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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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toi.
    — Comment a-t-il su ?
    — Qui ça, le valet ? J’ignore de quoi tu parles. Enfin, bon, on ne va tout de même pas y passer la journée. Voilà. Je m’en allais tout bonnement te voir à l’œuvre et, lorsque je l’ai vue, elle, je l’ai interceptée pour savoir qui elle était. Tu comprends, elle m’intriguait, cette petite donzelle de haut rang qui se baladait comme ça en plein mauvais quartier, toute seule avec un garçon. Il me l’a présentée et m’a dit qu’ils te cherchaient. Je n’ai fait que les conduire jusqu’à toi.
    — Tu as fait ça ?
    — Bien sûr, le gamin ignorait tout du cadeau qu’il me faisait là. Enfin, j’en ai l’impression. En tout cas, j’ai vite fait d’en profiter, tu peux me croire. Une occasion comme celle-là, on ne la laisse pas filer, n’est-ce pas ?
    — Que je t’y prenne encore une fois à rôder autour d’elle.
    — Oh, ça va, arrête tes menaces, veux-tu ? Si ça peut te rassurer, je n’aurai même pas besoin de l’approcher. Il n’y a plus de risque de ce côté-là. Pauvre Jehanne ou je ne sais plus quoi. Parle-moi d’une petite innocente ! En plein ton genre, hein, mon beau Louis ? Espèce de vicieux. Mais ça ne marchera pas. Tu peux compter sur moi. Je te tiens et cette fois je saurai te briser.
    — Holà, c’est qu’elle croit me faire peur.
    — Oh que si, tu auras peur. Mais tu auras surtout mal. Très mal. Ça, je te le garantis. Et tu n’auras pas à attendre longtemps. Je te jette un sort.
    — Tiens donc, un sort ? Serais-tu une sorcière ? Moi qui croyais que tu n’en avais que l’allure.
    — J’en suis une. Souviens-toi de ce que j’ai déjà réussi à te faire à Saint-Sauveur. Là-bas, comme on dit, tu as monté comme un renard ; tu allais régner comme un lion ; mais tu mourras comme un chien (128) . Ils ont bien vite fait de se débarrasser de toi.
    — Tu n’as aucun mérite. Ces aristocrates sont des abrutis. C’est facile de les amener à faire n’importe quoi.
    — Avec ta petite bourrelle, ça sera pareil, sois-en sûr.
    Le rire qui commençait à monter de la gorge de Desdémone y resta pris. Détendant son bras gauche à la vitesse d’un serpent qui attaque, Louis saisit par la queue un gros rat qui venait de s’extraire d’un tas d’immondices comme s’il l’avait appelé.
    — Ah, tu veux jouer à ce jeu-là, hein ? Très bien. Voyons voir si tu t’y connais vraiment en sorcellerie.
    Il dégaina sa dague et s’approcha. Tenant alors la bête remuante juste à côté de Desdémone, à la hauteur de son visage, sur la palissade contre laquelle elle se terrait, il gronda, d’une voix terrible :
    — Par Belzébuth*, mon compère qui ne peut rien me refuser, je te maudis, toi, Desdémone la putain. Jusqu’à la fin de tes jours, tu seras à ma merci. Après, je te remettrai à la sienne. In secula seculorum, ego te suspendus per collum et maledictis inferno (129)  !
    Il libéra la queue du rat qui se débattait et couinait d’effroi et, alors que l’animal glissait le long de la palissade, il le cloua dessus à l’aide de sa dague. La violence du coup se répercuta dans tout le corps de Desdémone. Le plat de la lame et la fourrure du rat désormais immobile lui effleuraient la gorge. La main du bourreau demeura serrée sur le manche de son arme. L’insistance de son regard implanta la malédiction profondément dans son âme. Il menaça :
    — Si tu persistes à vouloir me nuire, je te dénonce pour hérésie, vermine. Ce sera ma parole contre la tienne. Nous savons déjà laquelle des deux pèsera le plus lourd. Ce que tu viens de me dire est suffisant pour que je puisse te faire remettre à la justice du roi. Cela et un tribunal de l’Inquisition, c’est du pareil au même. Je saurai bien faire en sorte que tu sois relapse.
    — Tu… tu ne parles pas sérieusement ? murmura-t-elle, terrorisée. Il se plaqua contre elle. Il dut baisser la tête pour continuer à la regarder dans les yeux et ajouta :
    — Tu peux compter là-dessus. Sais-tu ce que cela signifie, Desdémone ? Le bûcher. Tu me seras à nouveau remise (130) . Et je peux te promettre une chose : si on en vient là, je ferai en sorte de t’y faire durer aussi longtemps qu’il me sera humainement possible de le faire.
    Elle sentit son visage devenir aussi blanc qu’un linge. Le corps de Louis était chaud contre le sien. Déjà, il la brûlait.
    — Non, Louis, je t’en prie. Écoute.

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