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Le Peuple et le Roi

Le Peuple et le Roi

Titel: Le Peuple et le Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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du roi. Et le comte de Saint-Germain est
chargé du ministère de la Guerre. C’est un réformateur, qui soutient la
politique de Turgot.
    « Voilà notre gouvernement rempli par les philosophes, dit-on.
    « C’est le règne de la vertu, de l’amour du bien public,
de la liberté, le règne des Platon et des Socrate. »
    « Un jour pur nous vient », dit d’Alembert, maître
d’œuvre de l’ Encyclopédie.
     
    Louis XVI se laisse entraîner par le mouvement.
    Il impose les édits de Turgot, au Parlement hostile, à ceux
que les philosophes appellent les « fripons », les « reptiles »,
les « talons rouges », les « bonnets carrés ».
    Et en même temps Louis XVI s’inquiète.
    Au moment même où il paraît le plus fidèle soutien de Turgot,
il s’en écarte.
    Turgot lui semble ne pas avoir compris ce que signifie pour
le roi le sacre de Reims, la nécessité pour le souverain de respecter les « lois
fondamentales » du royaume, qui ne sont pas du même ordre que celles
élaborées par une Assemblée nationale et rassemblées dans une Constitution.
    Le roi précise :
    « On ne doit pas faire des entreprises dangereuses si
on n’en voit pas le bout. »
    Turgot l’irrite avec cette assurance, cette certitude qu’il
a raison en tout.
    Une lettre, ouverte par le « cabinet noir », adressée
à Turgot par l’un de ses amis, a choqué le roi.
    « Je ne croyais pas le roi aussi borné que vous me le
représentez », écrit le correspondant du contrôleur général des Finances.
    Cela blesse Louis, comme ces libelles qui paraissent, et se
moquent de lui qui ne voit pas que l’intention de Turgot est de supprimer la
royauté. Louis serait ce roi
    Qui se croyant un abus
    Ne voudra plus l’être.
    Ah qu’il faut aimer le bien
    Pour, de Roi, n’être plus rien !
    Cette Prophétie turgotine , ainsi que s’intitule ce
texte, l’irrite, exacerbe l’inquiétude qu’il a d’être emporté plus loin qu’il
ne veut aller et d’être ainsi dupe de ce « parti philosophique », hostile
à la monarchie de droit divin, au sacre qui fait obligation au roi, par ses
serments devant Dieu et l’Église, de défendre les lois fondamentales du royaume,
donc la foi catholique, qui n’est pour les libertins que « l’infâme »
qu’il faut écraser.
     
    Louis est sensible au Mémoire que lui remettent les évêques,
réunis en assemblée et qui l’invitent à « fermer la bouche à l’erreur ».
    « On essaiera en vain, lit-il dans ce Mémoire, d’en
imposer à Votre Majesté sous de spécieux prétextes de liberté de conscience… Vous
réprouverez ces conseils d’une fausse paix, ces systèmes d’un tolérantisme
capable d’ébranler le trône et de plonger la France dans les plus grands
malheurs… Ordonnez qu’on dissipe les assemblées schismatiques, excluez les “sectaires”,
sans distinction, de toutes les branches de l’administration publique… »
    Il relit.
    Il veut être le roi sage et mesuré. Il ne veut céder ni aux
philosophes ni aux dévots.
     
    Mais Louis a l’impression, angoissante, et qu’il avait crue
effacée par le sacre et l’euphorie qui avait suivi, que tout glisse entre ses mains,
qu’il subit plus qu’il n’ordonne ou approuve.
    Il avait voulu et avait cru faire l’unanimité de ses sujets
autour de sa personne et de sa politique, et voici, au contraire, que de la
Cour et des salons aux villes et aux villages, et dans les parlements, et au
sein même du gouvernement, elles divisent, qu’il a le sentiment de se trouver
face à un choix majeur, qui va orienter tout le règne et décider de son sort.
     
    Les réformes de Turgot suscitent des troubles.
    Des paysans s’en prennent aux châteaux, aux riches
propriétaires puisque l’édit sur la corvée impose aux privilégiés de payer et
de ne plus exiger un travail d’entretien de la voirie. Et que certains refusent
de l’appliquer.
    La réorganisation par Turgot des messageries, la mise en
circulation de berlines légères et rapides – les turgotines –, l’installation
de nombreux relais de poste entraînent le renvoi de plusieurs milliers d’employés.
    On attaque Turgot :
    Ministre ivre d’orgueil tranchant du
souverain
    Toi qui sans t’émouvoir, fais tant de misérables
    Puisse ta poste absurde aller un si grand
train
    Qu’elle te mène à tous les diables !
    De leur côté, les artisans se plaignent que leurs compagnons
les quittent, créent, au nom de l’édit sur

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