Le pays de la liberté
maîtresse. Silencieux, à la lueur des étoiles, ils regardèrent tous Mack et Lizzie grimper dans le chariot.
Mack fit claquer les rênes et dit : ´ Hop ! au pas ! ª
Les chevaux tirèrent, une secousse ébranla le chariot : ils partirent.
Arrivés à la grand-route, Mack fit prendre aux chevaux la direction de Fredericksburg. Lizzie se retourna. Les ouvriers, debout et muets, leur faisaient de grands gestes.
quelques instants plus tard, ils avaient disparu.
Lizzie regarda devant elle. Au loin, le jour se levait.
36
Matthew Murchman n'était pas en ville quand Jay et Lennox arrivèrent à
Williamsburg. Il serait peut-être de retour demain, dit son domestique. Jay griffonna un mot pour dire qu'il avait besoin de lui emprunter encore de l'argent et qu'il aimerait le voir le plus vite possible. Il repartit de fort méchante humeur. Ses affaires n'allaient vraiment pas et il avait h‚te de faire quelque chose pour en modifier le cours.
Le lendemain, pour tuer le temps, il alla jusqu'au Capitule. Dissoute l'an dernier par le gouverneur,
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l'Assemblée s'était réunie de nouveau après les élections. La Chambre des députés était une salle sombre et modeste, bordée de chaque côté de rangées de bancs, avec une sorte de guérite au milieu pour le président. Jay s'installa au fond, derrière une balustrade, au milieu d'une poignée d'autres spectateurs.
Il ne tarda pas à se rendre compte que la politique de la colonie était en pleine ébullition. La Virginie, la plus vieille colonie anglaise du continent, semblait prête à défier son souverain légitime.
Les députés discutaient de la dernière menace formulée par Westminster: le Parlement britannique prétendait que quiconque était accusé de trahison pourrait être contraint de revenir à Londres pour y être jugé en vertu d'une ordonnance qui remontait à Henry VIII.
L'animation était grande dans la salle. Jay regarda avec dégo˚t un respectable propriétaire terrien après l'autre se lever pour attaquer le roi. On finit par voter une résolution déclarant que l'ordonnance sur la trahison était contraire au droit qu'avait tout sujet britannique d'être jugé par ses pairs.
On passa ensuite aux récriminations bien connues sur le fait qu'on leur demandait de payer des impôts sans avoir droit à une seule voix au Parlement de Westminster. ´Pas d'impôt sans représentationª, répétaient-ils comme des perroquets. Cette fois, les députés allèrent plus loin que d'habitude et affirmèrent leur volonté de coopérer avec les autres assemblées coloniales pour s'opposer aux exigences royales.
Jay était certain que le gouverneur ne pourrait pas laisser passer cela et il ne se trompait pas. Juste avant le dîner, alors que les députés abordaient un problème local de moindre importance, l'huissier interrompit les débats pour lancer: ´Monsieur le Président, un message du gouverneur. ª
II tendit une feuille de papier au secrétaire qui la lut: ´Monsieur le Président, le gouverneur ordonne
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la convocation immédiate de tous les députés dans la chambre du Conseil. ª
Cette fois-ci, ça ne va pas bien pour eux, songea Jay avec satisfaction.
Il suivit les députés qui grimpèrent l'escalier et s'engagèrent dans le couloir. Les spectateurs étaient debout dans le hall, devant la chambre du Conseil et regardaient par les portes ouvertes. Le gouverneur Botetourt, la vivante incarnation de la main de fer dans un gant de velours, était assis au bout d'une table ovale. Il fut très bref: Ón m'a mis au courant de vos résolutions, déclara-t-il. Vous m'avez mis dans l'obligation de vous dissoudre. Je déclare donc l'Assemblée dissoute. ª
II y eut un silence stupéfait.
Će sera toutª, ajouta-t-il d'un ton impatient.
Jay dissimula sa joie tandis que les députés sortaient lentement de la salle. Ils ramassèrent leurs papiers au passage et, par petits groupes, passèrent dans la cour.
Il se rendit à la taverne Raleigh et s'installa au bar. Il commanda son repas de midi tout en flirtant avec une serveuse. Il fut surpris de voir passer un grand nombre de députés, qui allaient s'engouffrer dans une des salles plus grandes au fond de l'établissement. Il se demanda s'ils complotaient quelque autre trahison.
quand il eut terminé, il alla voir ce qui se passait.
Il avait deviné juste : les députés étaient en plein débat. Ils ne cherchaient même pas à dissimuler leur sédition. Ils étaient aveuglément
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