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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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exagéré.
    Soudain, Jehanne, enveloppée seulement d’une grande touaille*, se précipita hors de la chambre et s’enferma dans la sienne, dont la porte claqua. Margot étouffa une exclamation scandalisée et Blandine, un rire.
    — Non, mais vraiment, cela devient une manie. C’est chaque fois la même chose. Comment se fait-il qu’elle ne pense pas d’avance à apporter tout ce dont elle a besoin ?
    Louis fit semblant de ne rien voir et piqua du nez dans son bol d’infusion, mais Lionel, qui était redescendu fouiller pour la troisième fois dans le panier de lessive, se rendit compte que le géant avait aux joues une petite rougeur gênée. Le moine demanda à voix haute, en pouffant de rire :
    — Eh, Jehanne, qu’as-tu oublié, cette fois ?
    Par l’entrebâillement de la porte, une main apparut. Elle brandissait un couvrechef* blanc orné de dentelle. Blandine et Lionel s’esclaffèrent.
    — Mon père, ne le faites donc pas exprès ! protesta la gouvernante, dont le visage avait tourné au rouge betterave. Vous, un homme de Dieu ! Et devant le maître, encore.
    — Quoi, qu’y a-t-il de drôle ? demanda la voix de Jehanne derrière la porte fermée.
    — Voyons, ma bonne Margot, ne te mets pas dans des états pareils. Je suis persuadé que notre ami, aussi pudique soit-il, a eu maintes et maintes fois l’occasion de voir d’assez près semblables échantillons de lingerie coquette, n’est-ce pas, mon fils ?
    — Pourquoi avez-vous ri ? Qu’est-ce qu’il y a ? redemanda la voix de Jehanne.
    — Il y a que tu as montré tes charmes à quelqu’un que tu n’attendais pas, répondit Lionel.
    — On est à confesse, là, ou quoi ? demanda Louis assez durement en ignorant la conversation à bâtons rompus.
    — Mais pas du tout. Nous bavardons, tout simplement, puisque votre dulcinée, comme toute créature céleste, sait se faire attendre.
    — Quelqu’un que je n’attendais pas ? Qui est-ce ? demanda encore la voix de Jehanne.
    Louis avala une autre gorgée de tisane, tandis que Lionel, ou plutôt sa voix, puisqu’il était retourné en haut, expliquait :
    — Je suppose qu’Hubert vous a mentionné la raison de ma requête. Une peccadille, en réalité, à laquelle j’aurais moi-même dû songer bien avant.
    Un petit objet, un livre, peut-être, tomba sur le plancher de l’étage avec un bruit mat. Le moine poursuivait :
    — Mais le besoin ne s’en était jamais fait sentir, j’ai fort bien pu me passer d’étagères. Dites, vous m’entendez ?
    — Oui, dit Louis.
    Au même instant, Jehanne sortait de la chambre en se peignant les cheveux. Elle avait renoncé à enfiler le couvrechef* dont les coutures s’étaient relâchées et c’était là l’excuse toute trouvée pour éviter de le mettre. À la vue de Louis qui se levait poliment, elle resta figée sur place. La voix de Lionel disait :
    — Ah bon. Je me posais la question parce que vous ne parliez pas.
    Blandine regarda Jehanne et pouffa de rire.
    — Vous êtes revenu !
    — Bonjour, dit Louis.
    Il trempa un bout de pain doré dans sa tisane et leva son bol à la santé de la jeune fille (118) , qui repensa soudain à son couvrechef*. Elle en rougit jusqu’à la racine des cheveux. Elle chercha à faire diversion et s’exclama :
    — Miam, du miel !
    Elle s’empressa d’aller soulever la cuiller en bois qui dépassait de la jarre et tira la langue afin de laisser couler dessus un long filet d’or.
    — Mais enfin, Jehanne ! Ce ne sont pas des manières, protesta Margot.
    Dans sa hâte, la jeune fille se prit une mèche de cheveux dans le miel de la cuiller. Le plus naturellement du monde, elle la décolla et se la fourra dans la bouche. Une lueur d’amusement passa dans les yeux de Louis, et Blandine rit de plus belle.
    — Si vous voulez bien m’excuser, je crois qu’il m’attend là-haut, dit le métayer.
    — Allez-y, allez-y, maître. Nous autres, on a deux mots à se dire, annonça Margot en jetant un regard en coin à Jehanne et à Blandine afin de les inviter à venir faire un tour dehors avec elle.
    Louis vida son reste d’infusion et se dirigea vers l’escalier abrupt. Lionel résolut la question des chaussons en se présentant en haut de l’escalier pieds nus. Louis vit donc deux rangées d’orteils effrontés s’arrêter au niveau de son visage alors qu’il achevait de gravir les marches.
    — Veuillez excuser cet accueil peu protocolaire, mon fils. Nous ne

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