contre le
prince.
Fort habilement, Jourdan commença par rappeler sa fidélité au roi, à sa famille et à la
monarchie. Puis, il s’appliqua à démontrer que ces principes n’étaient
pas incompatibles, au contraire, avec la notion de liberté individuelle. Il exposa sa cratite
de voir les lois proposées entraîner, si on les appliquait, une agitation constante dans le
pays, puis, ayant
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