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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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place devant elle.
    La jeune fille ne répondit pas et lui ne redemanda ce qui se passait qu’une fois le souper terminé :
    — Rien, pourquoi ?
    — Vous me paraissez fiévreuse.
    Effectivement, la jeune fille avait le feu aux joues et les yeux trop brillants. Perdue dans des pensées remplies par le regard vert et les boucles rousses de Sam, elle n’avait pas prêté attention à ce que son visage pouvait révéler. Elle dit, d’un air contrit :
    — J’ai… j’ai un peu couru sous la pluie cet après-midi.
    — Je vois.
    Avouer une telle chose à Louis ne contribuait qu’à rendre cette chose plus frivole encore. Mais cela ne sembla pas le déranger outre mesure.
    — Allons faire un tour. J’ai à vous parler d’un projet. Si on veut.
    — Oh, bien sûr !
    Ravie, elle prit sa capeline et passa un bliaud, car l’orage avait passablement rafraîchi le temps. Ils sortirent. D’un geste, il l’invita à marcher en direction de la vieille tour. Ils n’eurent pas à attendre longtemps pour se rendre compte qu’ils étaient suivis par deux autres promeneurs qui discutaient avec animation. Seul l’un d’entre eux ne souriait pas. C’étaient Sam et Toinot. Ce dernier passa près d’eux et leur jeta des coups d’œil goguenards. Louis les invita d’un signe à disparaître, ce qu’ils firent sans insister.
    — Quel genre de projet ? demanda Jehanne dont la curiosité avait fait en sorte que les ricanements et les regards en biais de Toinot n’avaient pas eu pour elle davantage d’importance que les premières feuilles abandonnées par les arbres.
    Pendant ce temps, Blandine tranchait une alléchante part de tarte aux pommes et l’apportait à Lionel.
    — Quelles délices cette demeure ne recèle-t-elle pas ! dit-il en admirant la pâte, feuilletée et dorée au jaune d’œuf, qui abritait de gros morceaux de pommes caramélisés au miel.
    — Me voici bien choyé. Ma fille, sache te montrer indulgente envers moi comme l’est le Seigneur et fais semblant de ne pas voir ce que je m’apprête à faire.
    Sur ce, il arrosa généreusement sa pâtisserie de crème fraîche et s’empara d’une petite cuiller en bois. Blandine éclata de rire et dit :
    — Je n’ai rien vu. Nos deux tourtereaux tardent fort à rentrer. Je me demande ce qui les retient.
    — Sans doute une escapade en forêt, comme il en survient parfois au détour d’un chemin, dit le moine dont la diction était passablement malmenée par sa gourmandise. Le bois n’a pas son pareil pour se rendre complice des amoureux.
    — Mon père !
    Mais elle se garda d’insister, car elle avait compris que le moine considérait la présence d’un chaperon comme une précaution désormais superflue.
    Ils étaient tous deux sortis sans se couvrir la tête, car Jehanne avait oublié sa capeline qui demeurait serrée dans sa main. Le couple passa quelques minutes à se laisser docilement conduire par le sentier. Après quoi Louis se retourna vers Jehanne. Une mèche de cheveux jalouse cherchait constamment à lui agacer les yeux.
    Il ne s’en soucia pas. D’une voix qui ne trahissait aucun inconfort, il dit :
    — Il faut que vous sachiez une chose.
    Elle lui sourit, l’invitant à poursuivre, et calma ses propres cheveux en les retenant derrière ses oreilles, où ils ne demeurèrent pas deux secondes.
    Mais Louis ne disait rien. Il regarda passer l’une des premières feuilles rouillées de la saison. Pour meubler le silence, Jehanne dit :
    — Il vente fort. Je devrais mettre ma capeline. Mais qu’importe. Je suis contente d’être là. Vous m’avez manqué, vous savez.
    — J’avais beaucoup de travail.
    Elle baissa la tête.
    — Vous avez toujours beaucoup de travail.
    Il s’éclaircit la gorge et regarda alentour en cherchant quoi répliquer.
    — Cette terre n’est pas fertile.
    — Les fruits qu’elle va produire seront abondants, mais ne se verront pas, dit Jehanne.
    — Pfft, on croirait entendre le moine.
    Jehanne posa les mains sur la poitrine de Louis et lui sourit à nouveau.
    — Il faut que vous sachiez une chose, répéta Louis.
    — Oui, je vous écoute.
    Louis regarda à terre et soupira en se passant la langue sur les lèvres. Il caressa distraitement l’aigrette d’un brin de blé qui avait poussé là par hasard. C’était si peu caractéristique de sa part que Jehanne, tout insouciante qu’elle fût, en demeura interloquée. Était-elle insouciante ?
    — Que voulez-vous

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