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Le nazisme en questions

Le nazisme en questions

Titel: Le nazisme en questions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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refusaient à constater l’échec de l’assimilation-symbiose, la vanité de leurs espoirs et de leurs efforts. Abandonner leurs illusions les aurait réduits à en venir aux conclusions les plus pénibles. Pas seulement sur le plan abstrait, mais concernant la véritable naturede leur judéité et à propos même de l’existence physique des Juifs en Europe. Cela eût impliqué jusqu’à des décisions bouleversant le cours de leur vie quotidienne ; des conclusions que beaucoup n’avaient pas le courage de tirer et qui eussent signifié se couper de racines considérées comme puissantes et réelles, s’engager dans une nouvelle voie – déplaisante pour la plupart –, celle de l’expatriation, quelle que fût leur destination géographique.
    Qui plus est, les Juifs se voyaient membres à part entière de la société occidentale et adoptaient ses critères de perception et de jugement. Beaucoup de Juifs étaient intimement convaincus, comme bien d’autres Européens, que les nazis – membres de la société occidentale, après tout – s’« installeraient ». Aussi, entre 1933 et 1938, le taux d’émigration de l’Allemagne fut-il relativement faible.
    Quels qu’ils fussent, les comportements sociaux des Juifs contribuèrent à renforcer les attitudes de rejet et de passivité de ceux qui allaient être les spectateurs de la catastrophe. On sait combien les slogans antisémites du XIX e  siècle ont été alimentés par la forte implantation des Juifs dans l’essor et l’expansion du capitalisme moderne ; on sait le retentissement que connurent cette réalité et ces slogans après la Première Guerre mondiale. Mentionnons, à titre d’exemple, un seul cas, celui du rôle des Juifs dans l’économie de guerre allemande. Le problème se pose dès la nomination, au début du conflit, de deux magnats juifs de l’économie allemande, Walter Rathenau et Albert Ballin, l’un à la tête du « Service des matières premières » l’autre à celle de la « Société centrale d’achats ». Sous l’égide de ces deux organismes, de nombreuses sociétés commerciales se forment et lenombre de Juifs qui y travaillent ou qui les gèrent est considérable. Or, au fur et à mesure que croissent la misère et l’amertume par suite de la prolongation du conflit, des exemples de ce genre, enflés par la rumeur publique, s’incrustent dans les esprits… Il semble que le capitalisme juif exploite le pays au moment de sa plus grande détresse.
    Mais bien plus important encore serait le type du Juif révolutionnaire – et détracteur des valeurs établies. Ainsi, en Allemagne et en Autriche, les critiques les plus acerbes des valeurs les plus sacrées étaient juifs – Harden, Kraus, Tucholsky 19 – ; ils s’en prenaient aux valeurs culturelles reconnues, et jusqu’au mauvais usage de la langue allemande… Rien n’aurait pu davantage envenimer les plaies d’une société profondément blessée et en proie au sentiment que ses traditions les plus précieuses étaient en voie de désintégration brutale.
    Pour éviter des interprétations erronées de notre thèse, nous dirons ceci : quoi que les Juifs aient fait ou n’aient pas fait, ils n’auraient pu réduire l’antisémitisme en tant que tel ni contrer l’émergence de la forme meurtrière qu’il prit chez les nazis, sous l’effet d’un courant démentiel et d’une désintégration sociale croissante – deux facteurs totalement indépendants des Juifs. Toutefois, il n’est pas improbable que l’identification des Juifs à la révolution mondiale a facilité l’impact de la propagande nazie et a renforcé la tendance préexistante de la sociétéoccidentale à considérer les Juifs comme des éléments indésirables à exclure – quoi qu’il s’ensuive de cette exclusion. Mais l’une des raisons pour lesquelles une fraction de la société juive s’est tournée avec ardeur vers la révolution est, semble-t-il, qu’après avoir quitté le ghetto physiquement et spirituellement, ces Juifs n’ont pas trouvé de société non juive qui fût prête à les intégrer, à les accepter tels qu’ils étaient – au-delà des pleins droits de citoyenneté qui leur furent accordés. La dialectique de l’antisémitisme est implacable…
    En 1944, Hannah Arendt évoquait, à travers la « tradition paria », la totale étrangeté, la solitude du Juif ; elle citait cette phrase du Château de Kafka : le héros, symbole

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