Le mariage de la licorne
rassit dessus à califourchon et s’empara brutalement des deux poignets de sa femme, qu’il maintint croisés d’une seule main au-dessus de sa tête, sur les carreaux* qu’il eut la prévenance de replacer dessous. De sa main libre, il lui dégagea les épaules afin de poursuivre ses caresses.
— Oh, Louis, gémit Jehanne.
Il s’étendit sur elle et déposa sur sa peau une chaîne de petits baisers qui relia sa bouche à l’un de ses seins. Elle geignit lorsque Louis souffla dessus. Les lèvres minces, dures de l’homme effleurèrent son mamelon érigé et s’en emparèrent. Il le téta et tira dessus sans rudesse, avant de faire de même avec l’autre. Pendant ce temps, ses mains avaient retroussé la chemise ouverte vers ses bras pour caresser les hanches et les cuisses fermes. Et elle sentait les cheveux raides de Louis lui effleurer l’abdomen, et elle sentait les doigts rudes de Louis lui caresser les cuisses en remontant lentement.
Louis était satisfait et même un peu fier de ce qu’il avait accompli jusque-là. D’anciens souvenirs d’Églantine s’étaient hypocritement immiscés entre eux comme le vent l’avait fait précédemment : cela lui faisait inconsciemment adopter envers Jehanne les égards d’un amant au lieu de sa seule objectivité de physicien*. Sans lâcher le mamelon qu’il tétait toujours, Louis écarta un peu les jambes de Jehanne afin de caresser l’intérieur tiède de ses cuisses. Un effleurement eut l’air d’être accidentel, même s’il ne le fut pas.
— Oh !
Jehanne se raidit et chercha à se rasseoir.
— Tout va bien, dit-il.
Mais il la libéra et se rassit sur elle. Elle se souleva sur un coude et dit :
— Laissez-moi aussi vous plaire, Louis.
— Ceci me plaît.
— Pourquoi n’enlevez-vous pas votre chemise ? Pourrai-je voir votre… votre…
Elle chercha un mot convenable. N’en trouvant pas, elle demanda :
— Parce que c’est comme cela qu’on fait, non ?
— Laissez-moi faire.
Elle se mordilla les lèvres, mais osa quand même insister :
— J’aimerais sentir votre peau contre la mienne. Montrez-vous à moi, Louis. Je vous en prie.
Il suspendit tout geste mais ne la quitta pas des yeux. Il avait espéré ne pas avoir à en venir là dès la première nuit. Il craignait que cela n’aille tout compromettre.
— Mieux vaut ne pas trop me regarder. J’ai des blessures. Ce n’est pas beau à voir, dit-il.
— S’il vous plaît.
— Bon. Tant pis. Je vous aurai prévenue.
Son ton avait subitement changé et était redevenu sec, tel qu’elle le lui connaissait. Il se redressa et prit subtilement Jehanne en tenailles entre ses deux genoux. Il retira sa chemise de lin et défit son sous-vêtement qu’il laissa tomber à côté de lui sur le lit défait, exposant sa nudité sous la faible lueur du chaleil*. Son torse, ses bras et ses cuisses étaient striés de cicatrices, certaines pâles, d’autres sombres. La jeune femme examina les vestiges de la longue gale qui subsistait sur la plaie que lui avait infligée Sam. Elle avait emprisonné quelques poils qui tiraient un peu. D’autres poils foncés et clairsemés bouclaient sur la poitrine ample. Ils descendaient le long de l’estomac et de l’abdomen plat en se raréfiant jusqu’à ne former plus qu’une mince ligne qui s’en allait rejoindre la toison mystérieuse de l’aine où nichait le bourgeon dont la taille rendit la jeune femme anxieuse. Là aussi, il y avait une cicatrice. Une petite chose en relief dont le réseau veiné rappelait une toile d’araignée. Cette marque n’avait pas l’air aussi effrayant que bien d’autres qu’il avait par tout le corps.
— Oh, mon Dieu, dit Jehanne tout bas, la main sur la bouche.
— Pour votre gouverne, j’en ai autant dans le dos, dit-il avec amertume.
Il laissa le regard horrifié de sa femme parcourir son corps comme une injure, comme le signe avant-coureur du rejet. Il serra les mâchoires et demeura immobile, se tenant prêt, s’il le fallait, à abandonner ses bonnes résolutions et à la prendre de force. Mais les yeux de Jehanne s’emplirent de larmes. Elle s’assit à son tour et, d’un index timide, suivit le tracé d’une estafilade blanchâtre qui lui courait le long de l’épaule gauche. Surpris, il se laissa faire et suivit le doigt des yeux. Voilà qui était inattendu. Sans savoir pourquoi, il dit :
— J’ai été frappé à une joute. C’est l’une de mes trois
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