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Le neuvième cercle

Le neuvième cercle

Titel: Le neuvième cercle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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petite église, perchée à l’extrémité du pays. Après avoir cherché longtemps un abri à travers ces ruines, nous allions partir quand nous avons trouvé une cave. L’entrée en était, en partie, obstruée. Nous l’avons dégagée et nous nous sommes allongés pour dormir à poings fermés.
    — Le lendemain : petit tour, prudemment, aux alentours. À 20 mètres au-dessus, sous un amas de planches, formidable découverte : un sac de 50 kilos de pommes de terre. Quel repas ! Pagès s’y entendait à merveille pour faire du feu, par n’importe quel temps, n’importe où. Nous avions bien chaud dans cette cave, mais il fallait, en permanence, rester allongés car la fumée séjournait à environ 70 centimètres du sol. Au bout de quatre jours, nous vint l’idée de gravir cette petite montagne et d’aller voir ce qui se passait dans l’église. En général, celles-ci étaient épargnées, la majorité des Oustachis, ennemis jurés des partisans, étant presque tous catholiques.
    — En rampant, nous avons escaladé cette montagne, épousant toutes les anfractuosités. Toutes les choses étaient cassées à l’intérieur, des troupes s’y étaient abritées. Dans un coin, nous avons trouvé un tas de linge que nous avions d’abord pris pour des chiffons. Il y avait là des tuniques blanches plissées du curé et d’enfants de chœur. Nous nous sommes empressés d’en prendre chacun deux et de les enfiler à même notre peau. Nous n’avions plus naturellement de maillot de corps, simplement les vêtements en ersatz du Loibl-Pass. Nous nous sentions bien propres. Le bon Dieu n’a pas dû nous en vouloir. Nous nous sommes un peu retapés pendant une bonne semaine dans cette cave.
    — C’est là que je proposais, quand nous déblayions la neige, de revenir. « Il nous faut partir d’ici et rejoindre cet endroit », leur répétai-je. « Jamais nous ne retrouverons le chemin par ce temps », disaient-ils.
    — Je ne cessais jusqu’au soir d’essayer de leur faire adopter mon projet. Rien n’y fit. Je pense qu’ils croyaient que j’étais devenu fou. « Alors, retournons dans l’étable d’où nous sommes partis ! » « C’est insensé, un mètre de neige, plus de trace. On va se perdre et crever en peu de temps, et l’ennemi, qu’en fais-tu ? » Ils étaient inébranlables. Moi aussi. Après un dernier appel à me suivre, je les ai salués et, à 10 heures du soir, je suis parti dans la tempête de neige, ma demi-couverture toujours sur la tête, avec ma pelle. Je savais de quel endroit nous avions débouché sur cette clairière. J’y suis parvenu et je m’enfonçai dans le bois. Je n’y voyais pas à 3 m. Très souvent, je me suis buté dans les arbres, dans les branches. Quelle nuit ! J’ai marché pendant cinq heures. Je rencontrais maintenant moins d’obstacles sur ma route et, finalement, je sortis du bois. O ! bonheur ! J’aperçus de toutes petites lumières en bas. À peine perceptibles. Je commençai une descente prudente, environ deux heures. Une grande maison détruite et les lumières là, à 100 mètres. Pour faire ces 100 mètres-là, je crois bien avoir mis une demi-heure. Quelle surprise ! J’étais à Cepovan dans la cour de l’étable. En dix minutes, j’étais allongé dans la mangeoire des vaches. Je crois que je me suis réveillé bien au chaud vers midi. Il y avait un Yougoslave un peu simplet mais brave, qui s’occupait des vaches. Il n’arrêtait pas de me parler. Je ne comprenais strictement rien. Il m’a ravitaillé gentiment en soupe. Je suis resté sans bouger pendant quarante-huit heures. Le troisième jour, j’ai décidé une petite inspection. Sorti de mon étable, j’aperçus deux hommes jeunes s’affairant autour d’un feu. Il y avait des gamelles : tout un attirail qui me fit penser que ça devait être la cuisine, la popote. Je distinguais maintenant les voix. C’était un mélange d’italien. De temps à autre un mot de français. Je les interpellais. C’étaient deux Niçois : Auguste Cognet et Sbicca. Ils étaient non loin de la frontière autrichienne, à Sélénice, pays de Selena. Ils ont rejoint les partisans ; avec ces deux camarades, à partir de cet instant nous ne nous sommes plus quittés. La Croatie, la Dalmatie, Split, Bari, Naples et Marseille en mai 1945.
    — Après un quart d’heure de conversation, j’appris de leur bouche une formidable nouvelle. Il y avait, à 2 kilomètres de

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