Le pays des grottes sacrées
la seconde méthode,
le pouce replié signifie trente mais lorsqu’on retient trente-cinq, on ne garde
pas le pouce baissé, on replie seulement le doigt suivant. Pour quarante, on
replie le doigt du milieu, pour quarante-cinq le suivant. Pour cinquante, seul
le petit doigt de la main droite est replié, tous les autres doigts des deux
mains sont tendus. On utilise quelquefois la main droite seulement avec les
doigts repliés pour montrer ces mots à compter élevés. On peut même montrer des
mots à compter plus élevés encore en repliant plus d’un doigt.
Ayla avait du mal à replier
uniquement le petit doigt et à garder cette position. Manifestement, les autres
avaient plus d’entraînement qu’elle mais elle n’avait aucune difficulté à
comprendre. Voyant l’expression étonnée et ravie de son acolyte, la Première
hocha la tête. C’est une bonne façon de la garder impliquée, pensa-t-elle.
— On peut marquer
l’empreinte d’une main sur une surface dure comme un morceau de bois, la paroi
d’une grotte ou même le bord d’un ruisseau, poursuivait la Zelandoni de la
Deuxième Caverne. Une empreinte de main peut signifier un mot à compter ou
quelque chose de totalement différent. Si vous voulez laisser cette empreinte,
vous pouvez tremper votre main dans la couleur et l’appuyer, ou bien placer
votre main sur une surface et souffler de la couleur dessus, ce qui donne une
autre sorte d’empreinte. Si vous voulez signifier des mots à compter, trempez
la main dans la couleur pour les plus bas, soufflez la couleur sur le dos de
votre main pour les plus élevés. Une Caverne qui vit au sud-est d’ici laisse
une marque de couleur en utilisant uniquement la paume, sans les doigts.
Ayla était transportée par l’idée
de compter. Creb, le plus grand Mog-ur du Clan, parvenait à grand-peine à
compter jusqu’à vingt. Elle, elle pouvait compter jusqu’à vingt-cinq et
représenter ce nombre avec deux mains seulement, d’une manière que d’autres
comprenaient, et aller plus loin encore. On pouvait montrer à quelqu’un combien
de cerfs s’étaient rassemblés sur leur lieu de vêlage de printemps, combien de
jeunes étaient nés : cinq, huit, vingt-cinq. Ce devait être plus difficile
de compter tout un troupeau, mais tout pouvait être communiqué. Combien de
morceaux de viande conserver pour permettre à tant de gens de survivre pendant
l’hiver. Combien de cordes de racines séchées, combien de paniers de noisettes.
Combien de jours pour se rendre au lieu de la Réunion d’Été, combien de
participants. Les possibilités étaient incroyables. Les mots à compter avaient
une importance extraordinaire, à la fois matérielle et symbolique.
Celle Qui Était la Première
reprit la parole et Ayla dut s’arracher à ses réflexions.
— Cinq est un mot à compter
important en soi, disait-elle. Il est le nombre de doigts de chaque main et
d’orteils de chaque pied, naturellement, mais ce n’est que son sens
superficiel. Cinq est aussi le mot à compter sacré de la Mère, nos mains et nos
pieds ne font que nous le rappeler. La pomme aussi nous le rappelle.
La Première leur montra une
petite pomme encore dure.
— Si vous la tenez sur le
côté et que vous la coupez en deux…
Elle le fit.
— … vous constatez que
la disposition des pépins la divise en cinq parties. Voilà pourquoi la pomme
est le fruit sacré de la Mère.
Elle tendit une des moitiés à
Ayla pour qu’elle l’examine et poursuivit :
— Le mot à compter cinq a
d’autres aspects importants. Comme vous l’apprendrez, on peut voir chaque année
dans le ciel cinq étoiles qui se déplacent au hasard, et il y a cinq
saisons : le printemps, l’été, l’automne et les deux saisons
froides : le début et la fin de l’hiver. La plupart des gens pensent que
l’année commence par le printemps, quand la végétation se remet à pousser, mais
la Zelandonia sait que le début de l’année est marqué par le jour court de
l’hiver qui sépare sa première et sa deuxième partie. L’année commence en fait
par la fin de l’hiver, puis viennent le printemps, l’été, l’automne et le début
de l’hiver…
— Les Mamutoï comptent aussi
cinq saisons, intervint Ayla. À vrai dire trois saisons principales – printemps,
été, hiver – et deux saisons mineures : automne et milieu de
l’hiver, qu’on devrait peut-être appeler fin de l’hiver.
Plusieurs des autres acolytes
furent
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