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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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ce qu’il venait de dire à l’intention des siens :
    — Il y a ici un autre homme qui requiert assistance.
    Avant qu’ils n’en eussent pris pleinement conscience, les bandits s’étaient déjà écartés du chemin de ce moine à la carrure sobre. Lionel s’accroupit aux côtés des deux Écossais.
    — Ça va, Aedan ?
    — Comme vous pouvez voir, je suis en pleine forme. Le moine se tourna vers Louis et l’appela :
    —  My son (62) .
    Un grand maigrichon siffla entre ses dents. Cela en fit ricaner quelques-uns. L’un des hommes dit au chef anglais :
    —  The nerve of those Franklins* (63)   !
    En guise de réponse, les bandits désarmèrent leur captif et l’encerclèrent de près. Son épée passa de main en main tandis que les hommes échangeaient à son propos des commentaires admiratifs, ainsi que des avis partagés sur la possibilité que son propriétaire fût sans doute plus fortuné qu’il ne le laissait paraître. L’un des jeunots tira la grande lame du fourreau et la tint à deux mains, pour s’amuser, dans la claire intention d’en frapper Louis aux jambes comme s’il était un arbre à abattre. Ils se mirent à plusieurs pour empêcher l’homme en noir de se dérober.
    Mais le père Lionel ne les laissa pas faire. Il vint se planter entre le bandit et Louis qui, surpris, cessa immédiatement de se débattre. Le bénédictin souriait et paraissait très sûr de lui. Il y avait là de quoi confondre quiconque le connaissait un tant soit peu.
    —  Move, Father (64) , intima James de Pipe qui se tenait à la gauche de Louis.
    —  No (65) .
    —  Move, or I’ll slit his throat right away (66) .
    —  No. You donte ouanne-te tou dou zat (67) .
    —  Want to bet that I do (68)  ?
    —  Plise, grante mi e moment so zat I canne connefaïde inne you. I bègue you (69) .
    —  Oh, all right. But be quick about it (70) .
    Tout sourire, avec pour l’Anglais le regard d’un complice, le moine alla chuchoter quelque chose de très bref à l’oreille de James de Pipe. Ce dernier éclata de rire et annonça :
    —  Hear this, old chaps : our saynewer is a hangman (71)  !
    Le petit secret du père Lionel changea tout : vouges* et fauchards s’éloignèrent de leur cible et furent brandis en l’air avec un tonnerre d’acclamations hilares. Plusieurs hommes s’approchèrent pour donner à un Louis stupéfait quelques tapes amicales sur la joue ou l’épaule et deux d’entre eux vinrent même lui serrer la main comme à un collègue. Chacun y allait de sa petite remarque qu’il essayait d’accrocher au vol. De son côté, le moine observait la scène avec le même amusement inexplicable.
    — Je constate que je ne suis pas le seul à apprécier les traits d’humour divins, dit-il.
    Louis lui demanda :
    — Que leur avez-vous dit ?
    Mais le père Lionel n’eut pas le temps de lui répondre qu’il avait compté sur l’aveu de ce détail pour éveiller chez les brigands un brin de sympathie à l’égard de cet autre paria qu’était le bourreau. James de Pipe s’approcha pour remettre à Louis son épée et poussa ce dernier avec une brusque camaraderie en direction des deux Escots* qui attendaient toujours. Les routiers firent cercle autour d’eux.
    Sans plus tarder, il alla s’accroupir auprès d’Aedan. Il souleva son vêtement de laine avec précaution. Il y avait une coupure d’au moins six pouces de long sur son flanc. Elle saignait abondamment. Tout autour, une grande ecchymose était en train de bleuir. Le souffle d’Aedan était court et crépitant. Louis ne mit qu’un instant à lui palper la cage thoracique.
    — Ça se rend aux côtes, hein ? lui demanda le vieil homme. Louis lui fit signe que oui. Il ne jeta qu’un bref coup d’œil à Sam qui attendait, les yeux rivés sur lui. Le garçon demanda, avec inquiétude :
    — Est-ce que ça se soigne ?
    — Je vais faire de mon mieux.
    Il regarda en direction du moine :
    — En premier lieu, il devient urgent de refermer cette plaie qui saigne trop. Trouvez-moi du crin et une alêne.
    Sa requête fut traduite et satisfaite avec une célérité qu’aucun otage n’eût osé espérer. Louis s’empressa de recoudre la blessure d’Aedan, qui serra bravement les mâchoires. Pendant ce temps, Thierry, Sam et Hubert firent ce qu’ils purent avec leurs vêtements et des arbrisseaux à partir desquels ils confectionnèrent un brancard grossier qui allait être utilisé pour transporter le

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