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Le Peuple et le Roi

Le Peuple et le Roi

Titel: Le Peuple et le Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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l’église
Saint-Louis dont le curé a ouvert les portes « à la nation ».
    Et cent quarante-huit membres du clergé et deux nobles ont
rejoint l’Assemblée.
    La séance royale du 23 juin s’annonce décisive. Il ne peut
pas y renoncer, malgré les propos de Necker, qui refuse d’y participer.
    « Elle irritera la nation au lieu de la mettre pour soi »,
dit le directeur général des Finances.
     
    La grande salle est gardée par de nombreux soldats lorsque
les députés y pénètrent, appelés par ordre.
    Et le comte d’Artois regarde avec arrogance ces élus du
tiers état que la pluie a trempés.
    Le roi, aux côtés de son frère, paraît triste et morne.
    Mais quand il se met à parler, sa voix, d’abord « tremblante
et altérée », se durcit, autoritaire, lorsqu’il déclare que les
délibérations tenues par le tiers état, qui prétend être une Assemblée
nationale, sont « nulles, illégales, inconstitutionnelles ».
    Il avait dit à une députation de la noblesse :
    « Je ne permettrai jamais qu’on altère l’autorité qui m’est
confiée. »
    Et devant les trois ordres, il reste fidèle à cette promesse
même s’il consent à l’égalité devant l’impôt, à la liberté individuelle, à la
liberté de la presse, à la création d’états provinciaux.
    Il accepte le vote par tête mais préserve le vote par ordre
quand il est question des « droits antiques et constitutionnels des trois
ordres ».
    Quant à l’égalité fiscale, il s’en remet « à la volonté
généreuse des deux premiers ordres ».
    Donc point d’Assemblée nationale, point de Constitution.
    Et le roi menace :
    « Si vous m’abandonniez dans une si belle entreprise, seul
je ferai le bonheur de mes peuples. »
    Est-ce l’annonce de la dissolution des États généraux ?
    « Je vous ordonne de vous séparer tout de suite et de
vous rendre demain matin, chacun, dans vos salles affectées à votre ordre pour
y reprendre vos délibérations. »
    Le roi se lève, sort. Les fanfares jouent cependant qu’il
monte dans son carrosse.
    Toute la noblesse le suit, et la majorité l’imite.
    Reste la masse noire du tiers état, silencieuse.
     
    Le destin hésite, et Louis ne l’ignore pas.
    Le grand maître des cérémonies, le marquis de Dreux-Brézé, s’avance,
superbe dans son costume chamarré :
    « Sa Majesté, dit-il, prie les députés du tiers de se
retirer. »
    Un piquet de gardes françaises et de gardes suisses l’a
accompagné jusqu’à la porte. On voit luire leurs baïonnettes.
    Bailly, pâle, répond que « l’Assemblée en allait
délibérer, mais que la nation assemblée ne peut recevoir d’ordres ».
    Mirabeau s’approche, tel un lutteur qui va agripper son
adversaire :
    « Monsieur, lance-t-il, allez dire à votre Maître qu’il
n’y a que les baïonnettes qui puissent nous faire sortir d’ici. »
     
    C’est l’épreuve de force.
    « Le roi et la reine ressentent une frayeur mortelle, avait
noté la veille l’Américain Morris. J’en tire la conclusion qu’on va encore
reculer. »
    Louis écoute Dreux-Brézé qui raconte d’abord qu’il a dû
traverser la cour du palais pour se rendre auprès du roi. Il a vu et entendu la
foule, anxieuse, mais déterminée, acclamant le tiers état, et Necker qui
annonce qu’il ne démissionnera pas.
    La foule a crié : « Monsieur Necker, notre père. Ne
nous abandonnez pas. »
    « Non, non mes amis, je resterai avec vous », a
répondu le ministre.
    « La populace qui se permet tout, exige qu’on illumine
la ville en l’honneur de cet événement. »
    Puis Dreux-Brézé rapporte les propos de Bailly et Mirabeau.
    Le roi baisse la tête, bougonne.
    « Ils veulent rester, eh bien foutre, qu’ils restent. »
    Il est épuisé.
    Que peut-il faire puisque « les gardes françaises ont
assuré qu’elles étaient tiers état, et ne tireraient que sur les nobles et les
ecclésiastiques ; les officiers ne sont plus les maîtres, l’un d’eux a
reçu un soufflet d’un soldat ».
    Le tiers état reprend donc ses délibérations.
    Le 24 juin, la majorité des membres du clergé le rejoint.
    Le lendemain, quarante-sept nobles les imitent, et parmi eux
Philippe, duc d’Orléans.
    On pleure, on s’embrasse, on acclame le cousin du roi, bon
patriote.
    La réunion du tiers état, du clergé et de ces nobles
apparaît être de plus en plus l’Assemblée nationale.
    Et le défi qui est lancé au roi est

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