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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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guise d’arme d’hast. Leur chef était vêtu d’un jaque jazequéné*. Sur son menton vivotait une barbiche jaune qui ressemblait à une poignée d’herbes sèches. Tous tournèrent la tête avec méfiance dans sa direction, puis s’en désintéressèrent. Il devina plus qu’il ne vit Hubert, qui ne cessait de répéter à l’un des hommes :
    — Je ne comprends pas. Comprends pas.
    L’un d’eux dit quelque chose à son voisin. Hubert n’en saisit pas davantage le sens.
    — Sam ? dit encore Thierry, que les hommes consentirent à laisser passer.
    Les deux hommes qui s’étaient parlé s’avancèrent d’un commun accord. L’un d’eux retint le cheval par la crinière tandis que l’autre forçait Sam, qui était monté à cru, à en descendre. Les deux hommes fouillèrent le gamin sans conviction et le poussèrent jusqu’au groupe. Sam entrevit du sang qui avait éclaboussé l’un des andains* dont le ramassage avait été brutalement interrompu. Une fourche gisait non loin de là. Celui qui avait l’air d’être le chef le regarda s’avancer, et ses lèvres lippues brillèrent de salive.
    — Saloperie de nigousse*, dit Aedan.
    L’Écossais était couché sur le dos, à même le foin qu’il avait fauché. Il tourna vers Sam un visage dont les joues habituellement vermeilles ressemblaient à du parchemin froissé auquel on se serait vainement efforcé de redonner l’aspect du neuf. Sa tête reposait sur les genoux d’Hubert. L’étoffe multicolore de son kilt était en train de disparaître sous une tache qui s’agrandissait et donnait au tissu une seule et même couleur sombre, sans éclat. On ne remarquait pas immédiatement les bulles de salive rougeâtre qui lui affleuraient aux lèvres. Hubert leva les yeux vers l’enfant et dit :
    — Dieu sait pourquoi il a commis l’imprudence de se porter au-devant d’eux pour les empêcher de passer. Ces fripouilles sont des Goddons* ou je ne sais quoi au juste. Ils doivent avoir débarqué à Calais (47) .
    En état de choc, Sam alla s’agenouiller auprès de son grand-père sans un mot et se mit à caresser ses longs cheveux couleur de paille. Une boucle s’accrocha à l’un de ses doigts, comme elles le faisaient toujours.
    —  Seanair* ?
    — C’est rien, c’est rien, petit. Allez, t’en fais pas, dit Aedan d’une voix faible.
    De voir ainsi couché en plein champ cet homme qui possédait la paisible prestance d’un bon cheval de labour avait quelque chose d’incongru pour Sam. C’était sûrement une erreur, il ne pouvait pas être blessé réellement. Dans un instant il allait pouvoir se relever. Il allait rentrer à la maison pour vider une chope et rire un bon coup de la frousse qu’il lui avait faite. Seanair* avait toujours été là, il avait toujours été tel que Sam l’avait connu. Rien ne pouvait arriver à seanair*.
    Les Anglais conversaient entre eux, indifférents, s’entretenant peut-être à propos de ce qu’il convenait de faire. Ils paraissaient un peu déconcertés par ce qui venait de se produire. Hormis les deux Écossais, aucun des paysans n’osait attirer leur attention, ne fût-ce que par un geste ou une toux malvenue. Peut-être n’attendaient-ils qu’un prétexte pour les tuer tous.
    —  Le saynewer. By saint Georges, where is the saynewer (48)  ? demanda impérativement l’un des Anglais dont la face de dogue luisait de sueur.
    — Bon Dieu, je n’ai pas la moindre idée de ce qu’il demande, dit Hubert.
    Aedan dit à son petit-fils :
    — Ils demandent à voir le seigneur. Non, mais, où se croient-ils, ces pauvres tarés ? À la Cour ? En tout cas, je les ai passablement dessoûlés, mon petit gars, ça c’est sûr. Laisse-moi te dire qu’y en a un qu’a eu le fondement percé à coups de fourche. Regarde-le un peu, c’est celui qui se frotte le cul.
    — C’est bien fait, dit Sam.
    — Par la boudiné ratatinée d’un petit vieux, je te jure que la prochaine fois qu’il va aller pisser, le potron* lui coulera de partout comme une passoire.
    Sam ne put s’empêcher de pouffer de rire.
    Un affreux bruit mat fit sursauter tout le monde, à l’exception d’Aedan qui avait tout vu. Les brigands se retournèrent à temps pour voir l’un des leurs s’écrouler face contre terre, la tempe fracassée. Derrière lui se tenait un géant armé d’une massole*.
    Des dagues ressortirent précipitamment des fourreaux et un assortiment d’armes furent pointées en

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