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Le Maréchal Jourdan

Le Maréchal Jourdan

Titel: Le Maréchal Jourdan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric Hulot
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popularité demeurait aussi grande. Lorsque à ce moment fut mis en place le
     collège électoral pour l’élection de deux sénateurs, il fut d’emblée
     choisi comme président du collège. Cette désignation eut lieu en présence des autorités locales
     et des représentants du pouvoir central : maire, préfet, président de la cour
     d’appel, commandant de la place… et évêque. Du coup, la candidature
     annoncée de Jourdan prenait presque une allure officielle, encore que ce ne fut nullement le
     but recherché. Lors du vote, l’élection de Jourdan prit des airs de marche
     triomphale. Il recueillit cent trente-six voix sur cent quarante-deux votants. Le second siège
     nécessita trois tours de scrutin afin que le général Dalesme rassemblât le nombre de voix
     nécessaire pour former une majorité. Or, le vote des électeurs ne suffisait pas pour assurer
     une élection. Il devait être confirmé par un accord du premier consul. En pratique, il était
     assez rare qu’il le refusât mais, comme il tenait par-dessus tout à
     s’assurer de la docilité du Sénat, il rayait automatiquement quiconque en qui il
     croyait deviner un opposant. Cependant, malgré ces précautions, ce côté obséquieux du Sénat ne
     l’empêcherait pas de voter la déchéance de Napoléon, en 1814.
    Le 15 décembre 1803, Jourdan, pour clôturer la session, prononça devant le
     collège électoral un discours dont le véritable destinataire était le premier consul. Personne
     ne s’y trompa. Après quelques louanges et des remerciements aux habitants du
     Limousin, il conclut en manière d’avertissement : « Le
     matitien de la République est le premier de tous nos voeux ! »
     Un tonnerre d’applaudissements accueillit ces paroles. L’assemblée
     comprit qu’elle avait en lui un élu qui ne manquerait pas de faire savoir haut et
     clair au gouvernement la façon de penser des gens du Limousin !
    On a soutenu que ce discours était la preuve de l’incroyable maladresse dont
     Jourdan pouvait se rendre coupable, ayant provoqué involontairement Bonaparte par ce coup de
     semonce qui, d’une part, ne demandait qu’à donner satisfaction aux
     ambitions électorales de Jourdan, et qui, d’autre part, avait sans s’en
     cacher entamé la marche à l’Empire qui fut autoproclamé, le
     18 mai 1804. La provocation ne fait pas de doute. Mais était-elle volontaire
     ou non ? Il semble bien qu’il faille voir dans le geste de Jourdan une
     démarche délibérée. Pendant les quelques mois de son séjour à Paris, il avait assidûment
     fréquenté un certain nombre de ses amis qui, s’ils acceptaient comme lui le principe
     du Consulat, entendaient que Bonaparte s’en tînt là. Parmi eux, il y avait
     Bernadotte, Fouché, qui faisait à présent ouvertement de l’opposition, Brune,
     Gouvion-Satit-Cyr, Moreau, Talleyrand et même Jérôme et Lucien Bonaparte. Il est probable
     qu’ils suggérèrent que l’un d’entre eux
     – et Jourdan ne demandait pas mieux que d’être leur porte-parole
     s’il en avait l’occasion – fît savoir à Bonaparte
     quelles étaient les limites qu’ils souhaitaient ne pas le voir dépasser.
    Toujours est-il que le premier consul comprit et, surtout, saisit que
     l’avertissement n’était pas le fait de Jourdan tout seul. Mais, furieux
     de voir se dresser devant lui cet obstacle imprévu, il réagit avec sa brutalité ordinaire en
     refusant de ratifier la nomination de Jourdan en tant que sénateur. Toutefois, la notoriété et
     l’estime dont celui-ci continuait à jouir dans l’armée, surtout celle du
     Rhin, faisaient qu’il était difficile de l’écarter complètement. Par
     ailleurs, Bonaparte, s’il était contratit de l’employer, voulait que ce
     fût loin de lui, loin de Paris, là où il serait utile mais pas gênant. Le
     25 janvier 1804, il était nommé commandant en chef de l’armée
     d’Italie avec résidence à Milan, ce qui pouvait, à la rigueur, passer pour une
     manière de compensation.
    Il y arriva un mois plus tard, précédé par la réputation de s’être montré en
     Piémont un administrateur sage et pondéré, ayant laissé le meilleur des souvenirs aux Turinois.
     Il allait remplacer Murat qui partait sans donner beaucoup de regrets à la population.
     Celui-ci, autant pour satisfaire un penchant naturel que pour répondre aux recommandations de
     son beau-frère, qui conseillait à ses généraux en

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