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Le pas d'armes de Bordeaux

Le pas d'armes de Bordeaux

Titel: Le pas d'armes de Bordeaux Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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la murmure à la Cour.
    – Le hardi ravisseur, c’était lui.
    Chandos émit un sifflement qui pouvait passer pour admiratif.
    – Je conçois, chevalier, qu’Édouard ne veuille point vous lâcher aisément !
    Le Borgne s’éloigna comme s’il craignait d’être contaminé – mais par quoi ? – en restant en présence d’un Français dont l’audace le confondait.
    – Il t’admire mais te trouve dangereux, ricana Calveley. S’il joute, il voudra te voir mort pour complaire à Édouard… et plus encore…
    Le géant roux s’abstint d’en dire davantage. À qui avait-il songé ? Pourquoi s’était-il gardé de nommer cette personne ?
    – Que de monde ! dit-il. Il y a des banquiers, des usuriers… ce qui revient au même. Il paraît qu’Édouard est résolu à vendre sa vaisselle d’or et d’argent pour licencier six mille sangsues des compagnies retour d’Espagne… Sitôt soldées, elles vont se ruer sur la France… Tu vois une fois libéré, tu devras les combattre. J’en suis marri pour toi.
    Aucun doute : Calveley paraissait sincère.
    – Guesclin s’en chargera… Tu verras que le roi versera sa rançon, ce qui permettra au prince d’Aquitaine de conserver sa vaisselle.
    L’affluence ne cessait point. Il y avait maintenant quatre soutanes, deux coules et des chevaliers qui, s’ils avaient renoncé au port de l’armure, s’étaient vêtus d’un gambison ou d’un haubergeon à manches courtes. Il y avait aussi des édiles reconnaissables à leur toquet de feutre, certains seuls, d’autres avec un compère. Ils se tenaient à l’écart des Anglais qui peut-être les avaient malmenés un jour. Non loin des chevaliers, des écuyers goddons échangeaient des paroles sèches ou enflammées tout en observant à l’entour les mouvements des visiteurs auxquels parfois ils donnaient un nom avant de confabuler encore et encore. Ils avaient gagné à Nâjera le droit de parler haut et ferme.
    – Ils sont tous là, dit Calveley. Presque tous : Oliver Buttesthorn, le putois ; Clisson-à-la-grande-goule qui boirait, s’il osait, le sang de ses ennemis trépassés ; le captal de Buch, les seigneurs de Lesparre, de Mussidan… Perducas d’Albret… Matthew de Gournay qui joute comme un dieu ou un diable… Le grand profanateur d’églises qu’est Robert Knolles… Sa passion est de faire démolir les clochers de façon qu’ils ressemblent à des mitres… On les appelle les mitres de Knolles… Je l’aime bien tout de même… Sais-tu qu’on nous dit cousins ? Mais ne sommes-nous pas avant tout frères d’armes ?
    William de Pakington, le dapifer du prince, allait lentement de groupe en groupe, de solitaire en solitaire, demandant qu’on déclinât son nom et l’objet de sa visite, intimant çà et là un peu de longanimité pour prier, ensuite, les impatients de revenir quelque autre jour, de bon matin de préférence.
    – Je prends les devants. Suis-moi, Tristan.
    Calveley aborda l’homme en robe pourpre, qu’il dominait de trois ou quatre têtes, et satisfit sa curiosité : il serait bref et le prince comptait sur sa proche visite.
    –  Soit, dit l’appariteur… Je ferai mon possible.
    Le géant se détournait vers Tristan quand un évêque l’interpella et le retint par la manche de son pourpoint. D’une secousse, Calveley fit tomber la dextre gantée de chevrotin violet.
    – Ah ! dit l’évêque, un gros homme au regard malicieux, on ne peut ouïr céans que des donneurs de conseils et quelques propos sur le roi Pèdre… Croyez-vous qu’il soit réinstallé pour longtemps sur son trône ?… Je n’en suis pas si sûr… Et vous ?
    – Nous nous sommes donné moult peine, monseigneur, et nous avons perdu des milliers d’hommes pour rien. Avant Nâjera, pendant Nâjera et après Nâjera. C’est une victoire qui ne me satisfait point… Le prince est de mon avis.
    Malgré son gros rire qui lui valait d’être soudainement regardé et réprouvé par une partie des visiteurs, Calveley restait secret. Il quitta le prélat pour aller saluer – Tristan sur ses talons – le captal de Buch.
    – Comment, Jean, va ton otage ?
    Il s’agissait, à l’évidence, de Bertrand Guesclin sur lequel Jean de Grailly avait une revanche à prendre depuis sa défaite à Cocherel et sa captivité dorée à Meaux.
    – Le Breton enrage et je le comprends. Moi-même, quand j’étais dans la geôle où ce bon Charles V m’avait

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