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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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qui la réclamaient à hauts cris. Tandis que le moine s’affairait à l’intérieur du petit bâtiment en pierre, les enfants s’assemblèrent dans la minuscule cour vaguement pavée qui vivotait derrière, coincée entre deux habitations.
    Malgré ses dimensions restreintes, c’était un endroit pittoresque et ils eurent tôt fait de le transformer en terrain d’aventure.
    — Mais Renaud, deux Perceval, ça ne se peut pas, dit la petite Morgane. De plus, on a besoin d’un Mordret.
    La fillette s’était donné un air de sorcière fort convaincant en se trempant les cheveux dans de la terre glaise mêlée d’eau, ce qui allait certainement plaire à sa mère.
    — Je n’aime pas Mordret. Je veux être un chevalier, dit le gamin, buté.
    — On pourrait faire une autre histoire avec des personnages différents, proposa Jehanne.
    La proposition fut accueillie par plusieurs voix enthousiastes.
    — Oui, bonne idée. À quoi on joue ?
    — À la guerre.
    — Non, à Tristan et Yseult.
    — À la princesse, comme toi, Jehanne. Et moi, je serai le prince. Pendant ce temps, Sam était arrivé à se défiler à l’insu de son cerbère qui était trop occupé avec les paysans pour avoir le temps de se soucier de lui. Il s’en alla traîner un moment en direction de l’église. Il avait envie de voir Jehanne et il savait où la trouver. Les enfants ne le dérangeaient pas. Au contraire, puisque leur présence à eux l’assurait que la jeune fille n’allait pas être accaparée par son insupportable bande d’amies.
    L’adolescent avisa, accroché à une branche d’arbre et probablement oublié, un floternel* noir qui appartenait à Louis. Il alla le chercher, tenté pendant une seconde de le rouler en boule et d’en frotter énergiquement la rue poussiéreuse avant d’y bouter le feu. Mais des voix d’enfants provenant de la petite cour dont la grille était ouverte attirèrent son attention. Surmontant son dégoût, il endossa le floternel* et se dirigea vers l’endroit où jacassaient les enfants. Il y en avait bien une douzaine là-dedans à graviter autour de sa belle demoiselle. Aucun ne se retourna à son arrivée, car il n’avait pas fait de bruit. Soudain, il les fit tous sursauter, y compris Jehanne, en fermant brutalement la lourde grille sur eux. Ils firent volte-face et restèrent un instant cois. Sam les dévisageait entre les barreaux d’un air grave.
    — Je suis insatisfait de votre labeur. Vous serez punis, dit-il d’une voix forcée vers la basse.
    Renaud ricana, mais l’influençable petite Berthe éclata en sanglots. Sam la toisa sans un mot. Sa silhouette mince engoncée dans le déguisement improvisé et beaucoup trop grand lui conférait un aspect encore plus rébarbatif.
    — D’accord, l’Escot*, tu l’ouvres, cette porte ? demanda un autre gamin.
    — Vous êtes mes prisonniers, dit Sam.
    — Ça suffit, Sam, dit Jehanne. Tu vois bien que Berthe te prend au sérieux !
    En effet, la fillette enfouissait son visage dans le vêtement poussiéreux de sa gardienne. Sam rit, ouvrit la porte et entra dans le « cachot » pour s’accroupir devant l’enfant en pleurs.
    — Voyons, petite tête de linotte, dit-il en lui caressant les cheveux, c’était une plaisanterie. Tu ne me reconnais pas ? Allez, calme-toi, maintenant.
    Il reprit, d’une grosse voix :
    — Je suis Baillehache, le seigneur de ce château, et vous êtes tous à ma merci !
    Cette fois-ci, Berthe sourit à travers ses larmes et se jeta dans les bras du prétendu seigneur.
    — Où as-tu trouvé ça ? demanda Jehanne en caressant la manche trop longue du floternel*.
    — Pendu à un arbre. Dommage, il n’y avait personne dedans.
    — Sam !
    — C’est une blague.
    Sam ramassa par terre un bâton dont il se fit une canne.
    — À genoux, manants ! Soumettez-vous à ma loi, dit-il en reprenant son personnage.
    Berthe obtempéra, mais Renaud aimait les preux chevaliers. Il croisa donc les bras et défia le seigneur d’un air insolent. Sam demanda :
    — Oserais-tu me désobéir ?
    — Je pense bien ! J’obéis pas à un méchant.
    — Eh ! maître Baillehache n’est pas méchant ! fit remarquer Jehanne.
    — C’est fort regrettable, dit Sam en prétendant abattre sa canne sur l’épaule du garçon.
    L’enfant hurla de douleur et chancela. Le seigneur le frappa dans le dos et dans les côtes, froidement, jusqu’à ce que le petit acteur, feignant de souffrir

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