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Le mariage de la licorne

Le mariage de la licorne

Titel: Le mariage de la licorne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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j’aime malgré le fait que tu n’es pas un noble. Je suis sûre qu’il comprendra d’autant mieux qu’il ne l’est pas, lui non plus.
    — Et s’il ne veut pas comprendre, je me battrai en duel avec lui !
    Sam sauta en bas pour brandir un râteau à foin comme une épée et en pourfendre son rival invisible sous le regard affectueux de sa belle. Jehanne reprit :
    — Nous serons courtois, Sam, dit-elle d’un ton catégorique imitant celui d’un adulte.
    Elle se sentait fière de devenir le centre d’intérêt d’un personnage si important.
    — Il sera fort peiné lorsque je lui opposerai mon refus. Margot m’a dit d’être aimable et de ne plus rapporter de papillons à la maison.
    Elle soupira avec résignation.
    — Mais des vers pour la pêche, on le pourra ? demanda Sam.
    — Je le suppose. Margot dit que j’ai trop l’air d’une paysanne et que je lui déplairai.
    — Tant mieux ! Viens, allons jouer à la chevalerie.
    — Je ne peux pas, dit la fillette tristement. Margot veut prendre mes mesures pour me coudre une robe neuve.
    — Bah, elle ne s’est jamais donné la peine de t’en coudre une pour notre jeu, fit Sam, piteux.
    Il s’en retourna vers l’écurie, donnant des coups de pied à un caillou qui protesta en allant se perdre dans les ronces.
    — Attends-moi ! cria la fillette en le rejoignant avec le parchemin et la lampe qui s’était mise à fumer. J’ai une idée : faisons de tout cela une partie de notre jeu.
    — Hein ? Quoi ?
    — Mais oui. Écoute. Lui, il est le mystérieux Galahaad, beau et chaste comme un ange, qui s’inclinera devant ma volonté parce qu’il saura reconnaître en toi Perceval. Perceval, tout comme toi, n’est pas né chevalier. Il l’est devenu à force d’être preux.
    — C’est une bonne idée. Mais crois-tu qu’il aura envie de jouer, lui ?
    — Je ne sais pas. Mais qu’est-ce qui nous en empêche, nous ? Il n’en saura rien, puisque c’est notre jeu à nous.
    *
    Presque un an s’écoula avant que Louis, qui était de retour à sa petite maison rouge de Caen, n’entendît de nouveau parler du roi Charles. Sitôt de retour là-bas, il avait repris du service avec le zèle d’autrefois comme s’il n’y avait jamais eu d’interruption. Comme s’il ne s’était jamais fait appeler mon ami par un roi.
    L’ouvrage n’avait pas manqué. Il avait arpenté les rues de la ville pour massacrer rats et chiens errants, mais il avait pris soin d’épargner ses collègues ailés ou à quatre pattes, félins et charognards. Si ces derniers étaient utiles à la communauté pour leurs talents d’éboueurs, Louis avait de sa propre initiative décidé de ne pas tuer les chats, qui l’aidaient à dépouiller la ville de ses trop nombreux rongeurs.
    Bertine (26) , dite la Torsemanche, se faisait maintenant appeler dame ; par son zèle et sa nature généreuse, elle s’était acquis le cœur de sa maquerelle qui avait fini par lui léguer l’affaire. Sa maison était florissante. Elle n’avait pas oublié à qui elle devait d’avoir pu mener une vie normale.
    — Le moment est venu de me régler ta dette, lui avait dit son bienfaiteur en donnant une petite tape sur son bras réparé.
    — Je n’ai qu’une parole, maître. Ma maison est bien tenue et j’ai accumulé vos deniers hebdomadaires dans un coffret que je vous apporterai. Les comptes sont en ordre.
    — Bien.
    — À combien chiffrez-vous l’assistance médicale qui m’a permis de m’assurer une retraite dont je n’osais seulement rêver il y a encore si peu de temps ?
    — Il ne s’agit pas tout à fait d’argent mais d’une nouvelle pensionnaire que j’aurais à te confier.
    — Hum, voilà une requête un peu inhabituelle qui demande réflexion. C’est que, voyez-vous, je ne peux accepter la première venue sans de bonnes références. La réputation de ma maison, vous comprenez. Mais puisque ça vient de vous…
    — Je comprends. Assieds-toi… Bien. Non seulement ça vient de moi, c’est à moi. Mais je ne veux pas d’elle là où je m’en vais. Tu y trouveras ton compte, car, vois-tu, je crois que les frais qu’elle t’occasionnera te seront rendus à plus ou moins brève échéance.
    — Vraiment ? Puis-je savoir de quelle manière ?
    — C’est très simple : donne-lui l’ouvrage dont personne ne veut. Astreins-la aux tâches serviles et aux clients douteux. Ainsi, tes filles convenables se trouveront libérées de ces

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