Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Monstespan

Le Monstespan

Titel: Le Monstespan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Teulé
Vom Netzwerk:
maintenant bon que vous veniez par deçà et alliez
partout où vos affaires vous appelleront  – mais Louis-Henri n’entend
pas car il s’est évanoui.
    Le rugueux
Cartet aux moustaches en gardes de poignard (celui qui pendant le voyage
chantait de sa grosse voix qu’il avait un joli mari) soulève délicatement
l’époux d’Athénaïs entre ses mains plus fatales que des machines, plus fortes
que tout un cheval :
    — En
remontant vers le nord, je le laisserai dans son château de Bonnefont.

 
16.
     
     
    — Ah, mais
vous boitez maintenant, monsieur le marquis ? s’étonne Mme Larivière,
sortie de la cuisine du deuxième étage de la rue Taranne.
    Sur le palier,
elle s’essuie les mains contre son tablier tandis que Montespan commence à
grimper l’escalier sombre en se tenant à la rampe.
    — Et puis
vos épaules, vos bras, ont de drôles de formes, là..., s’inquiète la cuisinière
qui descend quelques marches.
    — Je
reviens d’une guerre, madame Larivière... Les bosses aux manches, ce sont les
amas de charpie à soldat par-dessus mes plaies, qui déforment les habits.
    — Votre
compagnie a-t-elle gagné la bataille, cette fois-ci ?
    — Ma
femme n’est pas là ? demande le mari, pénétrant en claudiquant dans le
salon du premier étage.
    — Je
croyais que c’était elle quand j’ai entendu la porte s’ouvrir en bas. Elle a
fait prévenir qu’elle passerait en coup de vent ce matin.
    Face à la
cheminée, la domestique Dorothée qui mettait des bûches à brûler en ce mois de
novembre se retourne et cherche quelqu’un autour du marquis :
    — Vous
n’avez pas ramené Marie-Christine ?
    — Non, je
l’ai laissée à Bonnefont avec ma mère et le maréchal des logis de ma compagnie
que j’ai embauché comme concierge. Il va avoir du travail car le château est
dans un état...
    Soudain un son
de clé dans une porte qu’on ouvre en bas et une voix qui tonne :
    — La
cuisinière, la domestique ! Mes affaires sont-elles prêtes ? Allez,
descendez-les de la chambre. Une voiture royale m’attend pour retourner à
Saint-Germain-en-Laye. Hop là ! Hop là !
    On entend un
bruit de paumes qui claquent pour activer les choses et un cliquetis de
bottines légères qui grimpent vite les marches. Athénaïs entre dans le salon en
retirant un manteau.
    Son mari la
découvre alors, ébahi, dans une robe très originale en mousseline de soie verte
ample et fluide qu’il ne lui avait jamais vu porter.
    — Madame
a inventé cette robe et l’a baptisée « l’Innocente »… Elle est du
dernier cri dans le Marais et aussi à la cour paraît-il, persifle la cuisinière
à qui la marquise jette un œil froncé.
    L’époux
amoureux contourne sa belle arborant « l’Innocente » ballante d’un
style nouveau. C’est comme une grande chemise d’homme qu’elle fait bouffer à la
ceinture basse, ce qui cache le ventre sur lequel Montespan pose ses paumes. Le
ventre est arrondi.
    — Oh,
vive Dieu ! Athénaïs, tu es encore ?...
    Mais
Louis-Henri fait aussitôt ses comptes. Parti pour les Pyrénées il y a onze
mois, cette grossesse avancée ne doit rien aux œuvres du mari :
    — Comment
est-ce possible ?
    « C’est
le signe du doigt de Dieu, l’œuvre du Saint Esprit », ricane la cuisinière
alors que le marquis demande à sa femme :
    — Qui est
le père ?
    — Louis-Henri,
je t’avais dit de ne pas me laisser près du roi... On ne peut rien refuser à Sa
Majesté.
    Dorothée
actionne un soufflet alors que Montespan croît sécher sur pied :
    — J’avais
reçu à Bonnefont une lettre anonyme qui m’apprenait que le roi avait quitté sa
favorite pour devenir ton amant. Je n’en croyais rien.
    — Les
maris sont les derniers à ouvrir les yeux sur la réalité de leur infortune,
explique la cuisinière sous sa coiffe à bavolet.
    — ... Je
me disais : ce pays regorge de bavards et de fanfarons toujours prêts à
salir la plus honnête épouse, et moi je ne suis pas prêt à donner aux potins
d’antichambre la majesté de l’Histoire...
    — La
façon brillante dont elle a aussi berné la reine montre chez elle un assez joli
pouvoir de fourberie, ose dire Mme Larivière d’Athénaïs qui lui réplique :
« Savez-vous bien qui je suis ? »
    — Oui. je
crois, Madame. N’est-ce pas vous qui avez acheté la charge de Mlle de La
Vallière ?
    — Sortez
de ce salon !
    La cuisinière
fait signe à Dorothée de venir aussi puis se penche

Weitere Kostenlose Bücher