Le pays des grottes sacrées
de Whinney,
puis arrima le panier de ciguë par-dessus. Elle siffla Loup, puis repartit vers
l’amont, pressée de rentrer. En arrivant à l’endroit où la rivière était
limpide, elle s’arrêta pour remplir son outre. Puis elle aperçut le lit à sec
d’un affluent saisonnier, où les eaux devaient dévaler au moment des pluies.
Les galets arrondis et lisses qui en jonchaient le fond étaient parfaits ;
elle en choisit soigneusement quelques-uns et en remplit le petit sac pour sa
fronde.
Elle se trouvait près d’un
bouquet de pins et remarqua des petits monticules qui soulevaient la couche
d’aiguilles et de brindilles sous les arbres. Elle les écarta, découvrit des
champignons de pin beige rosé et en ramassa jusqu’à en avoir un joli tas.
C’étaient de bons champignons, à la chair blanche et ferme, à l’odeur et au
goût agréables, légèrement épicés, mais connus de peu de monde. Elle en remplit
un troisième panier. Puis elle monta sur Whinney, siffla Loup et repartit en
poussant la jument au galop pendant une partie du trajet. À son arrivée, tous
étaient en train de préparer ou de prendre leur repas du matin. Elle se rendit
directement au pavillon des Zelandonia et y entra avec deux de ses paniers.
Seules les deux « Premières » étaient là.
— As-tu trouvé ce que tu
cherchais ? demanda Celle Qui Était la Première.
— Oui. Voici quelques bons
champignons de pin à la saveur assez inhabituelle que j’aime beaucoup, répondit
Ayla avant de leur montrer le panier de ciguë : Ça, je ne l’ai jamais
goûté.
— Heureusement. J’espère que
tu ne le feras jamais.
— Dehors, dans le panier de
Whinney, il y a de la berle. J’ai pris garde à ne pas les mélanger.
— Je vais la donner à ceux
qui font la cuisine, répondit Zelandoni Première, plus grande et mince que sa
consœur. Si elle n’est pas bien cuite, elle risque de ne pas avoir bon goût.
Elle observa Ayla un moment.
— Tout cela te met mal à
l’aise, n’est-ce pas ?
— Oui. Je n’ai jamais
ramassé délibérément une plante que je sais être nocive, sachant surtout
qu’elle est destinée à être mangée.
— Mais tu sais que si on le
laisse vivre, il fera encore du mal.
— Oui, je le sais, mais ça
me contrarie quand même.
— Ça ne devrait pas, dit la
Première. Tu rends service aux nôtres et tu en assumes la responsabilité. C’est
un sacrifice, une Zelandoni doit en faire parfois.
— Je vais m’assurer qu’elle
sera servie à ceux qui doivent la manger, annonça Zelandoni Première. C’est le
sacrifice que je dois consentir. Ce sont mes gens et il leur a fait assez de
mal comme ça.
— Et ses hommes ?
s’enquit la Première.
— L’un d’eux, Gahaynar,
demande ce qu’il peut faire pour réparer ses torts, répondit Zelandoni
Première. Il dit qu’il regrette. J’ignore s’il tente d’échapper ainsi au
châtiment qu’il sait imminent ou s’il est sincère. Je crois que je vais laisser
la Mère en décider. S’il ne mange pas la racine et vit, je le laisserai partir.
Si Balderan ne la mange pas et vit lui aussi, j’ai déjà parlé avec plusieurs
personnes auxquelles il a nui personnellement et qui sont impatientes de le voir
payer pour ses forfaits. Si nécessaire, je le leur livrerai, mais je
préférerais la manière plus douce.
Quand Zelandoni Première alla
chercher la ciguë, elle aperçut une ondulation sous le panier. Elle le souleva
d’un geste rapide. Dessous se trouvait un serpent, un serpent extraordinaire.
— Regardez ça !
s’exclama-t-elle.
Ayla et la Première regardèrent
et en eurent le souffle coupé. C’était un petit serpent, sans doute très jeune,
et les bandes rouges qui couraient le long de son corps indiquaient qu’il
n’était pas venimeux, mais dans la partie antérieure du corps les bandes se
divisaient en Y. Le serpent avait deux têtes ! Il darda ses deux langues,
tâtant l’air, puis commença à ramper, mais le mouvement était un peu
irrégulier, comme s’il ne savait pas vraiment où aller.
— Vite, cherche quelque
chose pour l’attraper avant qu’il disparaisse, dit la Première.
Ayla trouva une petite corbeille
tressée.
— On peut se servir de
ça ? demanda-t-elle à Zelandoni Première.
— Oui, très bien.
Le serpent chercha à s’échapper à
l’approche d’Ayla, mais elle retourna la corbeille et l’immobilisa. Il rentra
sa queue quand elle appuya fermement sur la corbeille
Weitere Kostenlose Bücher