Le pays des grottes sacrées
dispensa Son amour, le fils crût en force,
Mûrit bientôt et ne fut plus enfant.
Son fils grandissait, il Lui échappait.
Toute la grotte semblait
reprendre le Chant avec Celle Qui Était la Première, les formes arrondies et
les arêtes vives de la roche causant un léger retard et modifiant le ton, si
bien que ce qui leur revenait aux oreilles était une fugue d’une harmonie
étrangement belle.
Bien qu’Ayla ne distinguât pas
tous les mots, certains vers la faisaient réfléchir et elle avait le sentiment
que si elle venait un jour à se perdre elle entendrait cette voix presque
n’importe où. Elle baissa les yeux vers Jonayla, qui semblait écouter
attentivement elle aussi. Jondalar et Loup paraissaient aussi captivés qu’elle.
Le pâle ami lutta de toutes ses forces,
Le combat était âpre, la bataille acharnée.
Sa vigilance déclina, il ferma son grand œil.
Le noir l’enveloppa, lui vola sa lumière.
Du pâle ami exténué, la lumière expirait.
Quand les ténèbres furent totales, Elle s’éveilla avec
un cri.
Le vide obscur cachait la lumière du ciel.
Elle se jeta dans la mêlée, fit tant et si bien
Qu’elle arracha Son ami à l’obscurité.
Mais de la nuit le visage terrible gardait Son fils
invisible.
Les lugubres ténèbres s’accrochaient à l’éclat du
fils,
La Mère ripostait, refusait de reculer.
Le tourbillon tirait, Elle ne lâchait pas.
Il n’y avait ni vainqueur ni vaincu.
Elle repoussait l’obscurité mais Son fils demeurait
prisonnier.
La Grande Mère vivait la peine au cœur
Qu’Elle et Son fils soient à jamais séparés.
Se languissant de Son enfant perdu,
Elle puisa une ardeur nouvelle de Sa force de vie.
Elle ne pouvait se résigner à la perte du fils adoré.
Ayla pleurait toujours à ce
passage du Chant. Elle connaissait la douleur de perdre un enfant. Comme Doni,
elle avait un fils encore en vie dont elle resterait à jamais séparée. Elle
serra Jonayla contre elle. Ce nouvel enfant la comblait, mais le premier lui
manquerait toujours.
Avec un grondement de tonnerre, Ses montagnes se
fendirent.
Et par la caverne qui s’ouvrit dessous
Elle fut de nouveau mère,
Donnant vie à toutes les créatures de la Terre.
De la Mère esseulée, d’autres enfants étaient nés.
Chaque enfant était différent, certains petits,
d’autres grands.
Certains marchaient, d’autres volaient, certains
nageaient, d’autres rampaient,
Mais chaque forme était parfaite, chaque esprit
complet.
Chacun était un modèle qu’on pouvait répéter.
La Mère le voulait, la Terre verte se peuplait.
Les oiseaux, les poissons, les autres animaux,
Tous restèrent cette fois auprès de l’Éplorée.
Chacun d’eux vivait là où il était né
Et partageait le domaine de la Mère.
Près d’Elle ils demeuraient, aucun ne s’enfuyait.
Ayla et Jondalar parcoururent
tous deux la grotte des yeux et leurs regards se croisèrent. C’était à n’en pas
douter un lieu sacré. Ils ne s’étaient jamais trouvés dans une caverne aussi
grande et ils comprirent mieux tout à coup le sens du Chant des Origines. Il y
avait d’autres grottes sacrées mais celle-ci devait être une de celles par
lesquelles Doni engendrait la vie. Ils avaient l’impression de se trouver dans
les entrailles de la Terre.
Ils étaient Ses enfants, ils La remplissaient de
fierté
Mais ils sapaient la force de vie qu’Elle portait en
Elle.
Il Lui en restait cependant assez pour une dernière
création,
Un enfant qui saurait respecter et apprendrait à
protéger.
Première Femme naquit adulte et bien formée,
Elle reçut les Dons qu’il fallait pour survivre.
La Vie fut le premier et comme la Terre Mère
Elle s’éveilla à elle-même en en sachant le prix.
Première Femme était née, première de sa lignée.
Vinrent ensuite le Don de Perception, d’apprendre,
Le désir de connaître, le Don de Discernement.
Première Femme reçut le savoir qui l’aiderait à vivre
Et qu’elle transmettrait à ses semblables.
Première Femme saurait comment apprendre, comment
croître.
La Mère avait presque épuisé Sa force vitale.
Pour transmettre l’Esprit de la Vie,
Elle fit en sorte que tous Ses enfants procréent,
Et Première Femme reçut aussi le Don d’Enfanter.
Mais Première Femme était seule, elle était la seule.
La Mère se rappela Sa propre solitude,
L’amour de Son ami, sa présence caressante.
Avec
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