Le Maréchal Jourdan
profession libérale et sa grand-mère était
honorablement connue à Limoges. Il était parfaitement éduqué et savait tenir sa place dans un
cercle familial. Enfin, fait déterminant, mis en présence l’un de
l’autre, ils se plurent et ne tardèrent pas à se découvrir des goûts communs.
Leurs ambitions étaient modestes : s’établir à leur propre compte et
s’appliquer à y prospérer. Toutefois, conscient de tout ce qui les séparait et bien
que sollicité par son patron, il semble que Jourdan hésita longtemps avant de demander
officiellement l’autorisation de faire sa
cour à Jeanne Nicolas. Sa future belle-famille se montra plus empressée que lui. On avait enfin
l’occasion de marier l’« immariable » Jeanne. Et
puis toutes les qualités de Jourdan plaidaient en sa faveur. Mais ce ne fut qu’au
bout de trois ans, en 1787, que Jean-Baptiste se décida à sauter le pas. Son futur beau-père
l’agréa immédiatement et il fut convenu que le mariage se déroulerait
rapidement.
Il allait toutefois être retardé sans que les fiancés, à présent tous deux impatients, y
soient pour quelque chose. La grand-mère de Jourdan mourut le 29 décembre, peu de
jours avant la cérémonie. Mais les jeunes gens estimaient avoir assez attendu et, le
22 janvier 1788, Jean-Baptiste Jourdan épousa Jeanne Nicolas en
l’église Satit-Michel. Michel Avanturier, qui était le
véritable promoteur de cette union, servit de témoin au marié. Il avait
d’autant plus de mérite que dans cette affaire il perdait son meilleur
collaborateur.
Grâce à la dot de sa femme, Jourdan fut à même de créer sa propre entreprise. Après avoir
envisagé de monter un commerce de drap qui aurait été le concurrent de celui
d’Avanturier, il se tourna vers la mercerie, encore qu’au départ il
n’y connut rien. Mais cette activité aux facettes très variées et multiples pouvait
se révéler d’un excellent profit. Ce fut rapidement le cas et le magasin, situé rue
des Taules à Limoges, dans un quartier qui de nos jours n’existe plus, connut une
expansion immédiate. Jourdan, à son habitude, ne ménageait pas sa peine et se trouvait bien
secondé par sa femme. Assez rapidement il fut contratit d’embaucher plusieurs
employés. Le ménage menait une vie simple et heureuse. Dès l’année suivant leur
mariage, Jeanne mit au monde une première fille, suivie en 1791 par une seconde. Le couple
allait ainsi avoir cinq filles et un garçon qui malheureusement mourut en bas âge
Leur avenir semblait tout tracé et leur convenait parfaitement, d’autant que leur
affaire donnait satisfaction et qu’ils avaient été adoptés sans difficulté par la
moyenne bourgeoisie commerçante de Limoges. Sans qu’ils y aient été pour quoi que ce
soit, leur destin allait basculer.
*
Les événements politiques qui agitèrent Paris et même la France, en 1789, furent perçus avec
un certain recul à Limoges et leur retentissement y parvtit quelque peu atténué. Bien sûr, la
prise de la Bastille, la transformation des États Généraux en Assemblée constituante et les
journées d’octobre créèrent quelques surprises, d’autant que la ville et
même la province restaient calmes. Les Limougeauds étaient plus réformateurs en paroles
qu’en actes. D’ailleurs, les députés que la généralité avait envoyés aux
États généraux étaient des personnalités assez ternes et même effacées, ce qui peut paraître
curieux quand on se souvient à quel potit la noblesse et la bourgeoisie de Limoges
s’étaient passionnées pour les idées nouvelles. Un représentant de la noblesse, le
vicomte de Mirabeau, cousin du futur tribun et individu assez falot, était surtout connu pour
son embonpotit qui lui avait valu le surnom de « Mirabeau tonneau ».
Jourdan, pour sa part, ne joua aucun rôle dans l’agitation politique. Bien que
considéré comme un bon bourgeois, il était assez avisé pour ne pas se mettre en avant, en
raison de sa trop récente promotion sociale et du fait que, pour l’heure, seuls les
plus riches tenaient le haut du pavé et les leviers de commande de l’administration.
Mais, était-il capable de prendre la parole en public ? Il n’en savait
rien. Et puis son négoce absorbait trop de son temps pour qu’il en eût à consacrer à
la vie publique. Même dans les réunions de famille, où les
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