Le Maréchal Jourdan
favorable au bord de la rivière Alzette. Son gouverneur, le général
Bender, était décidé à se défendre jusqu’au bout de ses ressources. Il avait sous
ses ordres une garnison nombreuse et bien entraînée et une puissante artillerie (huit cents
pièces). Il ne put toutefois empêcher Moreaux, qui disposait d’un corps de siège de
trente mille hommes, de réaliser un investissement complet de la ville. Dès lors, à moins
qu’une armée de secours ne vînt le débloquer, il était condamné à plus ou moins long
terme.
Or, aucune tentative ne fut même esquissée par les Autrichiens pour
dégager Luxembourg, alors que Moreaux, puis, après la mort de celui-ci,
Hatry, qui le remplaça, poussaient les travaux et multipliaient les emplacements de batteries.
Bender résista tout de même jusqu’au mois de juin et finit par capituler le 7. Il
obttit les honneurs de la guerre et ses troupes furent reconduites jusqu’aux lignes
autrichiennes après avoir pris l’engagement de ne plus servir contre les Français
jusqu’au moment où un nombre équivalent de nos prisonniers auraient été libérés.
Le siège de Mayence s’annonçait comme beaucoup plus difficile. La ville était
située sur la rive droite du Rhin, donc assez facile à secourir. Jourdan chargea Kléber de
diriger l’opération. Il avait été le héros du siège de 1792 lorsque les Français
étaient non pas assiégeants mais assiégés. Aussi connaissait-il bien les fortifications de la
ville ainsi que le terrain alentour. La Convention et le Comité de salut public attachaient
beaucoup de prix à un succès en ce potit et ne ménageaient pas leurs louanges et leurs
encouragements à Kléber. Mais ils ne lui envoyaient aucun matériel et ne renforçaient pas son
parc de siège.
L’attaque contre Mayence commença assez tard, au début de l’automne
1795. Jourdan n’avait pas voulu mener en même temps l’investissement de
deux forteresses aussi importantes. Le corps qui avait assiégé Luxembourg fut donc envoyé
contre Mayence ; mais il manquait singulièrement de moyens après
l’opération « Luxembourg ». De plus, Kléber, qui devait
commander, était absent depuis février, ayant dû demander un congé pour soigner une maladie de
peau. Il n’était revenu qu’à la fin de l’été.
Préliminaire : il fallait traverser le Rhin ! L’affaire
s’effectua au clair de lune dans la nuit du 5 au 6 septembre et les
Autrichiens qui étaient pourtant tout proches ne firent aucun effort pour s’y
opposer. Ainsi Jourdan put faire passer sur des embarcations de toute nature (il
n’était pas question de lancer un pont) quatre divisions au complet.
Le siège de Mayence impliquait que les armées de Jourdan et de Pichegru franchiraient elles
aussi le Rhin, l’une en aval, l’autre en amont de la ville, et
opéreraient plus à l’est leur jonction pour jouer le rôle de corps
d’observation. Protégeant ainsi le corps de Kléber, les deux armées auraient pour
mission de s’opposer à toute tentative de secours de la part de Clerfayt ou de
Wurmser. Si Jourdan, qui descendait de Neuwied, remplit bien sa part du contrat, Pichegru, en
provenance de Mannheim, avança avec une sage lenteur et en arrivant à hauteur de Heidelberg se
heurta à l’armée de Clerfayt. Il avait largement les moyens de la refouler mais
n’essaya même pas et sans engager la moindre action se replia sur Mannheim. Du coup,
la situation de l’armée de Sambre et Meuse devenait délicate. À lui seul, Jourdan
n’avait pas les moyens de faire face aux forces combinées de Clerfayt et de Wurmser.
Sagement, il décida donc de se replier sur Neuwied et, de là, retraversa le Rhin.
Pendant ce temps, Kléber avait continué à pousser les travaux
d’investissement de Mayence. Il manquait toujours de moyens. Mais le Comité de salut
public, confiant dans son génie, lui écrivit de « discontinuer l’attaque
et de se résigner à une défense respectable » ; en d’autres
termes, à un blocus de la place. Furieux, Kléber, qui ne mâchait pas ses mots, envoya une
lettre au comité où il laissait éclater sa fureur : « Un blocus cela,
répondit-il, le blocus de mon cul ! »
D’ailleurs, la retraite de Jourdan allait le contraindre peu après à lever le
siège et à se replier lui aussi sur la rive gauche. Ce repli manqua de tourner au désastre.
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